21/11/2018 reseauinternational.net  6 min #148555

La France commémore la fin de la première guerre mondiale

Trump veut son gâteau européen

Par Deena Stryker

Rien n’illustre plus ironiquement la fin du « siècle américain » que l’échec lamentable du président américain à participer pleinement aux cérémonies du centenaire de ce qui est toujours reconnu comme la guerre la plus meurtrière que le monde ait jamais connue. Le président Trump a traversé l’Atlantique pour rencontrer ses sous-fifres, mais il n’a pas pris la peine de rendre hommage aux soldats américains morts dans la « guerre pour mettre fin à toutes les guerres », parce qu’il pleuvait. Le plus absurde, c’est qu’il voudrait que l’Europe paye davantage pour l’OTAN au lieu d’avoir sa propre alliance militaire. Mais cela n’arrivera pas.

Ceux qui ont pu accéder à la télévision française en anglais – France 24 – ont vu Angela Merkel et Emmanuel Macron s’arrêter dans le wagon tapissé de lambris – comme cela se faisait autrefois en première classe – où l’armistice de la Première Guerre Mondiale avait été signé. L’Allemagne du Kaiser Guillaume et ses adversaires avaient convenu qu’aucun autre coup de feu ne devait être tiré à partir de la onzième heure du onzième jour du onzième mois : le 11 novembre 1918.  Comme le monde peut être ironique !  Bien des guerres plus tard, nous envisageons une fin nucléaire avec à peine un murmure de la part de ceux qui seront responsables du massacre final.

La confrontation à Paris entre Donald Trump et le président français Emmanuel Macron vient du fait que le président américain veut avoir son gâteau et le manger : il veut que l’Europe verse plus d’argent à l’OTAN, dont la principale raison d’être est d’essayer de faire tomber la Russie, alors que les Européens ont enfin compris que la Russie – et la Chine – sont des alliés potentiels.

Merkel l’a dit pour la première fois, il y a quelques mois : « L’Europe doit comprendre qu’elle ne peut plus dépendre des États-Unis. Elle doit être responsable de sa propre sécurité », et maintenant, Macron développe cette proposition. Après avoir sottement lancé l’accusation selon laquelle l’Europe ne payait pas assez pour sa défense contre une intention imaginaire de la Russie de l’annexer à son « empire », le président américain a rendu à l’Europe la tâche encore plus facile pour lui dire effectivement : « Merci beaucoup, mais nous n’avons pas besoin de votre soi-disant protection. »

Angela Merkel est sur le point de prendre sa retraite, mais elle soutient Macron – dans une sorte de relation mère-fils clairement visible dans les images d’elle se penchant sur son épaule, visiblement émue lors du terrible anniversaire. Était-elle en train de canaliser le fait que les dures conditions imposées à l’Allemagne pour la Première Guerre Mondiale ont finalement mené à la Seconde Guerre Mondiale qui a conduit Merkel dans la partie de son pays dirigée par l’URSS pendant sa jeunesse ? Et pourtant, le successeur de Staline a participé au mémorial, alors même qu’il est forcé de préparer la Russie à ce qui pourrait être, pour tout le monde, le dernier round……..

Quels que soient les péchés des anciens banquiers vis-à-vis des travailleurs français, Macron représente le meilleur espoir de l’Europe de devenir assez forte pour être libre de s’aligner sur son voisin russe, dans l’intérêt de tous. J’écris depuis des décennies qu’il n’est pas dans l’intérêt de l’Europe d’être liée à un pays situé de l’autre côté d’un vaste océan, d’autant plus que les « ennemis » des États-Unis se révèlent invariablement être les voisins de l’Europe, comme l’Irak ou l’Iran. Plus le président Poutine sera compétent pour se faire des amis et influencer des pays du monde entier – en commençant par la Chine, mais sans s’y limiter -, moins il est dans l’intérêt de l’Europe de soutenir les États-Unis contre tout ce que la Russie défend : la coopération pacifique et le sauvetage de la planète.

La Russie et la Chine sont en train de devenir le centre de gravité mondial, mais, ignorant à la fois l’histoire et la géographie, les dirigeants américains continuent de penser qu’elles peuvent projeter leur puissance sur deux océans alors qu’en réalité, ces océans les isolent de plus en plus du reste du monde. Rien ne l’illustre plus éloquemment que la participation du président russe au forum de Macron sur la paix dans le monde, alors que le président américain rentre chez lui dans ses clubs de golf. Alors que les élections de mi-mandat subissent des recomptages qui voient déjà se multiplier de spectaculaires victoires démocrates, l’Europe et ses alliés discutent de la possibilité d’un avenir non dirigé par la « nation indispensable », ayant enfin réalisé qu’elle constitue la menace la plus grave pour la paix dans le monde.

 Le philosophe Slavoj Zizek a récemment dans RT appelé les humains à se rendre compte que nous vivons dans un seul monde, ajoutant : « Un tel changement est-il une utopie ? Non, la véritable utopie est que nous puissions survivre sans une telle révolution. » Dernièrement, quelques organisations américaines ont décidé de faire campagne contre les armes nucléaires, via un flot de courriers électroniques demandant au public de s’y impliquer. On ne peut s’empêcher de dire que si cela avait dépendu des dons, la Bastille n’aurait jamais été prise.

Source :  journal-neo.org

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