12/10/2025 reseauinternational.net  5min #293232

Suisse : la manifestation pro-Palestine qui a tenu toutes les polices en alerte

par François Meylan

BERNE - Si on retrouve, entre autres, l'empreinte d'Amnesty International, on ne sait plus vraiment par qui fut convoquée la manifestation de ce samedi 11 octobre 2025, à 15:00, à la place de la Gare de la ville de Berne, capitale helvétique. Elle a été abondamment relayée sous l'intitulé de «2 years of genocide, 100 years of resistance».

Pourtant, quelques heures avant son déroulement les autorités de la ville déconseillaient de s'y rendre. Prétextant qu'aucune autorisation n'avait été demandée. Comme une manifestation similaire, le week-end précédent, en ville de Genève, s'était mal terminée - avec des heurts entre les forces de l'ordre et les manifestants occasionnant des blessés - les autorités bernoises avaient prévenu que des renforts policiers viendraient d'autres cantons du pays. Que le dispositif policier serait particulièrement imposant et qu'il valait mieux ne pas venir manifester.

Finalement, aucun incident fâcheux n'est à déplorer si ce n'est quelques vitrines de grandes enseignes cassées et des succursales bancaires taguées. Si les premières estimations journalistiques faisaient état de 2000 manifestants, à l'heure où votre serviteur - qui était sur les lieux, comme observateur - écrit ces lignes les derniers rapports font état de 5000 manifestants.

Aussi, il est important à l'heure où le drapeau palestinien est devenu l'étendard de l'anti-colonialisme par excellence et le drapeau le plus brandi de par le monde de souligner deux constats spécifiques à la Suisse. Le premier, déjà évoqué, est une prestation sans faute de la part des forces de police : cette manifestation qui ne fit l'objet d'aucune demande à l'autorité compétente était annoncée de 15:00 à 18:00. Elle a pu se poursuivre jusqu'à plus de 20:00, à la place de la Gare. Là où elle avait débuté. Non sans s'être déployée, entre temps, sur la grande place fédérale où siège le gouvernement helvétique. Le Palais fédéral étant, pour la circonstance, hautement barricadé. Les forces de l'ordre ont toujours prévenu, à plusieurs reprises, tant en allemand qu'en français - les deux principales langues nationales, via haut-parleur et mégaphone, à temps, quand elles devaient intervenir de manière coercitive (gaz lacrymogène et balles en caoutchouc). Le plus souvent, elles ont agi de la sorte pour éviter la dégradation des biens publics et privés dans le centre-ville de Berne.

Par contre sur le plan politique et pour les jeunes et les moins jeunes qui manifestaient, pour la majeure partie, de manière pacifique, la Suisse n'est pas reluisante. C'est le moins que l'on puisse dire. Récemment, son gouvernement qui s'oppose à quelque sanction que ce soit pour stopper le génocide est allé jusqu'à refuser une minute de silence pour les victimes de Gaza. Au sein de ce gouvernement qui refuse toujours de reconnaitre l'État palestinien, selon la résolution onusienne 181 (II), brille pour sa criante incompétence reconnue de tous le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis, l'un des fossoyeurs de l'agence onusienne UNRWA qui se dédiait, entre autres, aux réfugiés palestiniens. Mais il n'y a pas que cela. La politique du gouvernement est dictée par le lobbyiste nommé «groupe parlementaire d'amitié Suisse-Israël» qui pèse près de 20% de tous les sièges sous l'hémicycle. Le but de ce groupe composé par une quarantaine d'élus de droite (PLR) et d'extrême droite (UDC) est le suivant : «Le groupe représente les positions israéliennes dans les domaines politiques, économiques, social et culturel. Entretien des relations avec la Knesset, ses membres et l'ambassade d'Israël».

On y trouve des sénateurs tels que Daniel Jositsch et Hanspeter Büchi qui relaient des discours évangélistes, sionistes et disons-le clairement suprémacistes. 1, 2

Sur le plan du commerce des armes des munitions avec l'État hébreux, la Suisse n'est pas en reste non plus. Via ses officines Armasuisse et RUAG - toutes deux récemment mises à l'index par l'inspection des finances pour mauvaise gestion et pour des cas de corruption graves - le négoce en matière d'armement avec Tel-Aviv n'a jamais cessé.

Et nous ne reviendrons par sur la sulfureuse et sanglante «Gaza Humanitarian Foundation» qui a pu s'installer à Genève, avec la complicité du département de l'Intérieur (DI) alors qu'elle ne répondait pas aux pré-requis.

Alors oui, les manifestants de Berne en faveur de la libération de Gaza étaient probablement légitimes pour exprimer sur la voie publique leur raz-le-bol de tant de compromissions et ceci sans même demander une quelconque autorisation.

  1. rts.ch, 11 septembre 2025.
  2. rts.ch, 7 octobre 2025.

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