23/10/2018 reseauinternational.net  9 min #147360

Le prince clown saoudien a contrarié les journalistes mainstream en s'en prenant à l'un des leurs

Khashoggi-gate

Par Muhammad Sâdeg Husseini

La boule de neige ne cesse de rouler et de grossir, au fur et à mesure que les heures de l’affaire du journaliste Jamal Khashoggi passent, surtout à l’approche des élections de mi-mandat aux États-Unis où elle est utilisée par les Américains à l’instar du célèbre Watergate.

Des dernières déclarations, celle du haut fonctionnaire Bob Corker, président du comité sénatorial des affaires étrangères au Congrès américain, est importante : « bin Salman est derrière l’assassinat de Khashoggi et nous ne voulons pas de lui au pouvoir »….

Ce qui signifie que les jours de bin Salman sont comptés. Il finira soit assassiné, soit destitué, soit appelé à comparaître devant un tribunal international.

Certains vont plus loin en affirmant : « il semble que le Khashoggi-gate va faire tomber autant bin Salman que Trump, et que le compte à rebours de la chute des deux totems (tyrans) peut commencer à tout moment ».

Nous n’ajouterons rien de neuf si nous disons que toutes les informations et les preuves confirment que c’est Muhammad bin Salman qui a personnellement ordonné ce crime et qu’il en a supervisé tous les détails, depuis que l’idée d’assassinat de Khashoggi a germé dans son esprit criminel malade, jusqu’au retour de son escadron de la mort à bord de deux jets privés saoudiens qui, sur son ordre personnel, ont décollé de Riyad pour y retourner, également sur son ordre.

L’élément qui peut être ajouté dans l’affaire du meurtre et du démembrement de Khashoggi, encore vivant, est que le nœud coulant commence à étrangler non seulement Muhammad bin Salman mais également le maître de la Maison Blanche qui lui assure protection et couverture politique, sécuritaire et militaire,  depuis que son étoile a commencé à briller en Arabie Saoudite après l’accession de son père au trône du Royaume des Saoud.

C’est le résident de la Maison-Blanche qui a servi de couverture politique à Muhammad bin Salman pour commettre des massacres, sans précédent dans l’histoire, au Yémen, sous le prétexte fallacieux qu’il ne fournit qu’un soutien logistique et de renseignement aux forces saoudiennes d’agression contre le Yémen.

Mais aujourd’hui, à la suite de la multiplications des révélations et des affirmations des services de renseignement américains concernant l’assassinat de Khashoggi au consulat saoudien à Istanbul le 2/10/2018, et après les informations reçues de son secrétaire d’état, un ancien directeur de la CIA, le résident de la Maison-Blanche, répondant aux questions du New York Times dans une interview au bureau ovale, a été contraint de reconnaître les éléments ci-après :

  • Sa conviction que Khashoggi a été tué.
  • Sa confiance dans les rapports de renseignement qui attestent l’existence d’un rôle saoudien à haut niveau.

C’est pourquoi, en réponse à une question sur les répercussions qui pourraient en découler, il a dû dire que les conséquences seraient très graves.

Plus important encore, et malgré les efforts inlassables de son gendre, Jared Kushner, de le persuader de ne pas lever la couverture sur Mohammed bin Salman, le président Trump se verra obligé de prendre des mesures drastiques contre bin Salman et le Royaume des Saoud en général, de peur que la situation n’empire et que certaines parties américaines ne réclament la composition d’une coalition de forces politiques, démocratiques et médiatiques aux Etats-Unis même pour exiger la formation d’un tribunal international pour juger Muhammad bin Salman pour ce crime. Cela pourrait provoquer des dommages énormes aux intérêts américains et aux relations stratégiques avec le Royaume de Saoud, selon Jared Kushner qui est parti à Riyad et rencontré bin Salman deux jours durant pour étudier avec lui les moyens de le protéger de poursuites internationales.

De retour de Riyad et d’Ankara, le secrétaire d’État américain a rejoint le chœur des défenseurs, rappelant aux journalistes la relation stratégique avec le royaume des Saoud, enracinée en 1932, et affirmant que le royaume est un allié important dans la lutte contre le terrorisme, a-t-il dit.

Mais ce qui est possible en Arabie Saoudite ne l’est pas à Washington, le président n’étant pas le seul à décider de la politique étasunienne sur une affaire internationale d’une telle ampleur et d’une telle gravité, d’autant plus que Trump lui-même a admis, dans la même interview au New York Times, le jeudi 18/10/2018, que le cas de Khashoggi constitue actuellement pour lui un défi plus grand que tous les autres sujets, du fait de l’intérêt qui lui a été accordé et qui est beaucoup plus important que prévu.

