19/11/2025 reseauinternational.net  11min #296713

 L'Onu adopte le Plan Trump qui bafoue les droits du peuple palestinien

«Un jour noir pour l'Onu» : la Russie et la Chine dénoncent le projet Trump pour Gaza

  • Déclaration de la Russie
  • Déclaration de la Chine
  • Réactions de la Résistance palestinienne

Explication de vote du représentant permanent de la Russie, Vassily Nebenzia, après le vote du Conseil de sécurité des Nations unies le 17 novembre sur un projet de résolution concernant le règlement du conflit au Moyen-Orient, adopté par 13 voix pour et deux abstentions.

Monsieur le président,

La Fédération de Russie s'est abstenue lors du vote sur une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies, rédigée par les États-Unis, en soutien au «plan global du président Trump pour mettre fin au conflit à Gaza». Il s'agit d'un projet que nous ne pouvions tout simplement pas soutenir.

Nous apprécions les efforts déployés par les États-Unis et d'autres médiateurs, qui ont permis de mettre fin à la phase «critique» du conflit israélo-palestinien et d'éviter une famine de grande ampleur, ainsi que d'instaurer un cessez-le-feu, d'obtenir la libération d'otages israéliens et de détenus palestiniens [la Russie reprend donc cette dichotomie honteuse entre otages et prisonniers, NdT], et de procéder à des échanges de dépouilles. Nous constatons que ces efforts sont salués tant dans la région du Moyen-Orient que dans le monde entier.

Dans le même temps, lorsqu'il s'agit d'une décision du Conseil de sécurité des Nations unies, l'organe principal chargé de maintenir la paix et la sécurité internationales, nous devons garder à l'esprit la responsabilité qui incombe à cette instance. C'est précisément pour cette raison que, dès le début des négociations sur ce document, nous avons constamment insisté pour que les membres du Conseil se voient conférer un rôle statutaire assorti des outils nécessaires de responsabilité et de contrôle.

De plus, nous sommes partis du principe que la résolution devait refléter la base juridique internationale universellement reconnue et réaffirmer les décisions et principes fondamentaux, au premier rang desquels la formule essentielle : «deux États pour deux peuples». Après tout, c'est précisément cette approche qui a été approuvée à une écrasante majorité dans la Déclaration de New York, adoptée à l'issue de deux forums en faveur de la solution à deux États.

Chers collègues,

Il ne s'agit pas d'une question théorique, mais d'une question éminemment pratique, qui demeure particulièrement pertinente à la lumière des déclarations publiques sans équivoque provenant des plus hautes sphères du pouvoir israélien, selon lesquelles la création d'un État palestinien est tout simplement inacceptable. Malheureusement, ces éléments clés n'ont pas été intégrés dans le projet américain. Celui-ci ne précise pas davantage le calendrier du transfert du contrôle de Gaza à l'Autorité palestinienne (AP), ni ne donne la moindre certitude quant au Conseil de paix et à la Force internationale de stabilisation (FIS) qui, à en juger par le texte de la résolution adoptée aujourd'hui par le Conseil, seront en mesure d'agir de manière totalement autonome, sans tenir aucun compte de la position ou de l'avis de Ramallah. Cela risque de renforcer la séparation entre la bande de Gaza et la Cisjordanie, et rappelle les pratiques coloniales ainsi que le mandat britannique sur la Palestine octroyé par la Société des Nations, à une époque où l'opinion des Palestiniens n'était absolument pas prise en considération.

Le mandat de la FIS soulève également des questions. Le plan global du président Trump ne précisait pas que la FIS serait chargée de démilitariser Gaza ni de désarmer les groupes armés locaux par tous les moyens disponibles. La résolution confère toutefois à la Force internationale de sécurité un mandat de maintien de la paix si large que la Mission pourrait, en réalité, devenir une partie au conflit, dépassant les limites du maintien de la paix. À notre connaissance, aucun des pays susceptibles de fournir des contingents n'a donné son accord en ce sens.

Par ailleurs, nous tenons à souligner que les membres du Conseil n'ont pas eu suffisamment de temps pour travailler de bonne foi ni pour parvenir à des compromis. Tordre les bras de certaines capitales ou faire pression sur les délégations ici à New York ne saurait être qualifié de travail de bonne foi.

En résumé, le document américain est, une fois encore, un achat à l'aveuglette. En substance, le Conseil donne son aval à l'initiative américaine en se fondant exclusivement sur l'honneur de Washington, tandis que nous laissons la bande de Gaza à la merci du Conseil de paix et de la Force internationale de sécurité, dont les méthodes de travail nous demeurent inconnues. L'enjeu essentiel est de veiller à ce que ce document ne devienne pas un écran de fumée pour des expérimentations débridées menées par les États-Unis et Israël dans le territoire palestinien occupé (TPO), ni qu'il ne se transforme en condamnation à mort de la solution à deux États.

