Par Clara Weiss
Lors de la conférence de presse de mardi, le porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer, a osé prétendre que le dirigeant nazi Adolf Hitler n'avait pas utilisé d'armes chimiques. Son affirmation a provoqué une vague de colère et de dégoût populaire aux États-Unis et internationalement
Spicer avait fait ce commentaire dans le cadre de la dénonciation du président syrien Bachar al Assad que le gouvernement américain accuse, sans présenter aucun élément de preuve, d'avoir perpétré la semaine dernière une attaque à l'arme chimique dans la province d'Idlib, dans le nord-ouest de la Syrie.
Spicer a déclaré : « même quelqu'un d'aussi abjecte que Hitler [..]. n'est pas tombé aussi bas que d'utiliser des armes chimiques ». Lorsqu'un journaliste lui a demandé d'expliquer ces propos manifestement absurdes, Spicer a précisé : « Il [Hitler] les a amenés [ses victimes] dans les centres d'Holocauste, je comprends cela » et que le chef nazi « n'a pas utilisé le gaz contre son propre peuple comme l'a fait Assad. »
Qu'un représentant de haut rang de la Maison Blanche puisse faire une telle déclaration, même s'agissant d'une remarque un peu désinvolte, met à nu l'extrême ignorance, l'arriération et l'atmosphère d'extrême-droite empoisonnée qui prévalent aux plus hauts échelons de l'État américain.
Hitler a largement utilisé une arme chimique, à savoir le Zyklon B, pour assassiner à grande échelle des millions de Juifs - non pas dans « les centres d'Holocauste », mais dans des camps de la mort comme Auschwitz, Treblinka, Bełżec, Chełmno, Majdanek et Sobibór.
Avant l'utilisation industrialisée du Zyklon B dans ces camps de la mort, qui a débuté au tournant des années 1941 à 42, les SS ont gazé des milliers de Juifs dans des fourgonnettes mobiles dans les territoires occupés en Union soviétique et en Pologne. Au total, entre 2,5 et 3 millions de Juifs européens - environ la moitié du nombre total de victimes du génocide des Juifs européens - ont été tués de cette façon. À ceci il faut ajouter les milliers de malades mentaux, les prisonniers de guerre soviétiques et les Sinti et Roms qui ont également été gazés au Zyklon B.
Suite au tollé public soulevé par ses remarques, la Maison Blanche s'est sentie obligée de retirer la déclaration et Sean Spicer a présenté des excuses publiques sur la chaîne CNN, en disant qu'il avait « utilisé par erreur une référence à l'Holocauste inappropriée et manquant d'égards. »
L'affaire est révélatrice à plusieurs égards. Elle souligne le caractère obscène de l'ensemble de la campagne exigeant un changement de régime en Syrie, qui est fondée sur un tissu de mensonges et sur la haine ethnique. Alors que les médias américains ont passé sous silence le siège de Mossoul soutenu par les États-Unis qui a coûté la vie à des milliers de civils, ils se sont emparés de l'attaque chimique de la semaine dernière en Syrie pour battre le rappel pour la guerre.
Pas la moindre preuve n'a été présentée quant aux auteurs de l'attaque, qui en toute probabilité a été une provocation impérialiste délibérée visant à fournir un prétexte à une escalade de l'opération de changement de régime en Syrie et à l'intensification des préparatifs de guerre contre la Russie et l'Iran.
Il convient également de noter que certains de ces mêmes soi-disant organes de presse libéraux qui ont dénoncé mardi les commentaires de Spicer ont été totalement impliqués dans cette campagne mensongère qui a abouti à leur approbation des frappes militaires illégales de Trump jeudi sur un aérodrome syrien.
Le fait que Spicer soit maintenant allé jusqu'à nier tout simplement l'aspect le plus tristement célèbre de l'Holocauste est plus qu'un simple lapsus. Il reflète l'ambiance qui règne à la Maison-Blanche et qui va d'une cruelle indifférence à une approbation plus ou moins ouverte des crimes horribles commis par le régime nazi.
En janvier, la Maison Blanche sous Trump avait publié une déclaration à l'occasion de la journée de commémoration de l'Holocauste sans évoquer les six millions de Juifs qui ont été assassinés par les nazis. La Maison Blanche est aussi restée silencieuse pendant des semaines sur une vague d'attaques antisémites perpétrées en janvier et en février, avant de diffuser une déclaration creuse sur « les préjugés et le mal ».
Dès le début, la campagne de Trump s'était essentiellement appuyée sur le soutien et l'encouragement de l'extrême droite. L'incarnation la plus connue de cette alliance est le stratège en chef de la Maison Blanche, Stephen Bannon, ancien rédacteur en chef du site d'extrême droite Breitbart News qui sert de bras médiatique aux groupes d'extrême-droite dont l'idéologie s'inspire de l'antisémitisme et du suprémacisme blanc.
Clara Weiss
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Article original en anglais, WSWS, paru le 12 avril 2017
La source originale de cet article est wsws.org