La loi de Benford a ceci de stupéfiant qu'elle exempte de façon logique une théorie de la conspiration qui consistera à prouver vaillamment que nous vivons dans une simulation informatique, par exemple. C'est à peu près la première conclusion qui vient à l'esprit de n'importe qui en observant à peu près n'importe quoi, qui ne soit pas conforme à ses attentes, et qu'il considère comme "logiques".
Concrètement, la loi de Benford montre que la répartition des nombres que l'on voit au quotidien, les prix, les kilométrages, les surfaces, les densités de population ou n'importe quelle série de chiffres, suit une logarithme inversée.
On a vu des "théories du Tout" basées sur ces observations fascinantes. On se demandait pourquoi elles avaient été effacées par leurs jeunes auteurs.
L'explication est prosaïque mais les conséquences sont vastes et philosophiques. C'est amusant d'ailleurs parce que dans Wikipedia, ou dans toute forme d'énoncé scientifique, il y a une cruelle absence de la valeur philosophique des démonstrations découvertes.
Le fait est qu'on croit, on s'attend à ce que "les nombres" soient de nature additives. Cette croyance est fondée par l'arithmétique de Péano, qui "explique" comment marchent les mathématiques, en disant que 2 n'est que 1+1. Mais il se trompe, lol.
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La nature des mathématiques, sa raison d'être, sa nature profonde, son fondement logique, a été l'objet de millions de pages d'études et d'explications auto-contradictoires et tautologiques qui n'ont menées nulle part. C'est cela, la beauté de la science.
Nulle part ? Non certainement pas ; cela a fait progresser de manière providentielle la connaissance. Voilà comment cela marche : on a une idée lumineuse, une révélation, un Eurêka. Les chances que ce Eurêka conduise à une véritable découverte scientifique sont, mettons au hasard, de une sur deux. Archimède qui eu le premier Eurêka connu vérifia que l'eau de son bain montait de niveau quand il se plongeait dedans, déduisant ainsi sa masse. C'est toujours quand on prend une pause et un peu de recul sur un travail long et laborieux que viennent les Eurêka. Il pu ainsi aboutir à des conclusions concrètes et objectives, en mettant une gradation sur sa baignoire.
Mais pour beaucoup des idées de génie qui nous traversent l'esprit, cela peut conduire à des points de suspension, des choses qui restent irrésolues. C'est avec ferveur qu'on se lance dans des démonstrations et qu'on construit des outils pour le faire. Et c'est sur ce chemin qu'on fait des découvertes concrètes qui sont autant de vraies découvertes, de compréhensions nouvelles, sur la nature intime des nombres. C'est en cela que Ramanujan considérait les nombres comme "ses amis". Si bien que peu importe si à la fin l'idée n'a mené nulle part, c'est en chemin qu'on a fait les plus belles découvertes.
Et en passant, on découvre ce qu'est l'intelligence : de l'enthousiasme ! Sans enthousiasme, sans amusement, toute mesure de l'intelligence est absurde. N'importe qui peut atteindre un Q.I. de 200 s'il est extatique :) C'est important parce que cela recadre de façon sévère la réalité de notre époque ; et sa propension à suivre la courbe d'une boucle de renforcement qui conduit la civilisation à sa perte. C'est la joie qui devrait être promue, pas la guerre !
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Benford lui-même avait mis cette note dans un coin d'un autre démonstration, et elle est restée cinquante sept ans sans être analysée avant qu'effectivement on constate qu'il avait mit le doigt sur quelque chose de transcendant. Les nombres que nous voyons au quotidien respectent une distribution logarithmique, tout simplement parce qu'ils sont exprimés de manière additive alors qu'ils sont de nature multiplicative. Les notes de musique ne font pas cette erreur, puisqu'elles sont toute une ou l'autre puissance de √2. Donc ne nature logarithmique.
Ce qui est fulgurant avec la loi de Benford est que notre anticipation déductive est erronée. C'est le fait-même que nous nous appuyons par mégarde sur une anticipation déductive pour observer la réalité qui est la question de fond.
Tel que je m'y attendais en parcourant la page wikipédia sur la loi de Benford, elle est utilisée pour détecter les fraudes fiscales. C'est pour cela qu'on nous demande de ne pas mettre les virgules dans les déclarations. En économie aussi elle a des applications probantes. Toute suite numérique ne respectant pas à peu près la loi de Benford montre qu'il y a un problème et que cette répartition n'est pas "naturelle". C'est intéressant, non ? Cela veut dire que ces suites de nombres sont le résultat de facteurs étrangers à ceux auxquels on s'attend.
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Ce qui est remarquable est que notre "erreur native" de croire que les nombres sont de nature additives et non multiplicative permet de dresser un référentiel pour les évaluer. On peut encore dresser pas mal d'autres conclusions philosophiques sur la nature des nombres. Je soupçonnais déjà depuis longtemps que les nombres étaient en fait des rangs d'un algorithmie. Les Mayas, déjà, considéraient les nombres comme des rangs. Dans une exponentielle, le nombre est la puissance à laquelle on monte √2, qui est le nombre originel de toutes choses, de toutes les ondes, Dieu en personne pour être clair :)
En physique quantique l'abstraction artistique dans laquelle on est plongés est celle de vouloir mesurer avec un référentiel dimensionnel des choses qui relèvent de l'ordre ontologique des probabilités. Tout simplement.
La question est toujours celle du référentiel.
