28/11/2025 ssofidelis.substack.com  10min #297486

L'invité encombrant du repas de Thanksgiving, c'est le génocide de Gaza

Par  Ahmad Ibsais, le 26 novembre 2025

Pendant que vous découpez votre dinde, c'est Gaza qui est en train d'être démembrée.

Si vous vous étiez mis à assister à un enterrement par jour à partir du 1er janvier 2025, vous en auriez eu pour 3 887 ans. C'est le temps qu'il faudrait pour faire le deuil de chaque  vie perdue à Gaza. Les arrière-petits-enfants10 de vos petits-enfants ne seraient donc plus que poussière, et vous continueriez d'enterrer les corps des Palestiniens, victimes d'une "guerre" qu'Israël prétend mener pour se défendre. Et ces chiffres ne vous disent rien des milliers de méthodes employées pour brûler, disloquer, écraser et mettre ces corps en pièces.

"Paix 2025" pouvait-on lire lors des pourparlers en Égypte tandis que les représentants de la Palestine en ont été exclus. Que les morts nous expliquent comment la paix aurait pu arriver jusqu'à eux alors qu'ils n'ont pas pu assister à ces négociations ?

Inutile de préciser que cette prétendue "paix" n'a été qu'un leurre, Israël bravant le cessez-le-feu en intensifiant ses bombardements. Pourquoi le monde feint-il l'étonnement lorsqu'un régime qui commet un génocide transgresse le "cessez-le-feu" qu'il a hypocritement initié ? Israël n'a pas hésité à  mentir en invenant cette histoire des 40 bébés décapités pour justifier son génocide. Et nous sommes censés croire à son engagement en faveur de la paix ? Ceux qui ont orchestré la propagande seraient subitement vertueux du jour au lendemain ?

Le premier mois, Israël est revenu sur son propre accord à au moins  100 reprises : 200 personnes ont été tuées, la ligne rouge a été franchie, l'approvisionnement en nourriture et en carburant bloqué et tout espoir de reconstruction anéanti. En réalité, Israël continue de détruire les logement des civils à Gaza. Le 17 octobre 2025, Muhammad Al-Hallaq, 10 ans, a été  exécuté par les forces israéliennes dans la ville occupée d'Al-Khalil (Hébron). Le 19 octobre, Israël a lancé  vingt frappes aériennes sur Gaza. Et ils appellent ça "maintenir le cessez-le-feu". Comme si le sang palestinien ne pesait rien dans leurs bilans. Ne s'étaient-ils pas engagés à cesser les hostilités après la libération des otages ? Mohammed Ibrahim, un  enfant palestino-américain, est détenu arbitrairement dans une prison militaire depuis des mois, sa santé se détériore de jour en jour, mais pas un seul responsable américain ne bouge le petit doigt pour le sauver.

La méthode est toujours la même : Israël intensifie ou réduit ses attaques selon son bon vouloir, tout en maintenant une emprise totale sur Gaza et la Cisjordanie, puis qualifie chaque répit de "cessez-le-feu" magnanime. Il le transgresse aussitôt, tue les Palestiniens qui osent encore exister sur leurs propres terres, puis justifie des représailles planifiées au premier signe de résistance, qu'il s'agisse d'un jet de pierre ou d'un tir de roquette. C'est ce qui s'est produit après la  violation du cessez-le-feu en mars 2025, pendant le ramadan. Le génocide ne s'arrête jamais, il fluctue seulement entre les massacres massifs et une lente asphyxie. L' occupation et l'expansion coloniale d'Israël, qui  se poursuivent en toute impunité depuis 1967, sont bien la preuve que les coupables ne seront jamais jugés pour le chaos qu'ils ont engendré.

En 1949, soit immédiatement après l' armistice négocié par l'ONU, l'armée israélienne a transgressé les lignes de cessez-le-feu et lancé des attaques meurtrières contre des civils. En 1967, Israël a  lancé une opération militaire surprise contre l'Égypte et la Syrie, alors que l'Égypte ne constituait aucune menace crédible. En 1981-1982, le ministre de la Défense, Ariel Sharon, a violé  à plusieurs reprises le cessez-le-feu conclu par l'ONU avec l'OLP au Liban, perpétrant les massacres de Sabra et Chatila pour provoquer un incident qui justifierait son invasion planifiée de longue date. En 2001, alors que les responsables de la sécurité israéliens et palestiniens se réunissaient pour prolonger un cessez-le-feu de six semaines, Israël a  assassiné un haut responsable du Hamas. Neuf jours plus tard, un attentat-suicide a eu lieu à Jérusalem en représailles. En 2008, Israël a  violé une trêve de plusieurs mois avec le Hamas en tuant six membres du mouvement, puis, alors que le Hamas ripostait par quelques tirs de roquettes, a lancé l'opération Plomb durci, qui a tué plus de 1 400 Palestiniens, pour la plupart des civils. La stratégie est toujours la même : violer le cessez-le-feu, attendre une riposte, se poser en victime et lancer l'offensive déjà planifiée.

Il suffit de regarder la Cisjordanie, où les Palestiniens ont déposé les armes après le simulacre des  accords d'Oslo. Qu'ont-ils obtenu en échange ? Toujours plus de colonies, de checkpoints, d'enfants abattus par des snipers, d'oliveraies brûlées, de maisons détruites. Car même la soumission n'arrête pas le prédateur vorace et insatiable.

