Par Dmitry Orlov − Le 3 août 2025 − Source Club Orlov
Dmitri Medvedev
Comme vous le savez peut-être, Donald Trump a été élu pour accomplir une mission. Si vous pensez que cette mission consiste à rendre à l'Amérique sa grandeur (MAGA), alors vous devez désapprendre cette fausse information. Il n'existe aucune force connue dans l'univers capable de sauver de la faillite un pays dont le PIB s'élève à 30 000 milliards de dollars et dont la dette publique totale avoisine les 150 000 milliards de dollars. A ce chiffre approximatif de 150 000 milliards de dollars correspond une dette fédérale de 37 000 milliards de dollars, à laquelle s'ajoutent les dépenses non discrétionnaires inscrites dans des lois que le Congrès n'ose pas toucher et qui représentent aujourd'hui près des trois quarts de toutes les dépenses fédérales.
Cela représente également environ les trois quarts de la valeur totale détenue aux États-Unis par ses gouvernements (étatiques, fédéraux et locaux), ses entreprises, ses banques et ses citoyens. Lorsque cette dette disparaîtra, comme cela arrivera inévitablement, et que les paiements cesseront ou deviendront sans valeur en raison de l'inflation, les Américains perdront en moyenne les trois quarts de leur richesse, même s'il est beaucoup plus probable que la plupart des gens perdent tout, en raison de la combinaison d'une dépression économique et d'une hyperinflation, tandis que les riches continueront à s'enrichir. Par conséquent, MAGA n'est qu'un rêve stupide destiné à attirer des imbéciles qui brandissent des drapeaux et portent des casquettes MAGA, et j'espère sincèrement que vous n'en faites pas partie.
Alors, que doit faire Trump ? Pour répondre à cette question, il suffit d'examiner qui l'a mis là où il est. Et il s'avère que c'est une bande de milliardaires ! La raison pour laquelle ils veulent le maintenir à la Maison Blanche est évidente : ils disposent des informations que j'ai exposées dans le paragraphe précédent et veulent profiter du temps qui leur reste pour passer du statut de milliardaires à celui de trillionnaires [Plus de 1000 milliards de dollars, NdT]. L'astuce qu'ils ont imaginée pour y parvenir consiste à demander à Trump de faire fluctuer les marchés financiers, en informant ses amis à l'avance de ses intentions, afin qu'ils puissent utiliser des techniques de délit d'initié pour acheter à bas prix et vendre à prix fort, s'enrichissant ainsi à chaque fois.
Pendant un certain temps, Trump s'en est plutôt bien sorti pour eux. Sa première stratégie a consisté à utiliser les droits de douane. Il annonçait des droits de douane ridiculement élevés, punitifs et prohibitifs à l'encontre de tel ou tel pays, en arguant que le pays en question avait un excédent commercial avec les États-Unis et que cela était en quelque sorte injuste. Les entreprises dont les revenus dépendent des importations se précipitaient alors pour s'approvisionner en produits importés avant l'entrée en vigueur des droits de douane. Leurs actions chutaient alors, donnant à ses amis milliardaires l'occasion de les racheter à bas prix. Mais Trump annonçait ensuite un report pendant lequel un accord pouvait être conclu avec le pays en question, et les actions des importateurs remontaient, permettant à ses amis milliardaires de les revendre avec profit. Cependant, suffisamment de gens ont compris ce qui se passait et cette astuce a cessé de fonctionner.
Trump a donc tenté une autre manœuvre. Il a contraint les dirigeants de pays qui sont essentiellement des colonies américaines - qui ont des troupes américaines stationnées sur leur sol et sont soumis à un contrôle politique et financier étroit des États-Unis - à signer des accords ridicules en vertu desquels ils s'engageaient à acheter d'énormes quantités inexistantes de pétrole et de gaz américains dont ils n'avaient pas besoin et à investir des sommes colossales inexistantes dans des industries américaines inexistantes. La liste des pays vassaux occupés par les États-Unis comprend tous les pays de l'Union européenne, le Royaume-Uni, le Japon et la Corée du Sud. Ces manipulations offraient une fois de plus de merveilleuses opportunités de délits d'initiés à ceux qui connaissaient les détails des accords à l'avance et pouvaient négocier des actions et des contrats à terme de manière rentable... avant que tout le monde ne se rende compte que ces accords étaient tous bidons.
Note du Saker Francophone
Depuis quelques temps, des gens indélicats retraduisent "mal" en anglais nos propres traductions sans l'autorisation de l'auteur qui vit de ses publications. Dmitry Orlov nous faisait l'amitié depuis toutes ses années de nous laisser publier les traductions françaises de ses articles, même ceux payant pour les anglophones. Dans ces nouvelles conditions, en accord avec l'auteur, on vous propose la 1ere partie de l'article ici. Vous pouvez lire la suite en français derrière ce lien en vous abonnant au site Boosty de Dmitry Orlov.
