10 Jan 2019
Article de : Grégory Lassalle
Désolé de montrer ces images ci-bas. Je n'aime ni les regarder, ni les partager car elles font mal. Mais comment expliquer à ceux qui n'ont pas été directement témoins des violences policières qui se multiplient sur les manifestants depuis des années ce que c'est que d'avoir une mâchoire défoncée, un oeil en moins ou une joue arrachée ?
Comment leur expliquer que ce ne sont pas que "ceux qui vont au charbon" qui sont victimes de ces violences mais principalement des citoyens comme les autres et sûrement ceux qui savent le moins se protéger des exactions des forces de l'ordre.
Comment leur expliquer que l'objectif principal de cette escalade de la violence, c'est de faire peur, d'intimider et de fragiliser la contestation sociale afin que les autres manifestants décident finalement de rester chez eux.
Aussi, quand un homme fait reculer à lui-seul des CRS et que de nombreux internautes applaudissent ou sourient... ce n'est pas un signe de rejet de l'État qui pour beaucoup est le meilleur instrument pour promouvoir l'égalité sociale.
C'est simplement un rejet de la manière dont sont utilisées les forces de l'ordre, un rejet de l'impunité dont elles jouissent, une maigre revanche contre toutes les violences dont les manifestants ont été témoins.
Ce sont probablement ces motifs - l'exaspération, l'indignation - qui ont poussé le boxeur de la passerelle Léopold-Sédar-Senghor à passer à l'acte. Pourtant, le syndicat de la police nationale (SCPN) - et sans même l'avoir interrogé - le décrit d'emblée comme un "individu" qui "fait partie de ces personnes qui viennent là uniquement pour frapper des forces de l'ordre". (Le figaro 5/01).
Le présenter ainsi, en réduisant à de la pure violence les raisons pour lesquelles il a pris le pas des manifestants, ne va faire fait que renforcer le sentiment anti-flics actuel et donc continuer à nous enfermer dans un impasse.
Un sentiment anti-flics qui, contrairement à ce que l'on essaye de nous faire croire, est certainement plus la conséquence de la stratégie aveugle du ministère de l'intérieur et de l'Élysée que d'une haine de l'État ou de la république.
Une justice sévère (exemplaire...) à l'encontre de C. Dettinger, un homme appuyé par des milliers de citoyens, ne fera qu'alimenter la polarisation de la société mais n'arrivera pas, cette fois-ci, à faire peur aux gens pour qu'ils arrêtent de se mobiliser.
Source: Investig'Action