par rafael Poch de Feliu.
Abu Bakr al Baghdadi était un sous-produit de décennies de djihad occidental au Moyen-Orient.
La mort d'Abu Bakr al Baghdadi suit le scénario de la mort de Ben Laden, ou celui de l'attentat du 11 septembre à New York, des sujets pleins d'ombres et de questions qui font de la version officielle une question de foi : la crédibilité de l'histoire dépend du crédit que nous voulons accorder à ceux qui la racontent.
Souvenez-vous de la mort de Ben Laden dans cette maison à Abbottabad (Pakistan). Tout d'abord, il a été dit que Ben Laden était « impliqué » dans la fusillade et qu'il avait utilisé une femme comme « bouclier humain ». Ensuite, il s'est avéré que le chef d'Al-Qaïda n'était pas armé, que la femme-bouclier était une invention et qu'il n'y avait même pas d'armes dans la maison. Son cadavre a disparu dans la mer quelques heures plus tard, bien que, selon les rites islamiques....
Donald Trump explique maintenant qu'il a assisté à la liquidation de Bagdad comme un film hollywoodien excitant : « Il est mort comme un chien, comme un lâche, il a fini par pleurer et gémir, terrifié de voir les forces US venir vers lui. Les trois enfants du personnage ont été tués quand son gilet explosif a explosé », dit-on. Bien sûr, personne ne va faire de cette question une question de « droits de l'homme », mais la scène qui décrit le mieux ces crimes est celle de l'assassin qui tue un autre assassin. Dans le genre de Ben Laden, un autre qui avait été au service de son meurtrier. Dans le cas d'al Baghdadi, la lampe d'où venait son génie criminel contenait indubitablement des substances créées et découvertes par son exécuteur.
Tout cela ressemble grandement à un règlement de comptes entre gangsters, parce que la doctrine de Ben Laden et de Baghdadi, le meurtre de dizaines, de centaines et de milliers d'innocents pour atteindre un but, ne l'oublions pas, gouverne aussi et surtout la Maison-Blanche et le Pentagone. C'est le djihad de l'Occident. Leurs exécutions, massives ou individuelles, sont pratiquées au nom de l'humanité et de ses droits, invoquant quelque chose de semblable à une charia folle pleine de « dommages collatéraux ».
Abu Bakr al Baghdadi était un sous-produit de décennies de djihad occidental. Tout d'abord, il y a eu la guerre de l'Irak contre l'Iran, parrainée par le soutien occidental à Saddam Hussein contre la révolution islamique des Ayatollahs, qui avaient retiré le pétrole iranien de l'orbite des États-Unis. Un conflit qui a duré huit ans et qui a coûté la vie à plus d'un million de personnes et a marqué les deux pays. Notre personnage avait neuf ans au début et dix-sept à la fin. Trois ans plus tard, a commencé l'intervention de Bush père en Irak qui a laissé plus de 100 000 morts et une décennie de sanctions qui, selon les estimations des agences des Nations Unies ont coûté la vie à un demi-million d'enfants en Irak. En 2003, l'invasion et l'occupation de Bush-fils ont détruit non seulement un État, mais une société entière, avec un million de morts et plusieurs millions de déplacés et de réfugiés.
C'est là qu'est né ce que l'on appellera plus tard « l'État Islamique », qui est issu « d'al-Qaïda en Mésopotamie ». Al Baghdadi était un homme de peu d'études qui est passé par l'université islamique du régime de Saddam Hussein et a été emprisonné en 2004 par les envahisseurs, avec 25 000 autres Irakiens, dans des prisons comme Abu Ghraib où les troupes US ont torturé et physiquement indigné les détenus. Il a été dit que c'est dans les cellules de ces prisons sinistres sous occupation que se trouve l'acte de naissance de l'État Islamique.
Notre homme a rejoint Al-Qaïda de Mésopotamie en 2006 et lorsque son dirigeant, Abou Moussab al-Zarkaoui, a été liquidé, il a accédé au leadership en 2010, apportant d'importants amendements aux objectifs de l'organisation. Dans un Irak où les sunnites avaient perdu leur prépondérance face aux chiites et aux kurdes, où quatre des 26 millions d'habitants du pays étaient déplacés et sans abri, où le taux de chômage était de 75% et où tout l'appareil d'État du régime de Saddam - militaires, services secrets, cadres politiques - avait été expulsé du pouvoir, les conditions pour une radicalisation catastrophique étaient optimales.
Lorsque Baghdadí, après cinq ans, a été libéré du complexe pénitentiaire du Camp Bucca, le projet n'était plus de mener des attaques comme Al-Qaïda, mais de créer un califat et des structures étatiques territoriales. En 2014, l'État Islamique contrôlait 40% du territoire irakien et avait pour capitale une ville aussi peuplée que Mossoul. De ce pôle, il a attiré des militants violents du monde entier. La « révolution » syrienne, parrainée, armée et financée par l'Occident et ses amis du Golfe, a fourni une occasion en or pour l'expansion de la nouvelle organisation. Après l'Irak, la Libye et l'Afghanistan, la destruction de la Syrie et de son régime non islamiste et indépendant sur la scène internationale a été l'objectif sur lequel les Occidentaux et l'État Islamique ont coïncidé, ce qui explique l'accumulation des liens indirects entre eux. Et en toile de fond, les projets pétroliers et énergétiques.
La nouvelle de la liquidation de Baghdadi en a couvert une autre : celle de la reconduction du retrait US annoncé de la Syrie en une occupation militaire, apparemment permanente, des puits de pétrole de ce pays. Trump a annoncé à plusieurs reprises qu'il ne s'agit pas seulement de contrôler le pétrole de la Syrie, mais aussi de prendre une partie de ce pétrole pour lui-même avec l'avertissement qu'il tirera sur quiconque essaiera de l'en empêcher. La mort du chien cache un vulgaire film de pirates.
source : De nuevo la sharía de Occidente
traduit par Réseau International