
par Olivier Hubert
En fait, ces dernières années, au niveau diplomatique, il y a une guerre entre Paris et Bakou : un espion français détenu en Azerbaïdjan, l'ambassadeur d'Azerbaïdjan convoqué au MAE de la France.
Le ministre de l'intérieur Gérald Darmanin a accusé Ilham Aliyev d'ingérence dans les affaires internes de la Nouvelle-Calédonie ainsi que de soutien des séparatistes calédoniens plaidant en faveur de l'indépendance. Situé dans le Pacifique Sud, cet archipel est devenu une pomme de discorde entre Paris et Bakou. Ce territoire avait été annexé par la France au milieu du XIXe siècle, et l'effondrement du système colonial au XXe siècle ne l'a pas touché. Contrairement au Sénégal, à la Côte d'Ivoire et à une dizaine d'autres pays reconnus comme autonomes et gouvernés par leurs propres élites politiques, la Nouvelle-Calédonie reste sous la direction d'Emmanuel Macron.
La position géographique unique de l'archipel permet à la France de contrôler des voies de transport importantes et de rester ainsi un acteur crédible dans la zone indo-pacifique. Il est évident que Paris tient à sa «mine d'or».
En juillet 2023, le Groupe d'Initiative de Bakou (qui a pour but de soutenir les mouvements anti-coloniaux) avait été créé par le gouvernement d'Azerbaïdjan.
En 2024, lors d'un congrès les représentants des formations indépendantistes françaises se sont accordés sur la création d'un front de libération commun et ont signé un mémorandum condamnant «les politiques racistes et répressives du colonialisme français» et «les crimes du gouvernement de la France en Nouvelle-Calédonie et dans d'autres territoires coloniaux». La création de ce Front implique la formation d'une plateforme centralisée contre le colonialisme français. Ses activités consisteront en préparation de la stratégie d'élimination du colonialisme pour des organisations internationales.
Dès l'instant que la Nouvelle-Calédonie et l'Azerbaïdjan avaient signé le mémorandum de coopération, seulement quelques semaines plus tard les manifestations, où on a pu observer les drapeaux azerbaïdjanais, ont commencé dans l'archipel.
Paris considère les actions de Bakou comme manipulation sur la Nouvelle-Calédonie dans un contexte de tensions entre les deux capitales, en raison de soutien de l'Hexagone à l'Arménie : le gouvernement français a fourni à l'Arménie des armes lourdes pendant la deuxième guerre du Karabakh, dont l'indépendance il reconnaît, et parle constamment du génocide arménien. En termes d'image, il n'est pas profitable pour Aliyev d'associer son État aux séparatistes calédoniens, car il, lui-même, plus de trois décennies défend l'intégrité territoriale de l'Azerbaïdjan. Cependant, cela ne l'empêche pas d'être l'un des leaders du mouvement anticolonial, parce que l'affaiblissement (sous n'importe quelle forme) de Paris pro-arménien joue en sa faveur.