
Par Yoann pour le Média en 4-4-2, le 17 novembre 2025
La découverte d'AppCloud, un "bloatware" [logiciels indésirables ou cachés, installés par le fabricant ou le fournisseur sur un nouvel ordinateur, appareil ou application] développé en Israël et préinstallé en dur sur les smartphones Samsung d'entrée de gamme, suscite une inquiétude légitime sur les réseaux sociaux. Intégrée au système, l'application résisterait à toute suppression, installerait des logiciels à l'insu de l'utilisateur et collecterait des données en silence. Des preuves circulant en ligne attestent de sa présence, même désactivée, dans les paramètres. Simple outil marketing maladroit ou instrument de surveillance ? La frontière semble délibérément floue.
Un déploiement stratégique et opaque
AppCloud n'est pas une nouveauté, mais sa discrétion est remarquable. Cette application système, verrouillée sur les appareils, a pour fonction officieuse de servir de cheval de Troie à des partenaires publicitaires. Elle recommande et installe automatiquement des applications tierces, un procédé qui transforme le terminal neuf en une vitrine commerciale non sollicitée. Présente en priorité sur les séries Galaxy A et M destinées aux marchés émergents et au Moyen-Orient, elle agit comme une rente discrète pour Samsung et ses opérateurs associés.
Des racines qui attisent la défiance
La polémique prend une dimension géopolitique avec l'origine du logiciel. AppCloud est l'œuvre d'ironSource, une entreprise israélienne de monétisation rachetée par Unity. Cette filiation est un coup de tonnerre dans des régions où les produits israéliens sont officiellement bannis. Des organisations comme SMEX, groupe libanais de défense des droits numériques, ont sonné l'alarme en 2025, accusant AppCloud de siphonner adresses IP, empreintes d'appareils, localisations et données biométriques. Si des médias minimisent la portée de ces actes, le silence coupable de Samsung entretient un terreau fertile pour les pires spéculations.
L'impuissance de l'utilisateur, au cœur du scandale
Le véritable nœud du problème réside dans l'impuissance qu'impose Samsung à ses clients. AppCloud est indéboulonnable. La désactiver via les paramètres n'est qu'un leurre : une simple mise à jour logicielle peut la réactiver. Des témoignages font état d'installations automatiques de jeux ou d'outils publicitaires sans le moindre consentement. SMEX qualifie ce mécanisme de "cas alarmant de surveillance numérique", dénonçant une politique de confidentialité opaque qui renvoie vers ironSource. En septembre 2025, une lettre ouverte soutenue par des milliers d'internautes est restée sans réponse, confirmant le mépris de la firme pour les inquiétudes légitimes.
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Un simulacre de solution
Face à ce constat, les conseils pour se protéger relèvent du vœu pieux. Vérifier la présence d'AppCloud dans les paramètres et tenter de la désactiver est un geste futile, une simple trêve. La suppression définitive exige des manipulations techniques complexes - comme l'utilisation d'ADB - ou le "rooting" de l'appareil, une opération qui annule la garantie et compromet sa sécurité. Samsung place ainsi ses clients devant un choix absurde : accepter l'intrus ou saborder leur propre appareil.