07/09/2018 les-crises.fr  21 min #145395

Comment Disinfolab n'a pas analysé le 4e groupe de son étude : « les médias + twittos Lrem »

(4) Disinfolab dans le marigot bruxellois : influence et conflits d'intérêts à tous les étages

Nous allons aujourd'hui nous intéresser à l'incroyable mélange des genres dans la galaxie DisinfoLab, et aux conflits d'intérêts qui sautent aux yeux lorsque l'on y regarde de plus près.

Sommaire :

  1.  Rappel des origines de la Galaxie DisinfoLab
  2.  Quelle est l'existence pratique réelle de DisinfoLab ?
  3.  De bien belles fées sur le berceau de Disinfo
  4.  Les Finances de DisinfoLab
  5.  Petits retweets entre amis
  6.  "Je les connais très bien"
  7.  Conflits d'intérêts à tous les étages

I. Rappel des origines de la Galaxie DisinfoLab

Pour davantage de détails, nous renvoyons les personnes les plus intéressées sur  la première partie de cette analyse, qui porte sur des points historiques et juridiques.

Nous la résumons très brièvement ainsi :

  1. "l'ONG" EU DisinfoLab n'est en fait qu'un paravent d'une nébuleuse de sociétés commerciales, dont le coeur est SAPER VEDERE, une agence de communication spécialisée sur l'accompagnement en cas de crise médiatique. Ces 2 structures ont les 3 mêmes fondateurs, dont le consultant Nicolas Vanderbiest, actionnaire à 40 % de Saper Vedere ;
  2. que les fondateurs entretiennent régulièrement une confusion entre leurs nombreuses casquettes : quand Nicolas Vanderbiest parle, est-ce le chercheur, le blogueur, le cofondateur de l'association sans but lucratif DisinfoLab, le consultant auto-entrepreneur, l'actionnaire presque majoritaire de Saper Vedere, le partenaire de Visibrain ? Mystère...

La série complète de billets sur DisinfoLab est  consultable ici.

II. Quelle est l'existence pratique réelle de DisinfoLab ?

Le visuel ci-dessus nous montre d'étroites connexions entre une société commerciale (à but lucratif) et une association à but non lucratif. En effet, non seulement les deux structures partagent les mêmes 3 fondateurs ainsi que plusieurs administrateurs/gérants, mais on remarque (ci-dessous) que 100% des membres du personnel de EU DisinfoLab sont également membres du personnel de Saper Vedere. (voir  ce billet)

Images issues des sites internet de  Saper Vedere et  DisinfoLab

Et ce même s'ils ont menti dans un premier temps :

(pro bono = ne pas être payé)

Pour finalement avouer clairement :

Ici DisinfoLab avoue donc qu'ils obtiennent une mise à disposition gracieuse de "ressources" de la part de Saper Vedere...

En passant, nous ne sommes pas des spécialistes du Droit belge, mais en France une telle mise à disposition de ressources d'une société commerciale à une association, en violation de son objet social, pourrait risquer de relever de l'abus de bien social...

Nous avons également vu dans le  deuxième billet que les comptes Twitter ont été créés bien longtemps avant les structures juridiques :

Or, c'est le 1er juin 2017 que Saper Vedere (a priori non encore légalement constituée) qui annonce la création du DisinfoLab, censé être constitué de programmeurs, chercheurs et journalistes pour "combattre la propagande du Kremlin" (sic.) explicitement :

Contrairement à toute démarche scientifique (qui interdit de chercher ce que l'on veut trouver, mais réclame de présenter tout ce que la recherche impartiale a donnée), ceci transparait encore clairement en 2018 :


Ils sont selon eux "non partisans" puisqu'ils dénoncent "toutes les désinformations", à savoir celles "de l'extrême-droite américaine, de la Russie en France, de l'extrême-droite en Italie, et de la Russie au Royaume-Uni". On apprécie l'éclectisme, sachant que pour eux :

Il est donc clair que "DisinfoLab" :

  1. n'est pas véritablement une pleine structure de recherche scientifique ;
  2. peut être bien vue plutôt comme une"unité" de Saper Vedere, comme annoncé par Gary Machado ("avec ses amis de Saper Vedere") :

III. De bien belles fées sur le berceau de Disinfo

Le premier tweet de Saper Vedere est daté du 14 septembre 2016, et traite du buzz sur Twitter autour du Discours du Président de la Commission Jean-Claude Juncker :

Mais nous allons plutôt nous arrêter sur deux intéressants tweets liés à la naissance du DisinfoLab de Saper Vedere (appelé DisinfoFabLAb dans un premier temps). Le premier est celui de A. Alaphilippe et daté du 1er juin 2017 (nous avons supprimé l'image,  source,  archive) :

On note qu'Alaphilippe a "tagué" 10 personnes, qu'il a donc mis en copie de son tweet. Il y a quelques journalistes dedans, mais surtout :

Il a dont tagué la structure de lutte de l'Union européenne contre "la désinformation russe" EUvsDisinfo ainsi que le think tank tchèque European Values (sic.) et son Directeur Jakub Janda.

