France-Soir avec AFP
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius (de droite à droite) aux côtés de soldats ukrainiens et allemands lors d'une visite dans une zone d'entraînement militaire à Mecklembourg-Poméranie-Occidentale
Buttner / pool afp
Berlin a annoncé vendredi la livraison imminente de deux batteries antimissiles Patriot à l'Ukraine, cible de violents bombardements russes ces derniers jours, notamment sur sa capitale Kiev jeudi faisant 31 morts.
Au terme d'un accord trouvé avec Washington, l'armée allemande pourra livrer "dans les prochains jours des lanceurs Patriot à l'Ukraine, puis dans un deuxième temps d'autres composants du système au cours des deux à trois prochains mois", a indiqué le ministère allemand de la Défense dans un communiqué.
Ces dernières semaines, l'Allemagne s'était dite prête à livrer à Kiev deux systèmes Patriot, en puisant sur le propre stock de son armée, à condition toutefois que les Etats-Unis lui donne un engagement ferme pour les remplacer rapidement.
"Les Etats-Unis ont donné leur accord (...) pour que le fabricant américain livre en contrepartie de nouveaux systèmes dans les plus brefs délais", a indiqué le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, cité dans le communiqué.
Considérés comme l'un des meilleurs dispositifs de défense pour leur capacité à abattre des drones et des missiles meurtriers, les Patriot sont fabriqués par l'entreprise américaine d'aéronautique et de défense Raytheon.
"Avec la solution qui vient d'être convenue, l'Allemagne prend les devants afin de répondre rapidement aux besoins actuellement très urgents de l'Ukraine", ajoute Boris Pistorius.
Après les Etats-Unis, l'Allemagne est le principal pourvoyeur d'aide militaire à Kiev.
Berlin associe sa livraison de Patriot "à un appel à nos partenaires pour qu'ils fournissent à leur tour d'autres systèmes dans les meilleurs délais", poursuit M. Pistorius, pressant les autres pays de l'Otan de mettre leurs engagements à exécution.
Parmi les membres de l'Alliance, la Norvège, les Pays-Bas, le Danemark et la Suède se sont dits prêts à participer au financement de la livraison de Patriot, que les Etats-Unis sous la houlette de Donald Trump ne veulent plus fournir directement à Kiev.
L'Allemagne a déjà envoyé trois batteries Patriot à Kiev depuis février 2022. Le stock restant de la Bundeswehr était donc de 9, dont deux stationnés dans le sud-est de la Pologne pour protéger l'aéroport de Rzeszów, d'où partent les livraisons d'armes à l'Ukraine et un autre utilisé pour former les soldats ukrainiens au sein de la Bundeswehr.
En livrant de nouvelles batteries Patriot à l'Ukraine tout en obtenant des États-Unis qu'ils remplacent immédiatement ces équipements, l'Allemagne s'affirme comme fer de lance d'une stratégie occidentale de plus en plus agressive face à la Russie. Washington, en acceptant de fournir deux nouvelles batteries à la Bundeswehr pour compenser cette livraison, valide et soutient pleinement cette posture, s'inscrivant ainsi dans une logique d'escalade déguisée. Sous couvert de soutien défensif, Berlin et Washington orchestrent une montée en puissance militaire qui dépasse la simple aide à l'Ukraine. En multipliant les livraisons, en mobilisant les alliés de l'Otan et en appelant à une réaction coordonnée, l'Allemagne laisse entendre qu'elle se prépare à une confrontation directe. Ce glissement progressif, assumé politiquement et militairement, pourrait bien être perçu, côté russe, non plus comme un soutien à un pays tiers, mais comme une participation active à un conflit : une mascarade diplomatique qui dissimule de moins en moins la volonté de guerre.