11/11/2025 voltairenet.org  5min #295964

La Rand appelle à « stabiliser » les relations entre les États-Unis et la Chine

par Alfredo Jalife-Rahme

Si les rodomontades du président Donald Trump arrivent à masquer aux yeux des opinions publiques l'effondrement de son pays, les experts militaires ne peuvent s'en laisser compter. La Rand Corporation a mis en garde aussi bien contre un affrontement militaire avec la Chine qu'avec la Russie, et plus encore avec les deux à la fois. Il est temps de revenir à la réalité et de stabiliser les relations entre les Grands.

The Indian Express reste attentif à un « G-2 » entre la Chine et les États-Unis [1], tandis que Trump tente de séduire cinq pays d'Asie centrale. Selon TASS, l'OTAN réduit ses troupes sur son flanc oriental, alors que Washington organise un sommet avec cinq dirigeants d'Asie centrale sous le format C5+1 (Kazakhstan, Ouzbékistan, Kirghizistan, Tadjikistan et Turkménistan+États-Unis [2]), ce qui n'empêche pas le porte-parole du Kremlin, Dimitri Peskov [3], de souligner « les relations étroites et les processus d'intégration avancés de la Russie avec ses voisins d'Asie centrale, tant au sein de l'Union économique eurasienne que de la Communauté des États indépendants ».

Trump s'intéresse aux ressources de l'Asie centrale, en particulier à ses terres rares, alors qu'il tente de s'implanter dans l'arrière-cour de la Russie et de la Chine, et que Beijing et Moscou protègent, chacun à leur manière, le Venezuela des menaces d'invasion des États-Unis. Il existe des résultats à court terme, comme l'échec du « G-2 » de Trump et Xi à Busan qui, au contraire, a encore consolidé le G-2 entre la Russie et de la Chine [4], ainsi que des projets à moyen terme élaborés par les think tanks des superpuissances, comme c'est le cas du très coté think tank RAND qui, depuis le 14 octobre dernier, était arrivé à la conclusion que les États-Unis sont incapables d'infliger une défaite stratégique décisive à la Chine, et recommande donc une autre approche politique : « Stabiliser la rivalité entre les États-Unis et la Chine », projet dont l'auteur principal est le célèbre Michael J. Mazarr [5].

La RAND fait valoir que « la rivalité géopolitique entre les États-Unis et la Chine comporte des risques de conflit militaire ouvert, de guerre économique et de subversion politique, ainsi que le danger que les tensions entre les deux principales puissances mondiales détruisent la possibilité de parvenir à un consensus mondial sur des questions telles que le climat et l'intelligence artificielle. Modérer cette rivalité apparaît comme un objectif fondamental, tant pour les États-Unis et la Chine que pour le reste du monde ».

Alors que les pressions sur Trump s'intensifient de la part des faucons néoconservateurs straussiens khazars, incrustés au sein du département d'État - qui souhaitent une victoire « définitive » contre la Chine et la Russie [6], qui se rebellent contre une éventuelle « gestion de la crise » et qui ont réussi à faire dérailler le sommet entre Trump et Poutine à Budapest, sommet qui, soit dit en passant, semble avoir été ressuscité par la visite du Premier ministre hongrois, Victor Orbán, à Washington -, la RAND préconise six « initiatives à large base » et expose des stratégies plus spécifiques pour trois domaines qui semblent jusqu'à présent irréductibles : Taïwan, la mer de Chine méridionale et la concurrence dans le domaine des sciences et des technologies, des stratégies dont je ne vois pas comment la Chine pourrait les tempérer.

Voici les six initiatives à large base :
1.- Chaque partie accepte qu'un certain degré de modus vivendi soit nécessairement faire partie de la relation.
2.- Chaque partie accepte la légitimité politique essentielle de l'autre.
3.- les parties développent un ensemble de règles, de normes, d'institutions et d'autres outils communs qui créent des conditions durables pour un modus vivendi stable pendant une période spécifique (par exemple de 3 à 5 ans).
4.- Chaque partie agit avec modération dans le développement de capacités explicitement conçues pour saper les capacités de dissuasion et de défense de l'autre de manière à constituer un risque existentiel pour son territoire.
5.- Chaque partie accepte une liste essentielle de caractéristiques d'une vision commune en matière de principes organisationnels de la politique mondiale pouvant fournir au moins une base pour un statu quo convenu ;
et 6.- Il existe des mécanismes et des institutions qui contribuent à assurer une fonction modératrice ou de retour à un équilibre stable.

Il reste à voir quel est le minimum acceptable pour la Chine qui, à son tour, a des objectifs stratégiques auxquels elle ne peut pas renoncer. D'autant moins maintenant qu'elle bénéficie de la protection nucléaire des nouvelles armes de rêve de la Russie.

 Alfredo Jalife-Rahme

Traduction
 Maria Poumier

Source
 La Jornada (Mexique)
Le plus important quotidien en langue espagnole au monde.

[1] «  How Trump's 'G-2' framing for US-China relations could impact allies », Shubhajit Roy, Indian Express, November 8, 2025.

[2] « Trump Hosts Central Asian Leaders at White House C5 Summit. Full meeting  », YouTube, November 7, 2025.

[3] «  Press review : US pulls troops out of Eastern Europe and Trump courts Central Asia », Tass, November 7, 2025.

[4] «  NO Hubo "G-2" de Trump con China : Medita el "Nuevo Orden Tripolar" con Putin y Xi. Sombra del "Khabarovsk" de Rusia », Alfredo Jalie-Rahme, Substack, 3 de noviembre de 2025.

[5] «  Stabilizing the U.S.-China Rivalry », Michael J. Mazarr, Amanda Kerrigan & Benjamin Lenain, Rand Corporation, October 14, 2025.

[6] «  No Substitute for Victory. America's Competition With China Must Be Won, Not Managed », Matt Pottinger & Mike Gallagher, Foreign Affairs, April 10, 2024

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