12/12/2018 cadtm.org  5 min #149500

L'exécutif refuse de changer de cap : il ne prend pas la mesure de l'urgence sociale et écologique

Ignominie et duplicité de la novlangue macroniste

(CC - Flickr - Jeanne Menjoulet)

La macronie et ses médias aux ordres montrent depuis trois semaines toute l'étendue de leur ignominie et leur duplicité à l'occasion du mouvement des gilets jaunes. Pour démasquer ces tartuffes, voici quelques éléments de langage, accompagnés de leur signification sous-entendue et en regard la réalité qu'il s'agit de nier.

Novlangue macroniste : « les gilets jaunes ont un sentiment de malaise » 

Signification sous-entendue : c'est que du ressenti (comme les températures), en clair une fausse perception.

Réalité niée : la vraie vie avec des salaires, des pensions de misère, des logements qui sont des taudis pour beaucoup de foyers.


Novlangue macroniste : « le gouvernement et ses députés doivent faire de la pédagogie » 

Signification sous-entendue : mais que les gens sont cons (surtout les pauvres), ils ne comprennent rien à rien.

Réalité niée : le pouvoir macroniste n'a rien à dire ni à proposer, il ne veut rien entendre et n'aspire qu'à imposer sa politique.


Novlangue macroniste : « le pouvoir a fait un geste » 

Signification sous-entendue : vous ne mesurez pas tout ce que le gouvernement vient de vous donner, c'est énorme.

Réalité niée : le pouvoir ne fait que promettre (même pas donner) des miettes, en vérité son geste est un doigt d'honneur au peuple.


Novlangue macroniste : « les gilets jaunes veulent l'impossible » 

Signification sous-entendue : il est impossible d'augmenter les salaires, de revaloriser les pensions et de mettre un peu plus de démocratie dans la société avec par exemple la mise en place de la proportionnelle et du référendum populaire.

Réalité niée : beaucoup de familles n'ont plus de quoi vivre, payer leurs courses, leurs loyers, leurs factures, le pouvoir refuse de les aider ; quant à la demande démocratique, c'est un non définitif que le pouvoir apporte car il refuse de donner la parole au peuple.


Novlangue macroniste : « seulement 40 % des ménages paient l'impôt sur le revenu » 

Signification sous-entendue : mais de quoi les gens se plaignent, pourquoi veulent-ils des baisses d'impôt alors qu'ils ne le paient pas.

Réalité niée : 100 % des ménages paient des taxes injustes (le taux est le même quel que soit leur revenu), par ailleurs les grosses sociétés et les riches contribuables pratiquent à fond la fraude et l'évasion fiscale (au moins 80 milliards de pertes de recettes annuelles pour l'État).


Novlangue macroniste : « il faut augmenter les taxes sur le carburant, tout le monde doit lutter contre la pollution » (on parle ici de « cette France qui roule au diesel et fume des clopes » au cas où on n'aurait pas compris)

Signification sous-entendue : les pauvres sont coupables de polluer, ils doivent payer.

Réalité niée : ce sont les riches qui polluent le plus, en France, chaque foyer des 10 % des plus riches pollue (émission d'empreinte carbone) vingt fois plus qu'un foyer appartenant aux 50 % les plus pauvres, et ce sont les riches qui paient le moins d'impôt et de taxes en proportion de leurs revenus.


Novlangue macroniste : « est-ce que vous condamnez les violences des manifestants ? » 

Signification sous-entendue : en répondant oui à cette question fermée, votre oui sera utilisé pour vous faire dire que vous condamnez le mouvement social, toujours excessif par définition.

Réalité niée : la violence du pouvoir, pas seulement celle de Benalla ou celle infligée à la dame de Marseille âgée de quatre-vingt ans tuée par un tir de grenade lacrymogène, mais la violence sociale vécue au quotidien par beaucoup de familles dans des logements insalubres, des quartiers ou des campagnes désertés par les services publics et avec des revenus dérisoires. La violence populaire avant d'être de la violence est de la légitime défense. Pourquoi les médias ne posent-ils pas la question aux représentants du pouvoir : « Est-ce que vous condamnez la violence sociale dont vous êtes à l'origine ? »


Novlangue macroniste : « on n'a pas de représentants en face pour négocier » 

Signification sous-entendue : ces cons de gilets jaunes sont même pas foutus de trouver des représentants.

Réalité niée : le pouvoir et les médias font semblant de ne pas voir que les gilets jaunes font preuve de vigilance, ils ne veulent pas être représentés par des illuminé(e)s ou des gourous à la recherche de leur minute de célébrité. La démocratie nécessite beaucoup de temps pour se mettre en place, surtout si on ne s'en est pas servi depuis longtemps. Le pouvoir, bien installé lui, a mis trois semaines pour que ses représentants commencent à réagir, alors les gilets jaunes ont droit eux aussi à un peu de temps. Par ailleurs, tout le monde connaît l'essentiel des revendications sur lesquelles s'accordent les gilets jaunes : baisse des taxes injustes, remise à plat du système fiscal pour plus de justice (avec notamment le retour de l'ISF et la mise en place d'un impôt pour les GAFA), revalorisation des salaires, des pensions et des allocations, retour des services publics là où ils ont été supprimés, etc.


Voici, un état des lieux synthétique de la communication (la poudre de perlimpinpin) macroniste. Il y aurait bien d'autres « éléments de langage » à ajouter. On remarquera, « dans le même temps » (!), que le pouvoir et ses médias se montrent plus que discrets sur des aspects très positifs du mouvement populaire en cours : la fraternité, la solidarité, la réflexion, la formation, les échanges, la construction de cahiers revendicatifs argumentés, le souci démocratique, tout un ferment très encourageant pour l'avenir. Alors, toutes et tous ensemble, continuons le combat pour faire triompher nos revendications légitimes de justice sociale et de solidarité.

 cadtm.org

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