Dmitry Orlov
Soutenez mes efforts sur boosty.to
Le livre de Dmitry Orlov est l'un des ouvrages fondateurs de cette nouvelle « discipline » que l'on nomme aujourd'hui : « collapsologie » c'est à-dire l'étude de l'effondrement des sociétés ou des civilisations.
Il vient d'être réédité aux éditions Cultures & Racines.
Il vient aussi de publier son dernier livre, The Arctic Fox Cometh.
Traduit par Hervé, relu par Wayan, pour le Saker Francophone
En cours de route, Trump a également tenté de secouer les marchés de l'énergie en menaçant d'imposer des droits de douane de 100 % sur toutes les exportations vers les États-Unis de tout pays ayant acheté du pétrole ou du gaz à la Russie. Étant donné que les exportations de pétrole de la Russie s'élèvent à 3,5 millions de barils par jour, une quantité que les autres producteurs de pétrole auraient du mal à compenser, les amis milliardaires de Trump auraient pu théoriquement profiter d'une forte hausse des prix du pétrole. Mais les deux plus grands importateurs d'énergie russe, la Chine et l'Inde, ont dit à Trump d'aller se faire voir, et le plan est tombé à l'eau.
Trump aurait pu imaginer d'autres plans similaires, comme menacer le monde de famine en bloquant les exportations de céréales russes (la Russie exporte des céréales vers plus de 100 pays) et faire profiter ses amis milliardaires d'une flambée des prix des céréales, qui auraient acheté des contrats à terme sur les céréales avant son annonce pour les revendre au plus haut. Mais Trump a perdu la tête.
Il avait probablement perdu la tête bien avant cela, mais cela n'est devenu flagrant qu'aujourd'hui. Ce qui l'a déclenché, c'est une publication sur les réseaux sociaux de Dmitri Medvedev, vice-président du Conseil de sécurité de la Fédération de Russie. Il compte également parmi ses collaborateurs des personnes qui trollent des personnalités que les Russes n'apprécient généralement pas. Tout le monde sait que c'est un peu risqué et quelque peu inapproprié, mais c'est bon pour le moral. En réponse à Trump qui a raccourci le délai déjà ridicule de 50 jours pour « mettre fin à la guerre en Ukraine » à seulement 10 (ou 12 ?) jours, la petite armée de trolls de Medvedev a écrit :
Trump joue au jeu de l'ultimatum avec la Russie : 50 jours ou 10. Il devrait se souvenir de deux choses : 1. La Russie n'est pas Israël, ni même l'Iran. 2. Chaque nouvel ultimatum est une menace et un pas vers la guerre. Pas entre la Russie et l'Ukraine, mais avec son propre pays.
Trump a répondu :
Dites à Medvedev, l'ancien président raté de la Russie, qui se prend toujours pour le président, de surveiller ses propos. Il s'aventure en terrain très dangereux !
C'est déjà assez grave : le soi-disant « leader du monde libre » (pour utiliser une dernière fois cette vieille épithète) se laisse provoquer par un troll sur Internet.
Mais Trump est ensuite passé de l'inapproprié au ridicule, transformant une guerre des mots sur les réseaux sociaux avec un troll sur Internet en une question de dissuasion nucléaire :
J'ai ordonné le déploiement de deux sous-marins nucléaires dans les régions appropriées, au cas où ces déclarations stupides et incendiaires ne seraient pas que cela. Les mots sont très importants et peuvent souvent avoir des conséquences imprévues, j'espère que ce ne sera pas le cas ici.
Ce n'est pas une réponse appropriée. C'est une réaction imprudente, déraisonnable et carrément démente. La réaction des trolls de Medvedev à la réaction de Trump a été mesurée et calme :
Si quelques mots de l'ancien président russe provoquent une telle réaction nerveuse chez le redoutable président américain, cela signifie que la Russie a raison sur tout et qu'elle continuera à suivre sa propre voie.
Ce que Trump a ordonné de faire en réponse à un argument assez évident avancé par l'équipe Medvedev (à savoir que lancer un ultimatum à une puissance nucléaire constitue ipso facto une escalade nucléaire) est non seulement illégal, mais aussi imprudent. Les États-Unis ne sont pas prêts pour une confrontation nucléaire avec la Russie et ne le seront probablement plus jamais.
