Une des observations les plus fulgurantes que j'ai faites (dans un livre il y a longtemps) était que l'intention ne comptait point dans l'évaluation d'une situation. En clair, que les résultats soient volontaires ou involontaires, ce qui compte sont les résultats. C'est la vraie définition de la sécurité.
Si les politiciens prétendent obtenir un objectif, louable et publicitaire, en adoptant une méthode qui est déficiente - même s'ils cherchent en vrai un autre résultat - cela importe peu. Qu'ils soient mal intentionnés ou imbéciles importe peu. Dans les deux cas il faut mettre des personnes mieux appropriée à ces postes.
L'observation faite pour aboutir à ce constat est que l'activité humaine consiste au final à extraire des richesses du sol et à les jeter à la mer.
C'est ce constat qui est le point de départ de la réflexion qui a été faite dans le livre évoqué.
Toute la chaine causale qui se situe en amont, on peut l'analyser, la critiquer, la psychanalyser, ou l'enrichir d'une holistique plus philosophique et spirituelle, n'est que le moyen que trouvent les humains de passer du point A au point B, d'une volonté à un résultat.
Ce qui est amusant avec les choses à l'échelle historique est que les infimes processus psychologiques, les raisons et les motivations, les cheminements et les virages, ont une forme physique indéniable.
Au sein du groupe humain se jouent des contradictions, des conflits, des pressions, dans le but de poursuivre des objectifs concurrents, sans compter la part de folie, c'est à dire de vengeance froide, de stupidité, de stratégies diaboliques etc.
Et c'est intéressant à observer, de se dire que cette énergie stochastique a pour résultat la même chose que ce que ferait le hasard le plus complet, à l'occasion d'une tempête géante.
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Cependant le résultat observé de cette activité globale ne l'est que par moi, micro-organisme localisé en un point et en un temps, dont la voix se perd dans le brouillard.
S'ils en avaient conscience, peut-être agiraient-ils sur ce résultat. Et parfois cette conscience surgit, mais là encore uniquement si elle sert les intérêts de ceux qui veulent écraser les peuples de responsabilités qui ne sont pas les leurs. (Ceci en référence au "réchauffement climatique").
La vérité est que ce résultat macroscopique n'est visible qu'en étant dépouillé de ses intentions et de ses mirages, de sa cécité mentale, de ses biais cognitifs qui sont parsemés d'auto-satisfaction grandiloquente et injustifiée.
La question de "travailler avec la nature et non contre elle", de "l'aider plutôt que la dominer", de "la comprendre plutôt que lui donner des ordres", ainsi que l'application inter-humaine de ces principes afin que les énergies soient orientées rationnellement vers des buts concrets au moyen de méthodes spirituellement valables, n'est pas à l'ordre du jour. Pour cela il faudrait s'entendre avec des ennemis furieux et déments. Il faudrait qu'ils soient convaincus de la supériorité du bien commun et qu'ils ne fassent pas semblant de l'être ; et qu'on ne se méfie pas d'eux.
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Le fait est que, la bêtise humaine s'exprime à chaque instant, chaque endroit, d'une seule et unique manière qui est très claire : dès lors que les opinions viennent décorer la réalité.
Il est quasiment impossible de décrire une réalité froide et dénuée d'intention ou de signification, sans que cela ne soit systématiquement rattaché à une volonté cachée ou inconsciente. Et ensuite c'est contre cette volonté que les gens s'opposent, en faisant le contraire, de façon primaire.
Il est très rare d'entendre des hommes parler de façon impersonnelle des choses, sans que ce ne soit une manière de s'affirmer ou d'affirmer sa pensée, qui voudrait en cachette devenir prédominante.
Et en réalité c'est cela qui conduit l'humanité à sa perte, le fait que les jugements préemptent sur la réalité, que n'importe quel fait soit le tremplin de nouveaux jugements, qu'ils suffise en tout instant de regarder quelque chose pour que cela veuille en dire une autre.