Par exemple pour calculer la position x, y, z dans notre cadre 3d, d'un étoile, nous n'avons que les angles γ et θ, et la distance. C'est là qu'on se rend compte qu'on n'a rien compris à la trigonométrie puisque dès qu'on mesure la position x et y sur un plan, on dénature la capacité à mesurer la position y et z sur l'autre plan, à moins de faire se juguler mutuellement les deux calculs, ce qui m'a demandé trois jours de réflexion intense pour comprendre la nature du signe "moins", qu'il faut mettre en amont du calcul. Et là, le plus dur à faire pour fabriquer un moteur 3D est terminé.
Et le plus étonnant est qu'on utilise un référentiel arbitraire quelconque, pour ce faire. Car si on n'avait pas de référentiel, si l'objet était lui-même son propre référentiel, les angles γ et θ seraient de zéro. Comment faire le moindre calcul ?
Et ce qui est encore plus fondamental est que notre référentiel arbitraire ainsi que notre perception de l'espace (faut-il ajouter), sont eux-mêmes uniquement de nature psychologiques, qu'ils n'ont aucune réalité. Ce ne sont que des abstractions mentales ; auxquelles on applique des mathématiques qui elles, sont bien réelles par contre.
Cela montre bien le genre d'erreur qui peut être commise quand un résultat ne correspond pas à ce à quoi on s'attend, alors qu'on utilise pourtant une logique rigoureuse et "démontrée scientifiquement". Tout ce que la science peut démontrer, c'est notre erreur de jugement. Tout ce à quoi mène la science c'est de montrer à quel point on peut se tromper dans notre "anticipation déductive". Qui le plus souvent est involontaire, et relève d'un schéma d'évidence.
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Le cerveau marche par anticipation sur la base de la logique qu'il déduit des observations. D'abord il observe, ensuite il construit la logique et enfin il projette ses présomptions sur la base de cette logique. Mais cette "logique" n'est qu'une présomption et c'est bien là, la faiblesse de l'humain.
Par exemple il est capable d'évaluer grossièrement si 47*38 est vaguement supérieur ou inférieur à 10000. Il ne fait en zéro secondes de calcul. Il ne se trompe guère trop. Mais le problème est qu'il consacre autant de temps de réflexion à des sujets parfois très complexes, qui le dépassent, et dont souvent la vie des gens peut dépendre.
Nous pensons ici au fait de s'imaginer qu'un vaccin s'oppose à un virus, puisque c'est la seule logique binaire dont ont été capables ces incompétents de politiciens qui imposent par la force leur ignorance crasse au reste du monde. Ils font pareil en opposant les pauvres à "la richesse du pays", et ainsi de suite. Zéro seconde de réflexion sur la validité logique de leurs prémisses. Et aucun chiffre à l'appui, aucune étude, ni encore moins d'études pour démontrer leur grave et insolente erreur. Au point qu'on se demande s'ils le font exprès.
Cela marche dans l'autre sens, le peuple peut avoir la fine intuition qu'il y a quelque chose qui ne va pas quand le taux d'erreur est trop élevé par rapport à une distribution statistique commune. La loi de Benford s'applique ici aussi. Puisqu'elle permet de détecter toutes sortes de fraudes.
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C'est notre anticipation déductive qui est encore responsable de faire surgir des contradictions apparentes, qui peuvent être l'objet de blocages psychologiques. Quand une chose nous paraît impossible, on ne cherche même pas à l'étudier ou à l'envisager, alors-même qu'elle est là sous nos yeux, criante de vérité, clamant qu'on prête attention à elle. Simlement on ne la voit pas elle échappe à notre perception, parce que nous fabriquons nous-mêmes une logique "pseudo-logique" qui est incompatible avec ce qu'on est capables d'admettre, de soutenir et de comprendre.
On s'imagine souvent, à tort, vaillamment, qu'en raison de contradictions, certaines choses ne peuvent pas être. Et c'est la base de la manipulation mentale. Par exemple, qui peut déduire qu'une personne particulièrement sensible et capable de cerner avec précision nos émotions, nos ressentis, est également incapable d'avoir la moindre empathie ? Pourtant il (le psychopathe) ne fait que puiser chez l'autre ce qui manque chez lui ; et il s'en sert pour le détruire par une sorte de jalousie.
Il y a énormément de concepts relatifs à la psychologie, c'est à dire le fonctionnement de la perception de la réalité, qui défient les croyances interprétatives de premier niveau, et qui montrent que des choses ne sont pas contradictoires mais parfaitement logique, au contraire.
Même dans le vocabulaire des confusions de ce type peuvent apparaître, quand la psychose n'est en fait rien d'autre que l'expression d'une névrose, et vice-versa. Ceci est "illogique" puisque ces deux choses sont antinomiques. C'est pourtant ainsi que la perversion exprime à la fois son besoin d'être contenue par le masochisme, et tout à la fois le besoin d'être défoulée par le sadisme.
Lorsqu'on admet qu'il y a deux référentiels combinés, les contradictions apparentes peuvent être facilement résolues. C'est un peu la base du sophisme, qui est un des termes les plus fondamentaux du nexus que constitue un même terme employé avec deux référentiels en réalité distincts. Principalement, les deux référentiels qui sont maladroitement, ou adroitement combinés, sont la réalité et ce qu'on se figure de la réalité.
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On ne peut évaluer la réalité qu'avec le référentiel de notre perception de la réalité. Mais croire que les deux sont une seule et même chose, c'est croire qu'on vit dans un monde hallucinant, "holographique", qui n'a aucune substance et probablement aucun sens. Et c'est quand notre jugement écrase la réalité, qu'on est vraiment un malade mental.
La conscience est le fruit d'une émulation de la rencontre alchimique entre la réalité et la perception de la réalité, qui ne cesse de s'affiner et de progresser en découvrant ses limites et en refondant sa perception du monde. En réalité, ce qui devrait être béni et adulé, c'est de prendre conscience de ses erreurs.