Au vu de l'importance de ce dernier, nous allons consacrer le billet suivant la partie suivante à ce think tank European Values - cela sera un "décroché" dans notre analyse, mais une bonne introduction au billet qui suivra celui-i.

Alexandre Alaphilippe a aussi tagué les sites de fact-checking CrossCheck et First Draft :

Beaucoup plus intéressant est ce tweet de Saper Vedere du 16 juin 2017 consacré à l'aménagement de leurs locaux ( source,  archive) :

L'intérêt réside dans le fait qu'ils taguent 10 personnes, dont :

 Dana Manescu, la responsable Médias sociaux de la Commission européenne (passée par Sciences Po Paris) ;

Jacek Saryusz-Wolski, homme politique polonais, ancien Vice-Président du Parlement européen pour le PPE (2004-2009) parti dont il a aussi été Vice-Président. Il est toujours parlementaire européen, mais il a été exclu du groupe en 2017, car il a été présenté par le gouvernement polonais actuel (mené par le parti actuellement décrié " Droit et Justice ") contre Donald Tusk pour l'élection du Président du Conseil européen. Selon Wikipédia citant le Financial Times, il est "généralement considéré comme ayant joué un grand rôle dans la Révolution orange en Ukraine de 2004".

Siegfried Mureșan, homme politique roumain, parlementaire européen membre du PPE, Vice-Président de la Commission des Budgets et Porte-Parole du PPE ;

Et on retrouve Jakub Janda de "European Values".

 Nina Jankowicz, du Centre Wilson de L'institut Kennan (sic.) :

Basée à Washington (re-sic.), elle a donc été "conseillère du Porte Parole du Ministère des Affaires étrangères pour la communication stratégique", a "formé des diplomates ukrainiens", "Rédigé des éléments de langage et documents d'information à l'intention de hauts responsables ukrainiens" et "a servi d'ambassadeur culturel entre les États-Unis et l'Ukraine".

Mais cependant, attention à l'influence russe en Europe - nous risquerions d'être mal informés...

"Impressionnant" - en effet...

Et cerise sur le gâteau, le 10e profil tagué par Saper Vedere est tout simplement :

L'IRI, International Republican Institute, soit le bras armé du Parti Républicain américain (mais attention, même si c'est marqué dans son nom, c'est "non partisan") pour interférer dans la vie politique des pays étrangers - pardon, pour "Promouvoir la Liberté et la Démocratie dans le monde entier". Présidé durant 25 ans par John McCain, qui n'a passé la main que moins d'un mois avant son décès ( source), cet Institut a été impliqué dans de nombreuses interventions à l'étranger (la plus souvent citée est son rôle éventuel dans le  coup d'État à Haïti en 2004, voir ce reportage du New York Times,  source) :

nytimes.com

Bref :

En effet, il semble en effet clair que la "coordination" est "la clé" dans la lutte contre la "Désinformation"...

Mais on comprend mieux, après comment Saper Vedere arrive à réaliser ceci :



Alaphilippe est donc en "suivi quotidien" des relations avec "les entreprises et le secteur public (OTAN,Commission européenne)"...

IV. Les Finances de DisinfoLab

Un petit zoom, de nouveau, sur le financement de Disinfo. Le 4 avril, ils indiquaient donc que leurs seuls fonds venaient de Twitter :

On se demande d'ailleurs pourquoi Vanderbiest se plaint de devoir travailler gratuitement sur les tweets Benalla - l'argent de Twitter a-t-il déjà été dépensé ?

C'est exactement 1 mois après les élections législatives italiennes du 4 mars. Or ils ont indiqué en août qu'ils ont touché 25 000 $ de la Fondation Soros (OSF) pour les observer :

ce qu'ils ont commencé à faire dès le mois de novembre 2017 (avant même la création juridique de DisinfoLab...)