Ces deux dernières années, près de la moitié des enfants palestiniens ont été  assassinés par l'armée ou des colons en Cisjordanie occupée depuis le début d'un recensement en 2005, soit 224 enfants depuis janvier 2023 sur un total de 468. En 2024, Israël a  volé 24 25 hectares de terres palestiniennes, soit environ la moitié des terres déclarées "terres d'État" depuis la signature des accords d'Oslo, il y a plus de 30 ans. Au moins 59 nouveaux avant-postes illégaux se sont  implantés en 2024 et 215 maisons palestiniennes ont été démolies rien qu'à Jérusalem-Est. Cette année, Israël a donné son feu vert à la  plus grande forte expansion de colonies depuis la signature des accords d'Oslo, avec 22 nouvelles colonies illégales, dont certaines au cœur même de la Palestine. Le Conseil de sécurité de l'ONU, dans sa résolution 2334, a  déclaré que les colonies israéliennes n'ont

"aucune validité juridique et constituent une violation flagrante du droit international".

C'est pourquoi Israël n'épargne ni les vies, ni les moyens de subsistance, ni les usines de  traitement des eaux, les  zones cultivées, les hôpitaux, les universités. Même depuis le cessez-le-feu, Israël  contrôle les cultures de Gaza. Israël croit peut-être que les Palestiniens se contenteront de la « paix » qu'il leur propose ?

Depuis 1967, plus de 800 000 oliviers palestiniens ont été  illégalement déracinés déracinés. Pas parce que le Hamas s'y cache, mais parce que l'existence même des Palestiniens constituerait une menace. Ils ont bien retenu les leçons de l'histoire américaine : à la fin des années 1880, l'armée américaine a délibérément orchestré le  massacre de 30 à 60 millions de bisons pour contrôler les Amérindiens, les réduisant à moins de 1 000 têtes. Après le massacre des bisons, la taille moyenne des peuples autochtones a diminué de plus de 2,5 cm en une génération, la mortalité infantile a  augmenté de 16 % et les revenus sont toujours inférieurs de 25 %. Pas besoin de tuer tous les autochtones, il suffit de détruire leur moyen de subsistance. L'expérience des réserves leur a appris qu'on peut épargner les vaincus, pourvu qu'ils restent soumis.

Israël ne reculera pas tant que Gaza ne lui appartiendra pas et que la Cisjordanie n'aura pas disparu. Le ministre des Finances, Bezalel Smotrich,  confirme l'idée :

"Nous chasserons les Palestiniens en masse vers des pays tiers".

Amichai Eliyahu, le ministre du Patrimoine, a pour sa part  déclaré :

"Tout Gaza sera juif".

Ils affichent leurs intentions, tandis que le monde feint la surprise à chaque nouvelle violation, à chaque accord bafoué, à chaque enfant assassiné dont ils prétendent que c'est accidentel.

Ainsi, le "processus de paix" n'est plus qu'un morcèlement : les Palestiniens sont dépouillés de leurs terres et de leurs droits, morceau par morceau, jusqu'à ce qu'il ne leur reste plus que les réserves qu'on leur aura attribuées. Il suffit de regarder Sinjil, en Cisjordanie, désormais  clôturée, ou  Jénine et  Naplouse, assiégées depuis deux ans.

Mais comment oser parler de "paix" alors que Gaza souffre dans nos mémoires ? La paix ne peut exister pour aucun Palestinien, ni pour quiconque ouvre les yeux sur la dépravation de l'État hébreu. Voir l'enfant palestinien essuyer le sang de sa mère sur le sol, entendre les gémissements du père déposant les restes de son enfant dans un sac plastique, et voir la Palestine dépecée, déshumanisée et brutalisée par ceux qui se disent " élus de dieu" est une épreuve insoutenable. Si c'est ainsi qu'on est élu, alors je suis fier de faire partie des damnés.

Ces images résistent aux "cessez-le-feu".

L'autodétermination palestinienne ne peut se résumer à la relégation des Palestiniens dans des régimes d'oppression similaires à ceux qui détruisent les peuples autochtones du monde entier. Elle ne peut déboucher sur l'apartheid et être rebaptisée "compromis". La véritable paix exige ce qui fait le plus peur à Israël : l'égalité des droits pour TOUS, "du fleuve à la mer". Comme diraient les Américains, "d'un océan à l'autre".

Ils aimeraient que nous nous émerveillions quand les bombardements s'arrêtent, que nous soyons reconnaissants pour ces rares intermèdes entre deux tueries, que nous les remerciions de laisser entrer un peu de nourriture dans le camp de concentration qu'ils ont conçu. Mais nous savons à quoi ressemble une "paix" faite de tombes. Un génocide n'est pas synonyme de paix, car la logique qui sous-tend les meurtres de masse ne s'arrête pas aux frontières tracées par les meurtriers. Mais chaque enfant palestinien à naître est la preuve de l'échec du génocide. "Existence, résistance" dit-on, et jamais nous ne cesserons d'exister.

Traduit par  Spirit of Free Speech

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