I) La disparition de la séparation des pouvoirs.
Nous avons vu dans une première partie que dans un système de démocratie représentative, pour qu'une majorité électorale puisse imposer son point de vue à la minorité, il était nécessaire que les représentants élus soient parvenus au pouvoir dans des conditions régulières et après un scrutin que l'on peut qualifier incontestablement de « sincère ». Et que cela soit reconnu comme tel par le corps social. C'est ce qui construit la première branche de la « légitimité » des gouvernants. Nous avons vu que l'arrivée au pouvoir d'Emmanuel Macron à ce point illégale et irrégulière pouvait s'apparenter à une forme de coup d'État. Raison pour laquelle s'est installée dans l'opinion publique et dès le début de son mandat l'idée que cet homme « n'était pas à sa place ». Et sa réélection de 2022 n'est pas détachable du coup d'état initial. Son premier mandat visant à piétiner les institutions rendait cette réélection difficilement évitable.
Ensuite pour gouverner, toujours dans une démocratie représentative, même si l'on est régulièrement parvenu au sommet de l'État, il est aussi nécessaire de construire et de préserver en continu sa légitimité et celle de tout le dispositif dans lequel on exerce le pouvoir. C'est la deuxième branche de la légitimité et le moins que l'on puisse dire, de ce point de vue, celle de Macron est simplement anéantie.
Répétons encore et encore que la démocratie représentative, est un système institutionnel minutieux et pragmatique qui doit organiser une domination de la majorité acceptée par la minorité. Quelles sont les conditions impératives de cette acceptation ? D'abord, nous l'avons vu, que les représentants de la majorité prennent le pouvoir après une élection régulière dont la sincérité ne peut être mise en doute. Ensuite que ce pouvoir ait une durée limitée, pour que ce qui a été fait durant le mandat, puisse être remis en cause après l'élection suivante en cas de changement. Et enfin que le pouvoir s'exerce dans un cadre strict qui est celui d'une Constitution et d'une organisation des pouvoirs publics qui prévoient séparation, équilibres et contrôles. Évitant ainsi les excès et validant en continu l'acceptation de la minorité battue lors du scrutin. Élaborée par Locke et Montesquieu la théorie de la séparation des pouvoirs vise donc à séparer les différentes fonctions de l'État, afin de limiter l'arbitraire et d'empêcher les abus liés à l'exercice de missions souveraines. C'est cette organisation des pouvoirs publics qui s'applique en théorie chez nous depuis l'avènement de la IIIe République.
Nous allons voir que de la même façon que son arrivée au pouvoir était illégale et par conséquent illégitime, Macron exerce celui-ci dans un cadre qui n'a plus grand-chose à voir avec la légalité institutionnelle d'une démocratie représentative.
Une constitution en lambeaux