Les « deux sous-marins nucléaires » (sic) auxquels Trump fait référence sont des vestiges de la guerre froide dont il ne reste que 14 exemplaires, construits entre 1981 et 1997 et équipés de missiles Trident et Tomahawk. Dans le même temps, la Russie a renouvelé à 100 % sa flotte de sous-marins nucléaires, surpassant la flotte américaine obsolète dans tous les indicateurs directs d'efficacité, tout en modernisant ses défenses antimissiles à un point tel que les vieux Trident et Tomahawk ne constituent plus un défi insurmontable. D'autre part, les États-Unis n'ont aucun moyen d'intercepter les nouveaux missiles russes. Par conséquent, même si l'amiral dément qu'est Trump envoyait deux sous-marins nucléaires pour menacer le blogueur Medvedev dans son repaire du Kremlin, et même s'il envoyait tous ses vieux rafiots en patrouille, cela ne changerait rien à l'arithmétique de la dissuasion mutuelle. Mais aurait-il pu le faire ?
Non, il n'aurait pas pu. Car au cours des trente dernières années, un schéma confortablement établi s'est mis en place pour les vestiges de la flotte de sous-marins nucléaires américains de classe Ohio, hérités de la guerre froide : quatre ou cinq sous-marins rôdent dans des zones de patrouille désignées. Ceux-ci se trouvent dans les océans Atlantique et Pacifique, tandis que dans l'océan Indien, leurs signatures acoustiques n'ont pas été détectées depuis très longtemps. Tous ceux qui s'y intéressent peuvent même les localiser avec une précision arbitraire. Le même nombre de ces vénérables tubes se trouve en état de préparation conditionnelle au combat à proximité de certaines bases navales américaines, où elles font l'objet d'une maintenance approfondie et de réparations majeures. Une fois ces travaux terminés, les tubes sont fumigées, ventilées, de nouveaux équipages sont formés, et elles repartent dans l'Atlantique et le Pacifique pour divertir les marins des puissances maritimes mondiales avec leurs cliquetis, leurs grincements et leurs gémissements tandis qu'elles errent sans but.
Les autres navires souffrent de sénilité, d'arthrite, de prostatite et d'autres maux liés à l'âge et résident dans divers hospices navals, où ils restent... vous l'avez deviné, « conditionnellement prêts au combat ». À supposer qu'ils puissent être remis en état, où l'amiral Trump enverrait-il deux sous-marins nucléaires conditionnellement prêts au combat pour terrifier suffisamment le blogueur Medvedev afin qu'il ne trolle plus jamais l'amiral Trump ? Dans l'Arctique ? Soyons sérieux, les sous-marins américains n'ont pas les compétences pour naviguer sous la glace, ce qui est désormais monnaie courante pour les sous-marins russes. Ils pourraient plutôt dériver sans but dans la mer du Nord, interpellés périodiquement en anglais avec un accent russe par des navires de surface curieux de savoir s'ils ont réussi à localiser le blogueur Medvedev errant.
Qui peut dire ce qui ronge l'esprit de Trump au point qu'il menace d'une riposte nucléaire à une provocation tout à fait raisonnable de la part d'une ferme à trolls notoire ? Peut-être est-ce ses amis milliardaires qui réclament à grands cris de nouveaux stratagèmes d'initiés. Ou peut-être est-ce le fait qu'il se trouve coincé dans un étau ukrainien entre « C'est la guerre de Biden » et « C'est la victoire de Poutine - et la défaite de Trump ». Ou peut-être est-il simplement temps que son cerveau soit mis hors service. Son père et sa sœur aînée sont tous deux devenus séniles à peu près à son âge actuel. Je me souviens vaguement avoir entendu quelque part qu'ils avaient été diagnostiqués avec la maladie d'Alzheimer.
C'est peut-être cela, ou peut-être s'agit-il dans son cas d'une démence frontale. L'empathie et la stabilité émotionnelle sont particulièrement vulnérables aux troubles neurodégénératifs affectant le cortex préfrontal ventromédial, et certains des symptômes de Trump, tels que l'idée qu'il serait judicieux de construire un Trump Gaza Resort and Casino ou d'envoyer des sous-marins nucléaires pour régler ses comptes avec un troll russe sur Internet, révèlent des problèmes spécifiques d'empathie et de maîtrise de soi.
La maladie de Trump semble progresser rapidement et, compte tenu du comportement politique très médiatisé et théâtral de Trump, nous pourrons observer son évolution en temps réel. Des problèmes de langage, des pertes de mémoire, des sautes d'humeur et une perte de contrôle moteur seraient des signes de la maladie d'Alzheimer ; des changements de personnalité (apathie, impulsivité, perte d'empathie), un mauvais jugement, un comportement socialement inapproprié et des difficultés linguistiques (difficultés à parler, à comprendre ou à trouver ses mots) indiqueraient une démence frontotemporale. Quel que soit le cas, sa capacité à faire de sa joyeuse bande de milliardaires des trillionnaires d'ici la fin de son mandat pourrait être gravement compromise, sans parler des millions d'Américains qui ont été diagnostiqués avec le syndrome MAGA et qui devraient se faire soigner immédiatement.