Pour la plupart des médias dominants, il n'y a guère de doute : le « régime syrien » est responsable du drame de Khan Cheikhoun. Et a donc mérité la punition que représente le bombardement américain de la base militaire de Shayrat.
Quand un événement peut être interprété dans le sens qui convient aux intérêts de la politique étrangère (belliciste) des puissances occidentales, les médias qui s'identifient à celle-ci - presque tous abandonnent toute prudence et se mettent à frapper les tambours de la propagande de guerre.
Qui sait que, d'après un rapport de janvier 2014 du très sérieux Massachusetts Institute of Technology (MIT), peu soupçonnable de sympathie envers Bachar el-Assad, l'attaque chimique de la Ghouta (21 août 2013) est probablement attribuable aux « rebelles » ? Combien de médias français ont rendu compte de ce rapport très technique de 23 pages et de ses enseignements ?
Quand il s'agit de sauter à des conclusions auxquelles on n'a cessé de se préparer par auto-intoxication, on se dispense de prendre le temps d'analyser soigneusement les faits, d'attendre le résultat des enquêtes, etc. ; il faut se dépêcher de condamner et d'inciter à passer à l'action pour empêcher le prochain coup de folie du « dictateur qui massacre son propre peuple ». L'ennemi a tous les torts, nous - le camp du Bien - avons toutes les vertus.
Les commentateurs et intellectuels devraient s'inquiéter d'une habitude bien installée de la propagande de guerre, un vice médiatique qui peut avoir des conséquences dramatiques : les « fast news » (informations rapides).
Il arrive toutefois que certains médias, sans doute mieux informés que les autres, invitent à la prudence : « À l'Elysée, François Hollande a sans doute réagi un peu trop vite à l'annonce d'une exposition massive des habitants de Khan Cheikhoun, le 4 avril, à des agents toxiques proches du gaz sarin, estime-t-on au sein même du ministère de la Défense. Selon des généraux en liaison avec le Centre de planification et de conduite des opérations, à ce stade, rien ne prouve que les victimes aient subi les effets d'une attaque chimique menée directement par l'aviation syrienne. Dans l'attente des résultats de l'enquête rapide réclamée au Conseil de sécurité de l'ONU, l'hypothèse russe d'un bombardement de substances toxiques entreposées par les rebelles, au sol, et qui se serait disséminé, semblerait tout aussi crédible » (Challenges.fr, 6 avril).
Depuis quelques mois il est question à tort et à travers de « fake news » (fausses informations). Les commentateurs et intellectuels devraient plutôt s'inquiéter d'une habitude bien installée de la propagande de guerre, un vice médiatique qui peut avoir des conséquences dramatiques : les « fast news » (informations rapides). Quand il est question de géopolitique et de guerre, celles-ci suivent généralement la pente naturelle des médias dominants, c'est-à-dire le soutien à la prétendue « communauté internationale », qui est en fait le bloc euro-atlantique et son bras armée sous contrôle américain, l'OTAN.