Le fait est que ce mode de fonctionnement est égotique. C'est l'égo qui a pour responsabilité d'observer la réalité et de s'ancrer dans le temps présent pour commettre des choix. C'est lui qui a une vision plate et binaire de la réalité, puisque son rôle est d'être intégré à elle.
Mais l'égo n'est qu'un envoyé spécial de l'esprit dans le monde réel. C'est lui qui est doté d'une "personnalité", sculptée au fil de la vie et des expériences. C'est lui qui a pour charge d'informer l'esprit de ce qui est immanent. La réalité lui est transcendante, elle le dépasse.
L'esprit lui, est "le vrai moi", l'être intérieur qui conçoit la réalité au travers d'une intellectualisation. L'intellect a pour charge de comparer les états passés et présents mais aussi les états hypothétiques. Pour l'esprit,les dangers à venir ne sont pas ceux qui sont apparents et affolants, mais ceux qui sont fabriqués par son intellect.
L'esprit connaît la réalité en ayant les yeux fermés, il sait à quelle réalité s'attendre. Pour lui le sens prime sur les faits, et seuls les faits prévus sont une émergence de sa volonté. Tandis que l'égo lui, n'a aucune mesure des contextes, pour lui les faits priment sur le sens, et le sens est une émergence des faits.
Le jugement qui écrase la réalité de son poids, on peut dire que c'est la prédominance de l'esprit sur l'égo. Et l'interprétation abusive des faits qui déconcertent l'esprit, sont une prédominance de l'égo sur l'esprit. Les deux ne sont pas opposables, au contraire, lorsque cette double-prédominance a lieu, c'est que l'égo et l'esprit sont disjoints.
La disjonction est la perte de contexte, et la soudaine réévaluation des faits, par définition. Cette disjonction, qui revient à une posture dédoublée, résulte d'une forme de sophisme mental, où un même terme, valable pour les deux systèmes (l'esprit et l'égo) possède des significations différentes.
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La question de la guérison psychologique est celle qui consiste à retrouver son unité intérieure, et en particulier à faire fonctionner ensemble, de manière harmonieuse, l'égo et l'esprit.
C'est seulement et uniquement tant que l'esprit des humains est disjoncté, ou on peut dire aussi fragmenté, qu'il y a une dissonance entre ce que pense la tête et ce que font les mains. Dans ce contexte, aucune politique, volonté publique, ou même aucun objectif louable ne peut se maintenir de façon durable. Et ça c'est un vrai constat.
Ce qu'il y a est que le public est enfermé dans une bulle de jugements contradictoires qui écrasent la réalité et qui écrase même les contradictions qui seraient les symptômes de ce dysfonctionnement. Les seules contradictions apparentes sont seulement des théâtres de Kabuki, des reflets, des comédies des vraies contradictions lancinantes qui font sombrer ce monde.
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Les peuples sont laissés à leurs jugements superstitieux et paranoïaques, et on leur fait même croire que leur opinion a de l'importance pour les politiciens, sauf que ce n'est qu'en mesure du fait qu'ils doivent jouer avec ces pressions pour se rendre crédibles.
La démocratie n'est qu'un théâtre des jugements, à l'emporte-pièce, où on demande au badaud ce qu'il s'imagine en voyant la tête de tel ou tel candidat, et si cela lui suffit ou pas. Il n'y a aucune substance, aucune consistance, aucune démarche rationnelle.
On laisse même croire que ce sont ces personnes, en raison de leur personnalité (de leur égo), que l'histoire du monde prendra la tournure de ce qu'ils ont l'air d'avoir dans la tête. On ne se pose même pas la question de faire des votes pour chaque décision politique, ce qui serait légèrement moins irrationnel, et conduirait à terme à ne laisser voter que les personnes compétentes et volontaires, pour chaque problème.
Mais tout cela, ce n'est que le monde des jugements, de ce qui décore la réalité d'illusions qui conviennent à des égos divers et variés.
Les faits réels, eux, font leur propre vie indépendamment du brouhaha de la foule.
Et les politiciens le savent.