On note au passage que dans les 8 comptes tagués figure... l'Atlantic Council :

Avec "formation" des correspondants Italiens à Bruxelles (sic.) le 1er février 2018 :

Et réalisation de leurs graphes à partir des tweets sur l'élection :

On note au passage qu'ils défendent la Fondation Soros, expliquant qu'elle finance "tout ce qui est pro-démocratie, pro-liberté ou pro-droits de l'homme"(sic.) :

Concernant le tweet du 4 avril, il serait étonnant qu'ils n'aient toujours pas perçu d'argent un mois après les élections italiennes - mais pourquoi pas. 4 mois plus tard, on apprend ceci :

Twitter est donc leur SEULE source de financement- mais ils ont aussi touché de l'argent de la fondation Soros. OK...

Alors là, encore mieux, on apprend donc qu'ils vont prochainement être payés pour une autre étude par... Erasmus !

On se demande donc pourquoi de l'argent public destiné à l'échange de jeunes européens va atterrir dans la poche de cette officine douteuse, qui tient ce genre de propos :

V. Petits retweets entre amis

Illustrons à quel point la Galaxie Disinfo est enchevêtrée - par exemple en montrant quelques retweets réciproques durant ces derniers mois :

Le premier tweet de Disinfolab

Un appel du pied à Twitter...

Triplette...

Ici Saper Vedere retweete la membre de son équipe Marina Tymen :

On a d'ailleurs Saper Vedere qui retweete aussi ici le compte "Avgeeks" destiné aux passionnés de l'aviation (qui félicite Airbus) :

Compte tenu par... Marina Tymen - le monde est petit.

Publicité pour la "méthodologie de sourcing" (sic.)

Re-publicité pour la "méthodologie de sourcing unique" (sic.)

On voit d'ailleurs que les liens avec l'Atlantic Council sont anciens :

Par ailleurs :


Strike !

VI. "Je les connais très bien"

Quand la polémique autour de l'étude de Disinfo a commencé à prendre, Olivier Cimelière est venu défendre la "qualité" (sic.) du travail de Disinfo :

C'est sûr qu'il les connait très bien - c'est un membre de l'équipe Saper Vedere ( source)....

On appréciera donc le fait que Disinfo a retweeté son collaborateur le soutenant...

Autre exemple, concernant la journaliste Jennifer Baker :

Ici, elle lance un appel pour avoir des conseils sur les Fake News :

Petros Kremonas lui conseille Saper Vedere et le DisinfoLab, indiquant :

"Je suis leurs travaux depuis un moment et ils font beaucoup de choses"

Sauf que ce n'est pas simplement un "observateur", c'est le responsable communication de la structure de lobbying du 112, présidée par Gary Machado :

Bref, il conseille ainsi de contacter l'autre boite de son patron... ( source)

Bref, une chance que Saper Vedere soutienne "le journalisme éthique"...

VII. Conflits d'intérêts à tous les étages

Il est peu étonnant qu'avec un tel enchevêtrement de structures et de tels dirigeants, les conflits d'intérêts se multiplient. Survolons-en quelques-uns :

Fantastique, l'association 112 de Gary Machado a confié à la boite de com' de Gary Machado sa stratégie média sociaux !

Du coup :

Mais bon, si c'est pour que l'EU soit "safe" alors...

Espérons quand même qu'il n'y ait pas de lien entre FireSafeEu et le lobbying du 112...

Ah, Madame Tymen a hâte de se rendre à Bratislava à l'évènement organisé par le 112 (EENA2018) qui parlera de Fake News (sic.) avec les amis "Saper Vedere" et "DisinfoEU"

Bon, au moins, ils auront travaillé pour plus de sécurité en Europe et... #OhWait :

On note qu'il débattent avec Denis Teyssou, du projet  InVid :


Or Teyssou est le responsable du Medialab de l'AFP... Et c'est une vieille connaissance de l'équipe :

Saper Vedere retweete ici le membre de son équipe Martin Mycielski qui vante le produit de Teyssou :

On s'étonne moins du fait que l'AFP, le connaissant, ait aussi vite repris le tweet de Vanderbiest sur l'affaire Benalla...

Encore 2 ou 3 sponsors peut-être ?

Et pourquoi elle est restée aux abonnés absents après al découverte du crash Disinfo.

Le secrétaire d'Anticor a d'ailleurs très bien pointé ce problème à Samuel Laurent :

 les-crises.fr

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