K. Selim - Le Quotidien d'Oran
On est à chaque fois surpris de constater à quel point l'administration américaine a peu d'estime pour l'intelligence des opinions arabes et singulièrement de cette jeunesse arabe en révolte contre les vassalités locales.
L'avancée purement rhétorique de Barack Obama sur un État palestinien sur les frontières de 1967 a été gommée par un discours présidentiel devant l'Aipac, le lobby israélien qui pèse lourd dans la vie politique américaine. Entre-temps, les donateurs de fonds juifs du Parti démocrate ont envoyé des signaux non équivoques au locataire de la Maison-Blanche sur le fait qu'il ne verra pas la couleur de leur monnaie. Que fait le Président américain ? Un nouvel exercice rhétorique dans lequel il promet qu'un « désaccord » de son administration avec Tel-Aviv n'aura jamais d'incidences. « Les liens entre les États-Unis et Israël sont inaltérables, et l'engagement des États-Unis envers la sécurité d'Israël est inébranlable ».
En peu de mots, le Président des États-Unis dit aux Israéliens et à l'Aipac que tout ce qu'il peut dire sur la paix, l'État palestinien et les frontières, ce n'est que du vent... destiné à donner le change à une jeunesse arabe en révolte. Benjamin Netanyahu, contrairement aux dramatisations de la presse occidentale sur les prétendues divergences entre Israël et les États-Unis, était très satisfait du discours de M. Obama. Quand le président de la plus grande puissance mondiale énonce clairement que le refus d'Israël de s'engager sérieusement pour la paix n'aura aucune incidence, pourquoi Netanyahu s'inquiéterait-il ? D'ailleurs, ceux qui ont trop mis en exergue ses propos sur les frontières de 1967 en sont pour leurs frais.
M. Obama est allé battre sa coulpe à l'Aipac en jurant qu'on avait fait des « représentations fausses » de ses propos. C'est quoi la représentation « vraie » ? Exactement, l'énoncé du sinistre George W. Bush indiquant aux Palestiniens qu'ils devraient tenir compte des « nouvelles réalités démographiques sur le terrain et des besoins des deux parties ». Pour le cas où vous êtes sous le charme de la rhétorique alambiquée de M. Obama, la représentation « vraie » de ce qu'il a dit est que l'État palestinien ne sera pas basé sur les frontières de 1967. On pourra dire que le président Barack Obama détient le record en matière de vitesse de retournement rhétorique. Les « nouvelles réalités » que les Palestiniens sont invités à prendre en compte et à accepter, ce sont les colonies de peuplement et l'épuration ethno-religieuse menée par l'État d'Israël.
On est à chaque fois surpris de constater à quel point l'administration américaine a peu d'estime pour l'intelligence des opinions arabes et singulièrement de cette jeunesse arabe en révolte contre les vassalités locales. Il est clair que M. Barack Obama ne peut occulter la réalité politique américaine et qu'il doit se faire réélire. Son problème est qu'il prétend « innover » et même apporter une touche « morale » et « démocratique » à la politique américaine. Ses contorsions sur la question palestinienne en moins de 48 heures le confondent. Les jeunes arabes en révolte ne sont pas des niais, ils savent clairement que la rhétorique d'Obama sur la Palestine est vide. Du vent.
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