01/07/2011 elcorreo.eu.org  5min #54682

Le défaut de paiement n'a pas nui à l'Argentine, selon Paul Krugman - El Correo

Tomás Lukin

Un membre dirigeant argentin d'IDEA a exprimé dans la presse étatsunienne que, pour s'être trouvée en défaut de paiement en 2001, « l'Argentine n'est pas plus considérée comme un pays sérieux ». Krugman lui a répondu avec les données de croissance du 2003 à 2010 : « Est-ce que cela n'est pas être un pays sérieux ? ».

« Je suis surpris que l'on dise que l'Argentine n'est pas un pays sérieux. Je ne vois pas comment le défaut  argentin peut être présenté, parmi tous les exemples possibles, comme un avertissement pour la Grèce », a écrit hier dans son blog du New York Times l'économiste Paul Krugman. Dans une brève intitulée  Don't cry for'Argentina   - Ne pleure pas pour l'Argentine - le lauréat Prix Nobel 2008 a remarqué la croissance soutenue du PIB argentin depuis 2003 et a mis en cause la zonzera (idiotie) nationale qui affirme que le pays est isolé du monde depuis qu'il s'était déclaré en défaut. Le post de Krugman répond aux déclarations d'un membre du conseil de direction du congloméré local des entrepreneurs IDEA, consulté dans un article de l'édition imprimée du quotidien usaméricain qui a affirmé : « L'Argentine n'est déjà plus considérée un pays sérieux ».

Au fur et à mesure que s'est approfondi, le chapitre grec de la crise structurelle dans l'Euro-zone, différents analystes, journalistes, banquiers et consultants ont recours avec des objectifs différents au défaut argentin pour recommander un conseil d'action. Dans ce débat, le New York Times a publié hier un long article intitulé « Tandis que la Grèce délibère sur le défaut, leçons depuis l'Argentine ». La note qui porte la signature d'Alexei Barrionuevo et de Charles Newbery évalue l'évolution macroéconomique et souligne les différences avec la situation grecque. Parmi les sources argentines consultées par les journalistes figure Jaime Abut, titulaire d'une société de Bourse de la ville de Rosario, en Argentine, et membre dirigeant de IDEA, qui a assuré : « se mettre en défaut de paiement n'est pas gratuit. Il faut payer les conséquences, et il faut le faire longtemps. L'Argentine n'est pas considérée comme un pays sérieux ».

Les déclarations de l'entrepreneur Abut font partie d'un discours peu nouveau pour le public local, mais Krugman est resté perplexe après avoir lu sa vision dans le quotidien. « Cela m'a surpris, cette personne qui a dit que l'Argentine n'est pas considérée déjà un pays sérieux. Un pays comme celui-ci [faisant référence au graphique avec le PIB per capita] ne devrait -il pas être considéré comme sérieux ? », se demande l'économiste, pour exprimer : « En Argentine, et partout dans le monde, être sérieux, cela fut une catastrophe ». Le texte que Krugman a publié hier est accompagné par un graphique ci-joint, illustrant l'évolution du PIB réel par tête argentin entre 1998 et 2010, où est observée la forte croissance économique après le défaut de paiement et la dévaluation.

Le post de l'économiste étatsunien qui peut être lu sur son blog «  La conscience d'un libéral  » soutient que « l'Argentine a terriblement souffert entre 1998 et 2001, tandis qu'elle a essayé d'être orthodoxe et de faire ce qui était correct. Après son défaut à la fin de 2001 elle a traversé une brève et sévère chute, mais peu de temps après a commencé une rapide récupération qui a continué durant beaucoup de temps ». Avant de recommander le défaut pour la Grèce, Krugman réfute les arguments de ceux qui recourent au cas argentin pour mésestimer une cessation de paiements comme sortie pour le pays hellénique. « L'exemple argentin suggère que le défaut est une grande idée. Les arguments contre le défaut grec doivent prendre en compte qu'il s'agit d'un pays différent. Aspect qui, pour être juste, est discutable », remarque-t-il l'économiste, qui met en cause les leaders européens de tarder à trouver une solution à la crise grecque, qu'elle soit par la sortie de l'euro ou une refonte de la dette accompagnée par une assistance depuis l'Union Européenne.

Malgré sa défense récente à l'évolution macroéconomique et le « sérieux » conséquent du pays, pendant sa dernière visite en Argentine, en octobre 2009, avant l'explosion de la crise en Europe, Krugman avait mis en question l'orientation de la politique économique pour la considérer trop « hétérodoxe ». Pendant la conférence qu'il avait donné à Buenos Aires il avait souligné, comme il l'a fait dans son post d'hier, la croissance après le défaut et la refonte de la dette. Cependant, il avait considéré que « c'est une erreur rester trop longtemps dans l'hétérodoxie et ne pas savoir lui mettre fin à celle-ci. Maintenant c'est le moment de cultiver une image de citoyen respectable, pour recommencer à être hétérodoxe quand on aura besoin de le faire », avait-t-il exprimé à ce moment en face d'un auditorium rempli d'entrepreneurs.

 Página 12. Le Buenos Aires, le 24 juin 2011

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