• RapSit-USA2025 ou non ? • La survie de l'Amérique, des États-Unis est aujourd'hui une question interne à cette superpuissance que nul ne peut écarter. • Un texte d'un commentateur italien de philosophie politique, Gennaro Scala, nous permet d'enrichir la conversation en cours sur cette très-intéressante question. • Comme l'avait écrit Andrei Amalrik pour l'URSS en 1970 (« L'Union soviétique survivra-t-elle en 1984 ? »), la question de la survie des USA, jugée inévitable par Gorbatchev en 2004, est posée. • Et aussi la question de l'Europe.________________________
Parlons un peu de l'effondrement, non pas de "l'Empire" mais de l'Amérique. C'est une idée qui bat son plein aujourd'hui, pour qui saitaller farfouiller les vérité-de-situation derrière l'immense rideau trompeur, du type "Caverne-de-Platon", dont le système de la communication magouillée par l'américanisme a recouvert la situation intérieure de l'Amérique.
On y trouve des villes totalement livrées à l'insécurité, où Trump voudrait bien envoyer l'armée ; des États menacés par des sortes de famines postmodernes qui tiennent à l'interruption de chaînes de grands magasins à cause justement de cette insécurité ; une crise chronique de l'immobilier avec des expulsions envoyant des professeurs d'université vivre dans leurs voitures et dévastant la classe moyenne ; d'énormes déplacements de population à cause des conditions économiques en spirales folles autant que de l'immigration illégale ; des désordres plus ou moins idéologiques, avec les extrêmes de tous les côtés se manifestant au gré de formations illégales plus ou moins armées (les gangs sont considérés comme parties de ces ensembles, et selon le FBI il y a 110 000 membres de gangs à Chicago)...
Depuis 2015-2016, les structures de l'ordre et du droit civils sont en plein ébranlement, sinon en pleine désintégration aux USA. Pour l'instant, c'est le désordre qui répond à cette tendance mais, en arrière-plan, on retrouve des schémas hérités des troubles civils, avec des tensions centrifuges et des hypothèses de sécession ou de déstructuration de l'ensemble. La durée du phénomène fait parler d'une "guerre civile de la communication" et de " guerre civile à bas-bruit". Bref, l'idée de l'effondrement de l'Amérique n'est plus un délire de complotiste ou de scénariste à cours de blockbuster.
C'est à partir de cette idée précisément que Gennaro Scala développe son texte (original ici) en forme interrogative : « Si les États-Unis venaient à s'effondrer, nous devrons répondre à la question: qui sommes-nous ? ». Il est introduit par une citation d'Emmanuel Todd - que l'on peut sans aucun doute contester dans sa formulation événementielle :
« Si la Russie était vaincue en Ukraine, la soumission européenne aux Américains se prolongerait d'un siècle. Si, comme je le pense, les États-Unis étaient vaincus, l'OTAN se désintégrerait et l'Europe serait laissée libre. »
Ce qui nous intéresse, c'est bien plutôt "l'effondrement de l'Amérique" comme suggéré dans le titre, qui pourrait se faire bien avant l'OTAN, vieille carne pourrie qui a la peau dure. (Les derniers vestiges de 'La Société des Nations' installée à Genève ont été "fermés" dans les années 1990.) Ainsi, à partir de cette idée de l'effondrement de l'Amérique, Scala développe diverses hypothèses extrêmement pesantes sur l'existence ou pas de l'Europe, sa survie culturelle, etc.