C’est ce qui a poussé Dan Coats, lors d’un entretien privé, à exprimer sa profonde inquiétude quant au fait que le président pourrait recevoir des rapports et des évaluations visant à le pousser dans une certaine direction et à influencer sa décision de maintenir des liens étroits avec l’Arabie saoudite.

En ce moment, il est certain qu’il existe différentes orientations chez les parties décisionnaires étasuniennes à propos de l’accusation de bin Salman pour le crime, ainsi que sur les mesures que les États-Unis devraient entreprendre contre eux (MBS et l’Arabie saoudite). Il est clair que la balance commence à pencher en faveur des forces américaines, officielles et officieuses, qui réclament le traitement du sujet de façon très déterminée, afin de préserver les valeurs américaines qu’elles considèrent comme la base de la sauvegarde des intérêts des Etats-Unis en Arabie Saoudite et dans le monde. Cela a été mis en évidence par l’annulation de grandes entreprises et institutions américaines, et à leur tête le secrétaire au Trésor, de leur participation à ce qu’on appelle le Davos du désert qui doit se tenir cette semaine à Riyad.

Cela signifie que la procédure de destitution de bin Salman a effectivement commencé, en sapant ce qui est appelé le projet Bin Salman 2030 qui, théoriquement, vise à développer et à diversifier l’économie saoudienne. De plus, dans le cadre de la lutte continuelle pour le pouvoir, la crise que vit la famille royale ne fait que croître et le conflit s’intensifier, à tel point que plusieurs membres de la famille exigent la destitution de MBS en tant qu’héritier du trône, afin de sauver l’Arabie Saoudite de la destruction et de l’effondrement inévitables s’il continue à contrôler le pouvoir, ce qui conduira à l’isolement de l’Arabie Saoudite qui subira des sanctions financières et économiques imposées par les États-Unis et l’Europe.

Sachant que des milieux diplomatiques du renseignement, qui suivent cette affaire de près, ont assuré que l’Arabie saoudite se doit d’accélérer ses investigations approfondies et définitives sur cette affaire, car tout retard conduira la Turquie à divulguer davantage d’informations et de faits de nature à condamner l’Arabie saoudite, de sorte que les explications saoudiennes pour une version internationalement acceptable pour ce crime seront compromises. En effet, l’Etat turc ne manquera pas de divulguer tous les détails du crime et d’assurer un suivi rigoureux des procédures judiciaires contre les parties concernées.

Et voilà que Erdogan annonce qu’il dévoilera mardi tous les détails. Le journal britannique The Guardian, dans son numéro du jeudi 18/10/2018, est quant à lui allé beaucoup plus loin, en affirmant que la répression brutale de l’opposition conduit toujours à l’accumulation du mécontentement populaire, entrainant forcément des conséquences désastreuses ; et le roi Salman est suffisamment sage pour se rappeler ce qui est arrivé au Shah d’Iran et doit partager ses souvenirs avec son chouchou de fils.

Par conséquent, les options de l’Arabie Saoudite sont limitées à deux choix uniques, quelle que soit sa version sur le scénario du crime et ses acteurs :

  • Avouer que Muhammad bin Salman a perpétré ce crime, sans précédent dans l’histoire de l’humanité, et le faire comparaître devant un tribunal international qui le condamnera comme il se doit.
  • Continuer dans la mystification, le mensonge, le déni et la tergiversation jusqu’à la chute du règne des Saoud, provoquée par des bouleversements internes majeurs qui renverseront la famille et la pousseront à l’errance en cherchant un visa pour un pays qui acceptera d’accueillir tous ses membres, comme ce fut le cas du Shah d’Iran.

C’est ce que leur a conseillé le journal britannique ci-dessus cité. Ce qui signifie faire la lumière sur les folies et les aventures criminelles de bin Salman en Syrie, en Libye et au Yémen, et les absurdités arrogantes qu’il avait lancées il y a presque un an en annonçant son intention de porter la bataille à l’intérieur de l’Iran. Voilà qu’aujourd’hui nous vivons les conséquences désastreuses des bêtises de cet « ours lâché » (الدب الداشر – surnom donné à MBS par l’opposant saoudien exilé à Londres Ghanem  al-Doussari, et signifiant « l’écervelé » – NdT), et constatons que, grâce à sa déraison, il a déplacé la bataille au cœur de la famille Saoud et nulle part ailleurs. Cela permettra d’accélérer l’émission d’un mandat d’arrêt international contre lui et de l’amener à La Haye pour qu’il comparaisse devant le Tribunal international, qui le jugera pour tout ce qu’il a commis au Yémen, en plus du meurtre de Khashoggi.

Les oppresseurs (les injustes) sauront par quel (grand) revers ils seront renversés. (Verset coranique – NdT)

Nous sommes toujours en vie, Dites Alléluia …

Article en arabe :  al-binaa.com

traduit par Rania Tahar

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