
Par Le Média en 4-4-2, le 18 août 2025
ChatControl, le projet européen qui vise à scanner tous vos messages et emails, fait polémique : protection des enfants ou surveillance de masse ?
L'Union européenne, ce mastodonte bureaucratique, serait-elle en train de tricoter un filet numérique pour attraper bien plus que des contenus pédocriminels ? C'est ce que clament de nombreux internautes dénonçant un projet "orwellien" baptisé Chat Control. Sous couvert de lutte contre la pédocriminalité, l'UE envisagerait de scanner vos messages, photos et e-mails, même ceux protégés par le chiffrement. La France, toujours prompte à hocher la tête devant Bruxelles, serait dans le camp des supporters de ce projet controversé. Mais entre les pseudo-experts qui jurent que tout va bien et les lois européennes qui écrasent les protections françaises, que faut-il vraiment en penser ? Plongeons dans ce débat brûlant, où vie privée et sécurité s'entrechoquent.
Un filet numérique pour traquer la pédocriminalité
Le règlement CSAM (Child Sexual Abuse Material), alias Chat Control, est au cœur de la tempête. Son ambition ? Enrayer la diffusion de contenus pédopornographiques à l'échelle européenne. Actuellement, les outils existants peinent à endiguer le fléau. "On court après les contenus illicites comme un pompier après un feu de forêt", ironise un spécialiste du droit numérique. L'idée de Bruxelles ? Déployer une sorte de radar numérique capable de détecter en amont les images illégales sur les plateformes et messageries, y compris celles chiffrées. Concrètement, les algorithmes compareraient les fichiers partagés à une base de données de contenus pédocriminels connus pour les bloquer immédiatement.
Un objectif louable, mais le diable se cache dans les détails. Scanner des messages chiffrés, c'est comme demander à ouvrir toutes les enveloppes scellées avant qu'elles n'arrivent à destination. Les défenseurs de la vie privée crient au scandale, et on les comprend. Ce n'est pas juste une question de principe : une telle mesure pourrait fragiliser la sécurité des communications numériques dans leur ensemble.
Les garde-fous français ne seraient qu'une illusion face à la machine européenne ?
Face aux inquiétudes, certains experts, comme Guillaume Desgens, magistrat et professeur au CNAM, jouent les pompiers de service. "Pas de panique, la France a un cadre juridique ultra-protecteur !", clame-t-il. Selon lui, le code de procédure pénale permet déjà des contrôles ciblés, sous supervision judiciaire, pour traquer pédocriminalité, terrorisme ou crime organisé. Adresses IP, contenus spécifiques, clés de déchiffrement : tout cela peut être obtenu, mais uniquement pour des suspects identifiés, sur une période limitée et avec l'aval d'un juge. En théorie, un rempart solide.
Mais soyons sérieux deux minutes : quand l'UE décide, la France plie. Les lois européennes, comme le RGPD ou le DSA (Digital Services Act), dictent les règles, et les prétendues protections françaises, comme la loi Informatique et Libertés ou la SREN, ne sont que des faire-valoir. La Cour de justice européenne, qui veille au grain, peut retoquer des textes trop intrusifs, mais elle n'a pas empêché Bruxelles de pousser Chat Control depuis 2022. Alors, ces "garde-fous" juridiques, ne seraient-ils pas juste une belle histoire pour endormir les citoyens ?
Une levée de boucliers numériques
Le projet ne passe pas inaperçu. Sur X et TikTok, les internautes s'indignent, évoquant une "surveillance de masse" digne d'un roman dystopique. Même des poids lourds de la tech s'en mêlent. Signal, la messagerie chiffrée, a sonné l'alarme en 2024, avertissant qu'un tel système pourrait créer des failles exploitables par des hackers ou des États malveillants. Proton, l'entreprise suisse derrière ProtonMail, a carrément appelé les gouvernements à rejeter ce "scan de masse". Quand les experts en cybersécurité tirent la sonnette d'alarme, difficile de rester zen.
Et pourtant, certains persistent à minimiser. "Ce n'est pas illégal, et les garde-fous existent", répète-t-on. Mais les internautes ne sont pas dupes : une fois la porte ouverte au scan des communications, qui garantit qu'elle ne sera pas utilisée pour autre chose ? Surtout quand on sait que les autorités européennes n'ont pas toujours brillé par leur transparence.
Un projet enlisé, mais pas enterré
Chat Control n'est pas encore adopté, et c'est déjà un miracle. Depuis mai 2022, le texte patine, incapable de rallier une majorité au sein des États membres. Entre versions amendées et reports successifs, il ressemble à un vieux chewing-gum collé sous une table. En juin 2024, la Belgique a tenté de calmer le jeu avec une version demandant le consentement des utilisateurs. En février 2025, la Pologne a proposé d'exclure le scan des messages chiffrés. Mais le Danemark, qui préside l'UE depuis juillet 2025, a remis le projet sur la table. Prochain round ? Octobre 2025, avec un possible vote final d'ici fin 2025 ou début 2026.
Vers un équilibre impossible ?
Le débat est légitime : comment lutter efficacement contre la pédocriminalité sans transformer l'UE en Big Brother ? Les technologies existent pour filtrer les contenus illicites, mais elles ne doivent pas devenir des armes contre la liberté individuelle. Les citoyens ont raison de s'inquiéter, et les experts qui jouent les rassurants devraient peut-être se demander si leur confiance en Bruxelles n'est pas un peu naïve. En attendant, restez vigilants : vos messages, même chiffrés, pourraient bientôt passer sous le radar de l'UE. Et si la France pense pouvoir protéger ses citoyens avec ses lois, elle ferait bien de se rappeler qui tient vraiment les rênes.