Xavier Azalbert, France-Soir
Les éditos de l'été 2025 - le déni de démocratie
France-Soir, Pixabay, DR
Cette série d'éditos de l'été étant un hommage à Coluche, j'articule celui-ci autour de ce conseil, fort avisé, qu'il a donné sur scène à ceux qui voudraient se lancer en politique :
« Un bon discours politique ne doit émettre que des idées avec lesquelles tout le monde est déjà d'accord. » (à compter de 09mn51)
Conseil juste après lequel, il ajoute ceci dans ce sketch « La politique » : la définition d'un pays neutre. « Un pays neutre, c'est un pays qui ne vend pas d'armes à un pays en guerre... sauf s'il paie comptant. »
Cette phrase résonne lorsqu'on écoute le discours d'Emmanuel Macron aux armées, prononcé le 13 juillet 2025 à l'Hôtel de Brienne. Un discours qui alerte sur des menaces géopolitiques, mais qui soulève une question essentielle : où est la place des citoyens dans les grandes décisions qui engagent l'avenir de la France ?
Dans ce discours, le président Macron met en avant plusieurs défis sécuritaires. Il évoque, sans en apporter la preuve, une « menace russe aux frontières de l'Europe, du Caucase à l'Arctique », décrite comme « préparée, organisée, durable », et insiste sur le soutien à l'Ukraine via une coalition internationale basée à Paris. Il appelle également à renforcer les capacités militaires françaises à travers les Lois de Programmation Militaire et à consolider une Europe de la défense. Ce discours fait suite à celui de Thierry Burkhard, où il expliquait alors que la France serait, selon le président Poutine, l'ennemi de la Russie. Affirmation qui n'a pas pu être vérifiée malgré de nombreux spécialistes qui se sont penchés sur le sujet. Dix jours après avoir fait cette conférence de presse, Thierry Burkhard démissionnera de son rôle de Chef d'état-major des Armées.
Ces préoccupations sont compréhensibles : les tensions géopolitiques, du conflit en Ukraine aux menaces hybrides comme la désinformation, sont des réalités qui exigent une réponse. Mais qui désinforme qui ? Quand on regarde les affirmations non fondées de Burkhard et de Macron à l'égard d'un « pseudo ennemi Russe », on est en droit de se le demander.
Cependant, un point manque à l'appel : la consultation des Français sur des choix aussi cruciaux. Une autre incohérence car Macron avait, lors de ses vœux, laissé entendre qu'il pourrait faire usage du référendum en 2025.
D'ailleurs s'il était encore vivant, en commentaires au discours de Macron, Coluche aurait probablement repris à sa sauce, cette définition que Lino Ventura a dit être « formidable », et que j'estime appropriée à ce que la France est devenue depuis 2008. À savoir avec l'adoption par nos dirigeants du traité de l'Union européenne que la population avait rejeté trois ans plus tôt par référendum. Une violation manifeste du principe de la République (« Gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple. ») pleinement revendiquée, et portée à son paroxysme sous l'ère Macron.
Coluche, hélas, n'étant plus parmi nous depuis 39 ans, reprendre à sa sauce cette définition « formidable », je me suis permis de le faire à sa place. Voici ce que ça donne.
Concernant la considération que les dirigeants du pays ont pour les revendications de la population, il n'y a aucune différence matérielle entre les dictatures officielles et nos démocraties. Il y a uniquement une différence sémantique. « Dans les dictatures officielles, on vous dit « Tais-toi ! », et dans nos soi-disant démocraties, on nous dit « Cause toujours ! »
Ah ça c'est sûr ! Psychanalyste ad hoc qu'il s'est investi pour nous expliciter, avec son humour cinglant et son sens unique de la formule - absolument fabuleux -, les caractéristiques morales « propres » aux professionnels de la politique (adjectif en l'occurrence « hachement » antinomique), Coluche a résumé au mieux cela par celle-ci, de formule :
« La politique, c'est une profession où il vaut mieux avoir des relations que des remords. »
Et pareil avec celle-là, pour cette fois-ci la formation qu'ils suivent et le mode de fonctionnement qui est le leur ensuite, toute leur carrière durant :
« En politique, les études c'est très simple : cinq ans de droit, tout le reste de travers. »
Au fait.
En « 1984 », Coluche avait demandé qu'on mette en place « l'alcootest politique » qui consistait à « faire souffler les hommes politiques dans un ballon pour savoir s'ils ont le droit de conduire le pays au désastre. » (1)
Et bien, je ne sais pas vous, mais moi, la frénésie des derniers présidents de la République (notamment Nicolas Sarkozy et Emmanuel Macron) à conduire le pays au désastre total, désormais, qu'on connaît actuellement, cette frénésie me fait penser que ce serait sans doute une excellente idée d'instaurer cela : imposer aux politiciens d'aujourd'hui, un test de dépistage anti-drogue.
En plus, oui, de l'alcootest qui s'impose lui, mais alors manifestement, pour les politiciens, disons « à l'ancienne », comme par exemple François Bayrou .
Et s'opposer à ce que le peuple s'exprime par la voie d'un référendum sur des sujets de société importantissimes, tels que l'entrée en guerre, étant la quintessence absolue du déni de démocratie (puisque la guerre, c'est le peuple qui y meurt, et non pas les politiciens qui la décident), il y a lieu de considérer tant François Bayrou qu'Emmanuel Macron comme étant l'archétype du dirigeant étatique qui n'a aucune considération pour le principe de la République.
Idem pour une sortie de l'Union européenne. François Bayrou a déclaré, à cet égard, que quiconque ordonnerait un référendum sur le sujet commettrait « une faute » politique « grave. »
Il s'agit pourtant d'un sujet que l'article 11 de la Constitution définit explicitement comme étant possible pour un référendum, à savoir un « projet de loi portant sur l'organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent. »