La Russie a pris note de la position de Ramallah, ainsi que de celle de nombreux États arabo-musulmans qui ont soutenu le projet américain afin d'éviter une nouvelle effusion de sang dans l'enclave. À cet égard, nous avons choisi de ne pas présenter notre propre projet, qui visait à amender le concept américain afin de le mettre en conformité avec les anciennes résolutions onusiennes déjà adoptées. Mais il n'y a aucune raison de se réjouir : aujourd'hui est un jour noir pour le Conseil de sécurité. Outre les aspirations des parties concernées, il existe également une notion fondamentale : l'intégrité du Conseil de sécurité. Et aujourd'hui, avec l'adoption de cette résolution, cette intégrité et les prérogatives du Conseil ont été compromises.

Dans ce contexte, nous espérons nous tromper et pouvoir compter sur les États-Unis pour démontrer concrètement leur potentiel en matière de maintien de la paix. Ce potentiel sera évalué à l'aune de leur capacité à garantir une paix durable, dans laquelle Israël et la Palestine coexisteraient dans la paix et la sécurité au sein des frontières de 1967, Jérusalem devenant la capitale des deux États, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité et de l'Assemblée générale des Nations unies, au droit international et aux accords antérieurs qui répondent à la fois aux impératifs de sécurité d'Israël et au droit des Palestiniens à disposer de leur propre État. La mise en œuvre du plan du président Trump repose désormais entièrement sur les épaules de ses auteurs et de ses partisans, principalement parmi les huit nations arabo-musulmanes qui ont approuvé le plan.

Malheureusement, nous avons déjà connu une expérience malheureuse où des décisions imposées par les États-Unis au sujet du conflit israélo-palestinien ont produit l'exact contraire de ce qui était prévu. Ne dites pas que nous ne vous avions pas prévenus.

Je vous remercie.

source :  Mission permanente de la Fédération de Russie à l'ONU

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Explication de vote de l'ambassadeur de la République populaire de Chine, Fu Cong, sur le projet de résolution du Conseil de sécurité des Nations unies concernant les dispositions d'après-guerre à Gaza.

Monsieur le président,

Gaza, meurtrie par deux années de guerre, est une terre en ruines qui a désespérément besoin d'être reconstruite. Plus de deux millions de personnes continuent de vivre dans la détresse et de subir le déplacement. La Chine soutient le Conseil de sécurité dans la prise de toutes les mesures nécessaires pour instaurer un cessez-le-feu durable, atténuer la catastrophe humanitaire et lancer la reconstruction d'après-guerre, afin de raviver l'espoir de paix et de développement pour la population de Gaza. Malheureusement, le projet de résolution soumis au vote présente de nombreuses lacunes et suscite une profonde inquiétude.

Premièrement, le projet de résolution demeure vague et imprécis sur de nombreux éléments essentiels. Son rédacteur principal demande au Conseil d'autoriser la création d'un Conseil de paix ainsi qu'une force internationale de stabilisation, appelés à jouer un rôle clé dans la gouvernance d'après-guerre à Gaza. Il aurait dû en préciser en détail la structure, la composition, le mandat et les critères de participation, entre autres. Cela aurait dû constituer une base indispensable aux discussions sérieuses du Conseil. Or, le projet de résolution ne fournit que des informations lacunaires sur ces points cruciaux. Malgré les demandes répétées des membres du Conseil, le rédacteur principal n'a apporté aucune précision supplémentaire.

Deuxièmement, le projet de résolution ne reflète pas le principe fondamental selon lequel la Palestine doit être gouvernée par les Palestiniens. Gaza appartient au peuple palestinien, et à nul autre. Tout dispositif d'après-guerre doit respecter la volonté de ce peuple et permettre à l'Autorité nationale palestinienne de jouer pleinement son rôle essentiel. Le projet de résolution décrit des arrangements de gouvernance pour Gaza après la guerre, mais la Palestine y paraît à peine visible, et ni la souveraineté ni la prise en main palestiniennes n'y sont véritablement reflétées. Il est particulièrement préoccupant que le projet de résolution n'affirme pas explicitement un engagement ferme envers la solution à deux États, qui fait l'objet d'un consensus international.

