Le rapprochement entre l'Inde et la Chine représente une refonte substantielle de la géopolitique asiatique.
Le changement - règle inhérente à la nature humaine. Le changement affecte tous les aspects de la société humaine, façonnant nos idées, nos convictions et notre perception du monde. Le changement est également partie intégrante de la politique, particulièrement à l'échelle mondiale. Bien que la perspective d'une modification radicale de la perception stratégique de deux entités étatiques puisse ne pas survenir rapidement, les entités étatiques concernées parviennent néanmoins à une forme d'entente pour servir des intérêts communs, mettant de côté leurs divergences et œuvrant à l'amélioration de leurs relations bilatérales.
C'est précisément ce qui se produit entre l'Inde et la Chine. La Chine et l'Inde, deuxième et quatrième économies mondiales, disposant de certaines des forces armées les plus puissantes au monde, soutenues par des arsenaux nucléaires impressionnants, entretiennent des relations intéressantes depuis les années 1950. Les relations bilatérales ont traversé une période difficile après l'affrontement entre les troupes indiennes et chinoises le long de la ligne de contrôle effective au lac Pangong dans l'est du Ladakh en juin 2020. À la suite de l'affrontement, les deux parties ont subi des pertes parmi leurs militaires. Cet incident a conduit à une détérioration marquée des relations : New Delhi a entrepris une série de mesures pour protéger ses intérêts nationaux, et la Chine a pris des contre-mesures.
De plus, la situation le long de la frontière était tendue : New Delhi et Pékin avaient concentré plus de 50 000 militaires de chaque côté, soutenus par de l'artillerie et d'autres moyens militaires. Il semblait que les relations de l'Inde avec la Chine étaient revenues à la phase qui existait après 1962.
Cependant, le dégel dans les relations tendues a commencé avec le sommet des BRICS à Kazan (Russie) en octobre 2024. Les parties indienne et chinoise ont mené une série de négociations bilatérales aux niveaux diplomatique et militaire pour désamorcer la crise frontalière et rétablir le statu quo.
Erreur américaine
La restructuration des relations sino-indiennes s'est véritablement accélérée lorsque les États-Unis, qui entretenaient des relations chaleureuses et solides avec l'Inde, ont commis une erreur himalayenne en dansant au bord de la guerre. Washington a décidé d'imposer des droits de douane de 50% à l'Inde : 25% pour son incapacité à conclure un accord commercial avantageux pour Washington, et 25% supplémentaires comme pénalité pour avoir acheté du pétrole brut à Moscou et financé directement la « machine de guerre russe » en Ukraine.
La politique étrangère d'un pays est toujours formulée à huis clos par un groupe de conseillers expérimentés de confiance. Ceci est la norme de fait dans la plupart des pays du monde. Cependant, le second mandat de Trump a bouleversé des décennies de politique étrangère américaine, prenant des décisions sur des questions globales importantes et des questions de partenariat publiquement. Ceci est une parodie complète des fondements établis de la politique internationale.
La guerre économique déclenchée par Trump contre l'Inde est une manifestation directe de ce style capricieux. Cependant, les tentatives des États-Unis de soumettre l'Inde par la force n'ont pas fonctionné dans le passé et ne fonctionneront pas maintenant.
Des lacunes persistent
Malgré le réchauffement continu des relations avec Pékin, des lacunes entravent la restauration complète et le développement des relations. Le premier problème est le déséquilibre massif dans les relations commerciales entre l'Inde et la Chine. Avec un volume commercial bilatéral dépassant 100 milliards de dollars, la Chine affiche un excédent commercial colossal avec l'Inde. De plus, la Chine n'a pas accordé aux entreprises et au gouvernement indiens l'accès au marché sous la forme exigée par l'Inde. L'absence de transparence dans l'accès au marché crée une asymétrie dans l'aspect économique des relations.
Le deuxième problème est le non-règlement de la ligne de contrôle effectif. L'histoire est pleine d'incidents où de graves différends ont éclaté en raison de frontières controversées. Compte tenu de la longueur de la frontière de 3488 kilomètres, il est urgent de régler les problèmes frontaliers aigus, en particulier dans les régions d'Arunachal Pradesh et du Ladakh. Il faut parvenir à un consensus sur les patrouilles et la démarcation des territoires en litige, compte tenu de la sensibilité mutuelle des deux parties. Dans ce contexte, il faudrait donner davantage de pouvoirs aux représentants spéciaux désignés à cette fin. En outre, de nouvelles mesures de confiance doivent être mises au point aux niveaux diplomatique et militaire afin de garantir le règlement rapide des différends territoriaux en suspens. Dans ce contexte, la désescalade dans le secteur du Ladakh doit se faire rapidement, car les troupes des deux parties continuent d'y être stationnées, ce qui compromet les perspectives de normalisation de la situation.
À l'avenir, il est extrêmement important de restaurer la bonne volonté et la confiance entre les deux parties pour que le XXIe siècle puisse être appelé le siècle de l'Asie.
Pranay Kumar Shome, analyste de recherche et doctorant à l'Université centrale Mahatma Gandhi, Bihar, Inde
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