
Par Al Mayadeen English, le 8 décembre 2025
Des agents israéliens ont intensivement surveillé le personnel américain et les délégués étrangers stationnés dans une nouvelle base américaine établie dans le sud de la Palestine occupée, ont révélé des sources informées des tensions internes concernant les enregistrements autorisés et non autorisés de conversations sensibles.
La portée de ces activités du renseignement au sein du Centre de coordination civilo-militaire (CCM) est devenu un problème majeur ces dernières semaines, poussant le commandant de la base, le lieutenant-général Patrick Frank, à convoquer son homologue israélien pour lui signifier que "les enregistrements sont interdits ici et doivent cesser", ont déclaré les sources.
Le personnel et les responsables de pays tiers en visite ont également exprimé leur inquiétude concernant la surveillance israélienne à l'intérieur du bâtiment. Plusieurs d'entre eux ont été invités à ne pas partager d'informations sensibles dans les locaux, par crainte qu'elles ne soient collectées et utilisées à mauvais escient.
Créé en octobre, le CMCC est chargé de superviser le cessez-le-feu, de coordonner l'aide humanitaire et de contribuer à la planification de l'avenir de Gaza dans le cadre du plan de paix en 20 points de Donald Trump. De grandes reproductions de ce document sont affichées dans tout le complexe.
Alors que le CMCC est chargé d'augmenter l'aide, Israël continue de la restreindre
Le personnel américain présent sur site est chargé de veiller à ce que les volumes de fournitures essentielles à destination de Gaza augmentent, un élément clé de l'accord de cessez-le-feu. Cependant, Israël a à plusieurs reprises restreint ou interrompu l'acheminement de vivres, de médicaments et d'autres denrées humanitaires, et un blocus total en début d'année a provoqué une famine dans certaines zones de l'enclave.
Lorsque le CMCC s'est mis en place, les médias américains et israéliens ont suggéré qu'Israël avait effectivement cédé le contrôle de l'entrée de l'aide à l'armée américaine. Cependant, deux mois après le cessez-le-feu, l'influence de Washington reste limitée : Israël contrôle toujours le périmètre de Gaza et décide en dernier ressort de ce qui entre ou non sur le territoire, a déclaré un responsable américain.
Parmi les membres du CMCC figurent des spécialistes américains de la logistique, habitués à répondre aux catastrophes naturelles et à établir des voies d'approvisionnement dans des environnements hostiles. Ils sont venus avec l'intention d'augmenter les flux d'aide, mais ont constaté que les restrictions imposées par Israël sur les marchandises autorisées représentaient un obstacle plus sérieux que les difficultés logistiques sur le terrain. Plusieurs dizaines de membres du personnel sont déjà partis en quelques semaines.
Les diplomates affirment toutefois que les négociations menées au sein du CMCC ont joué un rôle essentiel dans leur capacité à convaincre Israël de réviser ses listes d'articles interdits ou faisant l'objet de restrictions en tant que biens "à double usage", c'est-à-dire pouvant être réutilisés à des fins militaires. Ces articles comprenaient des produits humanitaires de première nécessité, tels que des piquets de tente et des produits chimiques nécessaires au traitement de l'eau.
Les Palestiniens toujours exclus
Le CMCC regroupe des planificateurs militaires des États-Unis, d'Israël et de plusieurs États alliés, comme le Royaume-Uni et les Émirats arabes unis. Des diplomates basés en Israël et dans les territoires palestiniens occupés, ainsi que des organisations humanitaires présentes à Gaza, ont également été conviés à participer aux discussions sur la gestion des flux d'aide discussions sur la gestion des flux d'aide et la planification de l'avenir du territoire.
Bien que le plan en 20 points de Trump reconnaisse les aspirations des Palestiniens à la création d'un État et leur promette des postes dans une administration provisoire, les Palestiniens sont totalement absents du CMCC. Aucun représentant des associations de la société civile palestinienne, des organisations humanitaires ou de l'Autorité palestinienne n'est présent sur les lieux ou invité à participer aux délibérations.
Selon des sources impliquées dans les négociations ou informées de leur contenu, les tentatives d'inclure des voix palestiniennes par le biais de visioconférences ont été à plusieurs reprises interrompues ou coupées par les responsables israéliens.
Les documents de planification militaire américains examinés par The Guardian omettent également toute référence à la "Palestine" ou aux "Palestiniens", se référant à la population uniquement sous la dénomination de "Gazaouis".
L'ironie du CMCC
Le CMCC opère depuis un bâtiment de plusieurs étages situé dans la zone industrielle de Kiryat Gat, une colonie ordinaire située à environ 20 km de la frontière de Gaza. Ce bâtiment hébergeait auparavant la Gaza Humanitarian Foundation, dont les centres de distribution alimentaire ont servi de pièges mortels pour des centaines de Palestiniens. Au sous-sol, des stocks de marchandises de marque appartenant à l'organisation aujourd'hui disparue sont toujours intacts.
À l'intérieur du centre, Israéliens et Américains occupent chacun leur étage, tandis que des bureaux supplémentaires sont attribués aux principaux pays alliés. Les locaux ressemblent à ce qu'un visiteur a décrit comme une "start-up dystopique" : un vaste hall principal sans fenêtres, recouvert de gazon artificiel et divisé en zones de réunion improvisées avec des tableaux blancs, où soldats, diplomates et responsables de l'aide humanitaire circulent d'une réunion à l'autre.
La culture du monde des affaires américain s'est imposée parallèlement à la présence militaire. Le personnel qualifie parfois les Palestiniens de Gaza de "clients", et les équipes ont recours à des acronymes pour décrire ce qui, en réalité, sont des missions de vie ou de mort.
Les "mercredis bien-être" sont consacrés au système de santé dévasté de Gaza, notamment aux hôpitaux bombardés à plusieurs reprises pendant l'agression israélienne et aux écoles fermées depuis deux ans. Les "jeudis de la soif" se focalisent sur les services publics, là où des enfants ont été tués alors qu'ils tentaient d'aller chercher de l'eau, et où l'effondrement des systèmes d'assainissement contribue à la propagation d'épidémies.
Traduit par Spirit of Free Speech