
Par Donald Rothwell pour The Conversation, le 4 octobre 2025
Les Forces de défense israéliennes ont intercepté et pris le contrôle de la flottille de navires humanitaires cherchant à acheminer de l'aide à Gaza, et arrêté des militants, dont Greta Thunberg.
Les interceptions ont eu lieu en mer Méditerranée, à 70-80 milles marins au large des côtes de Gaza. Il s'agit d'eaux internationales où le droit international reconnaît la liberté de navigation en haute mer pour tous les navires.
Israël a répliqué en affirmant que son blocus maritime interdit l'entrée de navires étrangers à Gaza. Israël a également suggéré que la flottille serait soutenue par le Hamas, une affirmation que les organisateurs de la flottille ont réfutée.
Flottilles d'aide humanitaire à Gaza
La Global Sumud Flotilla était composée de plus de 40 bateaux transportant de l'aide humanitaire (nourriture, fournitures médicales et autres denrées essentielles), ainsi que plusieurs centaines de parlementaires, d'avocats et de militants provenant de dizaines de pays.
La flottille a quitté l'Espagne fin août et a fait route vers l'est, faisant escale en Tunisie, en Italie et en Grèce. En cours de route, les gouvernements italien et espagnol ont déployé des escortes navales pour assurer la sécurité du passage.
Les passagers des bateaux ont affirmé avoir été harcelés par des drones à plusieurs reprises au cours du voyage.
Cette campagne de flottille est la dernière édition d'un mouvement qui existe depuis plus de 15 ans pour contester le blocus de longue date imposé par Israël à la bande de Gaza.
Plus tôt cette année, un navire appelé Conscience, transportant des militants et de l'aide à destination de Gaza, a été touché par des explosions au large des côtes de Malte.
Israël a ensuite intercepté le Madleen, avec Greta Thunberg et d'autres militants à bord, en juin, puis le Handala en juillet.
Et en 2010, une flottille a tenté d'atteindre Gaza avec à son bord de l'aide humanitaire et des centaines de militants. Des commandos israéliens ont abordé le Mavi Marmara, battant pavillon turc, dans une violente confrontation qui a causé la mort de dix militants. Ces décès ont suscité une condamnation généralisée et ont tendu les relations entre Israël et la Turquie pendant des années.
La légalité du blocus naval de Gaza
Le droit international relatif aux actions des navires de la flottille et à la capacité d'intervention d'Israël est complexe.
Israël impose depuis près de 20 ans divers types de blocus à Gaza.
La base juridique de ces blocus et leur conformité avec le droit international, en particulier le droit de la mer, ont fait l'objet de controverses, comme l'a souligné une enquête de l'ONU menée à la suite de l'incident du Mavi Marmara.
Si les relations juridiques entre Israël et Gaza ont varié au cours de cette période, Israël est désormais considéré comme une puissance occupante à Gaza en vertu du droit international.
Les rôles des puissances occupantes ont été codifiés dans la quatrième Convention de Genève en 1949 et s'appuient sur les obligations juridiques assumées par les puissances alliées en Allemagne et au Japon à la fin de la Seconde Guerre mondiale. La Convention de Genève définit un cadre juridique clair pour les puissances occupantes.
Au cours des dernières décennies, Israël a été à la fois une puissance occupante de jure (reconnue par la loi) et de facto en Palestine.
En 2024, la Cour internationale de justice a statué que l'occupation des territoires palestiniens par Israël est illégale au regard du droit international.
En tant que puissance occupante, Israël contrôle tous les accès à Gaza, que ce soit par voie terrestre, aérienne ou maritime. Les camions d'aide humanitaire ne sont autorisés à entrer à Gaza que sous des contrôles stricts. Les livraisons d'aide par les forces aériennes étrangères qui ont eu lieu ces derniers mois n'ont également été autorisées que sous le contrôle strict d'Israël.
L'aide arrivée par voie maritime depuis le début de la guerre a été rare, car Israël a sévèrement restreint l'accès maritime à Gaza. Les États-Unis ont construit un quai flottant au large des côtes pour acheminer l'aide en 2024, mais celui-ci a rapidement été abandonné en raison de problèmes météorologiques, sécuritaires et techniques.
Cela montrait toutefois clairement qu'Israël était prêt à autoriser l'acheminement de l'aide maritime venant de son plus proche allié, les États-Unis. Cette exception au blocus n'a pas été appliquée aux autres acteurs humanitaires.
Interception de navires dans les eaux internationales
Si l'acheminement de l'aide par voie maritime pose actuellement des problèmes juridiques, la capacité d'Israël à perturber les flottilles est limitée. La liberté de navigation est au cœur du droit de la mer. À ce titre, la flottille a le droit de naviguer sans entrave en Méditerranée.
Tout harcèlement ou interception de la flottille dans les eaux internationales de la Méditerranée constitue donc une violation flagrante du droit international.
D'où l'importance de la position réelle de l'interception et de l'abordage des navires de la flottille par les forces israéliennes.
Israël exerce indubitablement son contrôle sur les 12 milles marins des eaux territoriales au large de la bande de Gaza. La fermeture de cette zone aux navires étrangers se justifierait en vertu du droit international, tant comme prétendue mesure de sécurité que pour garantir la sécurité des navires neutres en raison de la guerre en cours.
Les organisateurs de la flottille ont déclaré que leurs navires ont été interceptés entre 70 et 80 milles marins des côtes, bien au-delà de la mer territoriale de Gaza.
Il ne fait aucun doute que cette décision a été prise pour des raisons opérationnelles. Plus la flottille se rapprochait des côtes gazaouies, plus il allait être difficile pour les Forces de défense israéliennes d'intercepter chaque navire, augmentant ainsi le risque qu'au moins un navire atteigne les côtes.
Des dizaines de militants à bord des navires ont été arrêtés et sont placés en détention dans le port israélien d'Ashdod, et probablement rapidement expulsés.
Les militants bénéficient également de la protection du droit international des droits de l'homme, notamment de l'accès aux diplomates étrangers qui exercent la protection consulaire de leurs citoyens.
Traduit par Spirit of Free Speech
* Donald Rothwell, professeur de droit international, Australian National University