Troisièmement, le projet de résolution ne garantit pas la participation effective de l'ONU et de son Conseil de sécurité. Il demande à ce dernier d'autoriser le Conseil de paix à assumer l'entière responsabilité des arrangements civils et sécuritaires à Gaza, sans prévoir le moindre mécanisme de contrôle ou d'examen, en dehors de rapports écrits annuels. L'ONU possède pourtant une expérience vaste et des capacités substantielles en matière de relèvement post-conflit et de reconstruction économique, et devrait donc jouer un rôle essentiel dans la gouvernance d'après-guerre à Gaza. Cependant, le projet de résolution n'inclut aucun dispositif en ce sens.

Quatrièmement, le projet de résolution n'est pas le fruit de consultations approfondies entre les membres du Conseil. Moins de deux semaines après avoir présenté le texte, le rédacteur principal a pressé le Conseil de prendre une décision cruciale concernant l'avenir et le destin de Gaza. Les membres du Conseil ont participé de manière responsable aux consultations, soulevant de nombreuses questions et suggestions constructives, dont la plupart n'ont pas été prises en compte. Alors que persistaient des préoccupations majeures et de profondes divergences entre les membres, le rédacteur principal a pourtant forcé le Conseil à se prononcer sur le projet. Nous sommes profondément déçus par une telle approche, qui manque de respect envers les membres du Conseil et nuit à l'unité de celui-ci.

Monsieur le président,

Malgré les nombreux problèmes susmentionnés et les préoccupations majeures de la Chine à l'égard du projet de résolution, compte tenu de la situation fragile et grave à Gaza, de l'impérieuse nécessité de maintenir le cessez-le-feu et des positions des pays de la région ainsi que de la Palestine, la Chine s'est abstenue lors du vote. Il convient également de souligner que nos préoccupations demeurent. Le Conseil de sécurité doit continuer de suivre de près la situation à Gaza et la question palestinienne. La question palestinienne est au cœur des problèmes du Moyen-Orient ; elle touche à l'équité et à la justice internationales. La communauté internationale doit promouvoir avec détermination la solution à deux États et rechercher un règlement politique à la question palestinienne : cela implique la création d'un État palestinien indépendant, pleinement souverain, établi sur la base des frontières de 1967 avec Jérusalem-Est pour capitale, permettant ainsi au peuple palestinien de réaliser son droit à l'État, à la survie et au retour. La Chine a toujours soutenu avec fermeté la juste cause du peuple palestinien dans la restauration de ses droits nationaux légitimes. Nous sommes prêts à travailler avec la communauté internationale pour déployer des efforts inlassables en faveur d'un règlement global, juste et durable de la question palestinienne.

Je vous remercie, Monsieur le président.

source :  Mission permanente de la Chine à l'ONU

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Voici la  réaction du Hamas :

En réponse à l'adoption par le Conseil de sécurité des Nations unies du projet de résolution américain concernant Gaza, le Mouvement de résistance islamique (Hamas) déclare que la décision du Conseil de sécurité ne répond ni aux aspirations ni aux droits politiques et humanitaires de notre peuple palestinien, en particulier dans la bande de Gaza.

Cette décision isole la bande de Gaza du reste du territoire palestinien et cherche à imposer de nouvelles réalités en rupture avec les constantes de notre peuple et ses droits nationaux légitimes.

Elle instaure un mécanisme de tutelle internationale sur la bande de Gaza, que notre peuple, nos forces et nos factions rejettent.

L'armement de la Résistance est indissociable de la présence de l'occupation, et résister à cette occupation par tous les moyens constitue un droit légitime garanti par les lois et les chartes internationales.

Toute force internationale doit être déployée à la frontière afin de séparer les forces et de surveiller le cessez-le-feu, et elle doit être placée sous la supervision des Nations unies.

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Réaction du  Jihad islamique :

Le Mouvement du Jihad islamique rejette la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU, soutenue par les États-Unis, concernant Gaza, affirmant qu'elle impose une tutelle internationale et tente de dissocier la bande de Gaza des autres territoires palestiniens.

Le Jihad islamique affirme que la résolution criminalise le droit à la Résistance, un droit garanti par le droit international, et qu'elle passe sous silence la responsabilité des criminels de guerre de l'occupation.

Le Jihad islamique avertit que toute force internationale chargée de désarmer la Résistance deviendrait un acteur complice de la mise en œuvre du programme de l'occupation.

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Réaction du  Front populaire de libération de la Palestine :

Le FPLP rejette la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU concernant Gaza. Le FPLP considère que cette décision instaure une nouvelle tutelle par le biais d'un «Conseil de paix», et souligne qu'elle conditionne le retrait de l'occupation et la fin de la guerre aux exigences posées par l'occupant lui-même.

Le FPLP insiste sur le fait que tout arrangement ignorant la volonté nationale ou conférant des pouvoirs à «Israël» est dépourvu de valeur contraignante. Il condamne également les clauses relatives au désarmement de la Résistance.

source :  Le Cri des Peuples

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