Daniel Godet pour France-Soir
Le USS West Virginia en feu après l'attaque surprise japonaise sur Pearl Harbor, à Hawaï.
The National Archives / AFP
OPINION -
Trump, comme Truman en 1945 ?
Mike Huckabee, l'ambassadeur des Etats-Unis en Israël désigné par Trump, a cru être malin en faisant un parallèle entre Trump et Truman : la décision à prendre par Trump, bombarder les sites nucléaires iraniens, était difficile, mais justifiée par les enjeux, comme celle de Truman en 1945 : la capitulation du Japon valait bien les deux bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki, et les dizaines de milliers de morts civils (sans compter les effets différés des explosions nucléaires).
Cependant, selon bien des historiens, ces bombardements par armes de destruction massive en 1945 de populations civiles sans défense étaient parfaitement inutiles, car la décision de rendre les armes avaient déjà été prise par les autorités japonaises. La situation militaire était désespérée, et les américains avaient bombardé et incendié presque toutes les villes principales du pays, à commencer par Tokyo. L'explication de ma jeunesse – éviter une invasion terrestre risquant d'être couteuse en vies de soldats US compte tenu de la résistance acharnée de l'armée japonaise durant la reconquête par les marines des iles du Pacifique - ne tenait pas. L'explication alternative était une volonté d'impressionner l'Union Soviétique, déjà identifiée comme l'ennemi n°1 de l'après seconde guerre mondiale, et a minima la dissuader de toute expansion en Asie.
L'attaque lancée par Trump sur les sites nucléaires était-elle plus justifiée que celle de Truman sur les deux villes japonaises ? Guère, puisque l'Iran, signataire du TNP, avait son programme sous surveillance tant de l'AEIA que des services de renseignements occidentaux : les deux ont confirmé juste avant l'attaque qu'aucun programme militaire n'était en place en Iran ! Par contre, une hypothèse serait-elle que Trump aurait empêché un usage par Israël de son ‘option Samson', l'usage de ‘sa bombe A', contre l'Iran ?
Un autre point commun entre Truman et Trump est le lien financier avec Israël et le lobby juif des Etats-Unis : Truman avait surpris en reconnaissant le jeune Etat d'Israël le 14 mai 1948, 11 minutes après sa création, et contre l'avis de son administration ; sa campagne présidentielle aurait - selon John Kennedy - alors été relancée grâce à une opportune valise contenant $ 2 millions en billets, contribuant à une victoire le 2 novembre 1948 contre toute attente. De même, la campagne victorieuse de Trump en 2024 a été largement financée par des milliardaires, souvent juifs et pro-israéliens, Mme Adelson venant au 1er rang avec $ 100 millions.
Sources :
Edward Lengel: Decisions: Dropping the Bomb
How Truman came to recognize Israel 75 years ago – The Forward
Les deux millions de Truman : Kennedy, le lobby et la bombe, par Laurent Guyénot
Le 7 octobre 2023, « 11 septembre » d'Israël ?
C'est Netanyahou qui a rapidement dépeint l'attaque unie des combattants palestiniens le 7 octobre 2023 comme l'équivalent pour Israël du 11 septembre 2001 pour les Etats-Unis : une attaque terroriste inopinée et sanguinaire s'en prenant à des civils sans défense.
La comparaison a ses limites :
- Une majorité des victimes et des prisonniers israéliens semble avoir été constituée de soldats et policiers, pas de civils ;
- Le caractère inopiné est discuté en Israël, tant il semblerait que la sécurité d'Israël n'a pas réagi aux alertes reçues tant en interne (ShinBet, armée) que des services de pays amis (USA, Egypte) ; même le jour de l'attaque, des heures auraient été perdues initialement dans l'organisation de la riposte.
Mais ce n'est pas la seule malice issue de la comparaison : par ses invraisemblances, le 11 septembre est tenu par un grand nombre d'historiens comme un ‘inside job', une attaque menée par l'Etat au plus haut niveau (notamment le vice-président Cheney, le secrétaire à la Défense Rumsfeld) ; cette attaque a permis de mettre en place de nouvelles politiques : sécuritaires en interne (le Patriot Act, dont la rédaction a pu être finalisée en quelques jours, qui a institutionnalisé la surveillance des citoyens) et guerrières au Moyen-Orient en attribuant la responsabilité des destructions à des groupes issus successivement de l'Arabie Saoudite, de l'Afghanistan puis de l'Irak. Grâce au 11 septembre, les politiques décrites par le think tank néo-conservateur Project for the New American Century dans son document Rebuilding America's Defenses publié en 2000 ont pu être mises en œuvre. Elles partaient du postulat que la domination étatsunienne était bonne pour le pays et pour le monde, car elle était celle du Bien.
Mais la comparaison ne s'arrête pas là : une part des historiens du 11 septembre (Sabrosky, Unz, Guyénot par exemple) considère qu'Israël y aurait apporté sa pierre.
De la même façon, certains commentateurs du 7 octobre y voient un inside job – c'est d'ailleurs le titre d'une vidéo à la disposition de chacun (cf. infra) ! En effet, le gouvernement d'Israël :
- Aurait malgré les alertes (cf. supra) laissé les forces de sécurité dégarnies (vacances) tout en localisant la rave party au plus près de Gaza ;
- Pourrait avoir sa part de responsabilité quant aux victimes civiles israéliennes, l'intervention des hélicoptères Apache et des chars dans la zone d'invasion n'ayant pu être pleinement sélective.
Sources :
The 9/11 "Double-Cross" Conspiracy Theory, by Laurent Guyénot - The Unz Review
Israel did 9/11 - Dr. Alan Sabrosky, US Army College : Alan Sabrosky : Free Download, Borrow, and Streaming : Internet Archive
Vidéo : "October 7 – An Inside Job" (Documentary, John Hankey, March 2024)
Le 11 septembre 2001, le nouveau Pearl Harbour ?
Aux Etats-Unis, le rapprochement du 11 septembre avec la lâche attaque surprise de la marine japonaise à Pearl Harbour s'est imposé aux commentateurs. Pourtant la nature de cette attaque de Pearl Harbour a aujourd'hui été revue par les historiens :
- La guerre du Pacifique a été largement provoquée par la politique de Roosevelt, y compris un blocus pétrolier contre le Japon ; Roosevelt voyait en la guerre le moyen de relancer définitivement l'économie, toujours affectée par la crise de 1929 malgré la politique dite du New Deal.
- La flotte US du Pacifique avait été déplacée de sa base principale en Californie (San Diego), et rapprochée ainsi de la marine japonaise ;
- L'attaque elle-même semble avoir été connue à l'avance par les autorités politiques et militaires US, mais sans que l'US Navy n'en soit localement informée : seuls les porte-avions étaient opportunément absents de Pearl Harbour, en manœuvre.
La comparaison du 11 septembre avec Pearl Harbour dans ce contexte historique là (cf. supra) prend alors une saveur particulière !
Sources :
ReOpen911 – News » 12 parallèles entre le 11-Septembre et Pearl Harbor, le nouveau documentaire de Massimo Mazzucco
David R. Griffin, Le nouveau Pearl Harbour