France-Soir avec AFP
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La France condamnée, ce mercredi à revoir ses procédures d'autorisation des pesticides, jugées par la justice insuffisantes pour garantir le maintien de la biodiversité et la protection de la santé.
Dans cette affaire dite "Justice pour le vivant", l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris a été salué par les associations de défense de l'environnement qui avaient lancé la procédure. L'une d'elles, Pollinis, l'a qualifié dans un communiqué de "victoire historique" et a appelé le gouvernement à se plier à cette décision, sans saisir la plus haute juridiction administrative, le Conseil d'État.
La Cour reconnaît l'existence d'un "préjudice écologique résultant de l'usage des produits phytopharmaceutiques", notamment envers "la santé humaine", et ordonne, pour le réparer, "un réexamen des autorisations de mise sur le marché déjà délivrées", a-t-elle résumé dans un communiqué accompagnant la décision.
"Il est enjoint à l'État de mettre en œuvre une évaluation des risques présentés par les produits phytopharmaceutiques à la lumière du dernier état des connaissances scientifiques, notamment en ce qui concerne les espèces non ciblées", selon l'arrêt.
Les services de l'État français se voient reprocher d'avoir méconnu les exigences du règlement européen qui encadre la commercialisation des pesticides, édicté en 2009. Ce texte oblige les pesticides à ne pas avoir "d'effet nocif immédiat ou différé sur la santé humaine ou animale" ni "d'effets inacceptables sur les végétaux ou sur l'environnement".
L'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), chargée d'évaluer et d'autoriser la mise sur le marché des pesticides, "a commis une faute en ne procédant pas à l'évaluation des produits phytopharmaceutiques au vu du dernier état des connaissances scientifiques", souligne la cour dans son communiqué.
La cour administrative d'appel ordonne "de procéder, le cas échéant, au réexamen des autorisations de mises sur le marché déjà délivrées et pour lesquelles la méthodologie d'évaluation n'aurait pas été conforme à ces exigences, dans un délai de vingt-quatre mois".
La cour d'appel va plus loin que le tribunal administratif qui, en première instance, en juin 2023, avait "enjoint au gouvernement de prendre toutes les mesures utiles de nature à réparer le préjudice écologique".
Les associations, partiellement satisfaites, avaient alors fait appel en espérant "obliger l'État à combler les failles des méthodes d'évaluation des risques des pesticides", ce qu'elles ont obtenu ce mercredi.
Le succès en juillet d'une pétition contre la loi Duplomb, signée par plus de 2,1 millions de personnes, avait montré l'hostilité aux pesticides d'une bonne partie de l'opinion publique française.
Mais face aux alertes répétées depuis des décennies, aux mobilisations citoyennes massives, aux preuves incontestables des dangers pour la santé et la biodiversité, cette condamnation suffira-t-elle réellement à faire évoluer durablement les pratiques et à réduire la dépendance aux pesticides, ou ne restera-t-elle qu'un signal de plus, sans véritable impact sur le terrain ? Serait-elle même, au fond, un simple coup de communication destiné à calmer les écologistes et à faire gagner du temps, sans réelle volonté de transformation ?