Nous présentons son texte, et peut-être, prochainement, un texte publié comme réponse à celui-ci. Pour notre compte, nous profitons de cette présentation pour rappeler notre position qui est d'affirmer l'impossibilité où nous nous trouvons tous de développer quelque hypothèse que ce soit à cause de facteurs psychologiques et communicationnels sans précédent dans l'histoire, - ce qui fait parler effectivement de fin d'un cycle métahistorique seul capable de faire sauter
« un verrou [psychologique] d'une puissance inouïe, qui complète d'une façon tragique la "fascination de l'américanisme pour sa propre destinée catastrophique" pour former une situation totalement bloquée empêchant de chercher une autre voie tout en dégringolant vers la catastrophe. »
Ce verrou dont les événements feront qu'il sautera, est d'une telle force que le faire sauter représentera effectivement une sorte de "bombe nucléaire de notre psychologie collective". Dans un texte que nous avions écrit le 5 février 2009 (« Notes sur la fragilité extrême de l'Amérique »), nous décrivions cette "bombe nucléaire de notre psychologie collective" :
« Peut-on sauver l'Amérique? (C'est-à-dire : sauver l'Amérique en tant qu'entité prétendument nationale, - plutôt et de façon très différente, qu'"en tant que nation".)» C'est une question que nous devrions juger d'actualité; de même, c'est la principale question de notre crise générale, parce que nous tenons comme un fait avéré que notre civilisation et sa crise vivent depuis près d'un siècle sous l'empire psychologique d'une fiction virtualiste répandue et entretenue par le phénomène de la communication, qui est la "vertu américaniste", - idée traduite par les publiciste, nom US pour "propagandiste", par l'expression si populaire dans notre conscience et surtout dans notre inconscient de American Dream. Le jour où cette pression psychologique terrible cessera, en même temps que s'effaceront les USA sous leur forme actuelle, il s'agira du plus formidable événement de notre temps moderne, une sorte de "bombe nucléaire de notre psychologie collective". »
Ensuite, le 14 octobre 2009 (« Notes sur l'avenir des USA »), - également de 2009 parce que la crise boursière de 2008-2009 nous avait paru être le dernier avatar contrôlé par des réflexes pavloviens des cerveaux reptiliens de Wall Street pour sauver l'américanisme et le Système, -nous décrivions plus en détails cette force fantastique parvenue à son apex pour maintenir en vain l'artifice suprême, force fournie par la communication et d'une telle ampleur, semblable à la force hydraulique d'un barrage géant ou à l'énergie cinétique d'un missile hypersonique heurtant sa cible à Mach 12 :
« Nous l'avons déjà écrit et nous le répétons avec force : il ne peut y avoir, aujourd'hui, d'événements plus important pour la situation du monde qu'une dynamique de dislocation des USA. Nous pensons que la crise actuelle est à la fois, et contradictoirement, formidablement amplifiée et formidablement bloquée dans sa compréhension par la puissance de la communication. Ce phénomène ne cesse de dramatiser et d'attiser les conditions de la crise tout en renforçant la pression du conformisme de la pensée dominante pour ne pas mettre en cause les éléments qui sont les fondements de cette crise.» L'un des fondements est psychologique, avec le phénomène de fascination - à nouveau ce mot - pour l'attraction exercée sur les esprits par le "modèle américaniste", qui est en fait la représentation à la fois symbolique et onirique de la modernité. C'est cela qui est résumé sous l'expression populaire mais très substantivée de American Dream. Cette représentation donnée comme seule issue possible de notre civilisation (le facteur dit TINA, pour "There Is No Alternative") infecte la plupart des élites en place; elle représente un verrou d'une puissance inouïe, qui complète d'une façon tragique la "fascination de l'américanisme pour sa propre destinée catastrophique", pour former une situation totalement bloquée empêchant de chercher une autre voie tout en dégringolant vers la catastrophe. La fin de l'American Dream, qui interviendrait avec un processus de parcellisation de l'Amérique, constituerait un facteur décisif pour débloquer notre perception, à la fois des conditions de la crise, de la gravité ontologique de la crise et de la nécessité de tenter de chercher une autre voie pour la civilisation - ou, plus radicalement, une autre civilisation. »
Après cela, après cette explosion nucléaire, nous aborderions, ou nous aborderons sur une terra incognita, venus à bout du ' Kali Yuga' de la fin du cycle. Comment savoir la place qu'y occupera l'Europe ?