17/01/2019 reseauinternational.net  10 min #150879

Brésil : Bolsonaro entame son mandat en présence de Viktor Orban et Benjamin Netanyahou

Quand Bolsonaro et Netanyahou sont « frères » : Pourquoi le Brésil devrait-il éviter le modèle israélien ?

par Ramzy Baroud

 Le nouveau Président du Brésil, Jair Bolsonaro, promet d’être l’ennemi juré de l’environnement de son pays et des communautés indigènes et défavorisées, ainsi qu’un grand ami des dirigeants d’extrême droite du monde entier, avec des idées similaires aux leurs.

Il n’est donc pas surprenant qu’une amitié particulière s’établisse entre Bolsonaro et le premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou.

Le 1er janvier, le jour de son investiture à Brasilia, Bolsonaro a déclaré :

« Nous avons besoin de bons frères comme Netanyahu« .

« Bolsonaro est un grand allié et un frère« , a répondu Netanyahou.

Mais si Bolsonaro considère Netanyahou comme un modèle à suivre – pour des raisons qui devraient inquiéter de nombreux Brésiliens – il est clair que le pays n’a pas besoin de « frères » comme le leader israélien.

Le militantisme de Netanyahou, son oppression du peuple indigène palestinien, ses attaques à motivation raciste contre les immigrés noirs africains et ses violations constantes du droit international ne sont nullement des éléments dont un pays comme le Brésil a besoin pour mettre fin à la corruption, créer une harmonie communautaire et forger une ère d’intégration régionale et de prospérité économique.

Bien sûr, Netanyahu voulait assister à l’investiture de Bolsonaro,  qui restera probablement dans l’histoire brésilienne comme un jour tristement célèbre, où la démocratie et les droits de l’homme ont été plus menacés que jamais depuis que le Brésil a commencé sa transition démocratique au début des années 80.

Ces dernières années, le Brésil est devenu une puissance régionale qui avec conscience a défendu les droits des Palestiniens et l’intégration de « l’État de Palestine » dans la Communauté Internationale.

Frustré par le bilan du Brésil en Palestine et en Israël, Netanyahou, un politicien avisé, a vu une opportunité dans le discours populiste que Bolsonaro a défendu pendant sa campagne.

Le nouveau Président brésilien veut renverser la politique étrangère du Brésil à l’égard de la Palestine et d’Israël, tout comme il veut renverser toutes les politiques de ses prédécesseurs sur les droits autochtones, la protection des forêts et autres questions importantes.

Ce qui est vraiment inquiétant, c’est que Bolsonaro, qui a été comparé à Donald Trump – surtout à cause de sa promesse de « faire du Brésil un grand pays à nouveau » – est prêt à tenir ses promesses. En fait, quelques heures à peine après son inauguration, il a pris un décret exécutif contre les droits territoriaux des peuples autochtones du Brésil, au grand plaisir des lobbies agricoles, qui sont impatients de couper une grande partie des forêts du pays.

La confiscation des territoires des peuples autochtones, comme le prétend Bolsonaro, est quelque chose que Netanyahou, son gouvernement et ses prédécesseurs ont fait sans remords pendant de nombreuses années. Oui, il est clair que l’affirmation de sa « fraternité » a une base très solide.

Mais il y a d’autres dimensions à l’histoire d’amour entre les deux dirigeants. Beaucoup de travail a été fait pour transformer le gouvernement pro-palestinien du Brésil en un gouvernement ayant une politique étrangère similaire à celle de Trump.

Au cours de sa campagne, Bolsonaro a approché les groupes politiques conservateurs, les églises évangéliques et les militaires avec des lobbies puissants, des programmes pervers et une influence indubitable. Historiquement, ces groupes ont conditionné leur soutien politique à tout candidat avec un soutien aveugle à Israël, tant en Amérique du Sud qu’aux États-Unis et dans d’autres pays.

C’est ainsi que les États-Unis sont devenus le principal bienfaiteur d’Israël, et c’est précisément ainsi que Tel-Aviv cherche à conquérir de nouveaux territoires politiques.

Le monde occidental, en particulier, se tourne vers les démagogues d’extrême droite pour trouver des réponses simples à des problèmes complexes. Aujourd’hui, le Brésil, grâce à Bolsonaro et à ses supporters, a rejoint cette tendance inquiétante.

 Israël exploite effrontément la montée mondiale du néofascisme et du populisme. Pire encore, des tendances autrefois perçues comme antisémites sont désormais pleinement acceptées par « l’État juif », qui cherche à étendre son influence politique et son marché aux armes.

Politiquement, les partis d’extrême droite comprennent que pour qu’Israël les aide à blanchir leurs péchés passés et présents, ils devront se soumettre complètement au programme d’Israël au Moyen-Orient. Et c’est précisément ce qui se passe : de Washington à Rome, à Budapest, à Vienne… Et, maintenant, à Brasilia.

Mais une autre raison, peut-être plus convaincante, est l’argent. Israël a beaucoup à offrir grâce à sa technologie de « sécurité » et de guerre, une gamme de produits massive qui a été utilisée  avec des conséquences mortelles contre les Palestiniens.

L’industrie du contrôle frontalier est en plein essor aux États-Unis et en Europe. Dans les deux cas, Israël s’impose comme un modèle et un fournisseur de technologie. Et maintenant, la technologie israélienne de « sécurité », grâce à la nouvelle sympathie pour les prétendus problèmes de sécurité d’Israël, envahit également les frontières de l’Europe.

Selon l’agence israélienne Ynetnews, Israël est le septième exportateur d’armes au monde et s’impose comme un leader mondial dans l’exportation de drones aériens.

L’enthousiasme de l’Europe pour la technologie israélienne des drones est dû à une peur non fondée à l’égard des immigrants et des réfugiés. Dans le cas du Brésil, la technologie israélienne des drones sera utilisée pour lutter contre les bandes criminelles et d’autres problèmes internes.

Il faut mentionner que le gouvernement brésilien a acheté et utilisé des drones israéliens fabriqués par Elbit Systems juste avant la Coupe du Monde de la FIFA en 2014.

La chose la plus inquiétante au sujet des futurs accords entre ces deux pays est l’affinité soudaine entre les politiciens d’extrême droite des deux pays. Comme prévu, Bolsonaro et Netanayhu ont longuement parlé des drones lors de la visite de ce dernier au Brésil.

Israël a eu recours à une violence extrême pour contrer les exigences des Palestiniens en matière de droits de l’homme, y compris le recours à la force meurtrière lors de manifestations pacifiques au niveau de la barrière séparant Gaza assiégée d’Israël. Si Bolsonaro pense qu’il réussira à éliminer la criminalité locale en recourant à la violence effrénée – plutôt que de s’attaquer aux inégalités sociales et économiques et à la répartition injuste de la richesse dans son pays – il ne peut qu’espérer exaspérer un bilan déjà terrible en victimes.

L’obsession d’Israël pour la sécurité ne doit pas se dupliquer ni au Brésil ni ailleurs, et les Brésiliens, dont beaucoup sont à juste titre préoccupés par l’état de la démocratie dans leur pays, ne doivent pas succomber à la mentalité militaire israélienne, qui a obtenu non pas la paix mais beaucoup de violence.

 Israël exporte des guerres vers ses voisins et des technologies de guerre vers le reste du monde. Étant donné que de nombreux pays sont mêlés à des conflits, souvent dus à d’énormes inégalités, Israël ne doit pas être considéré comme l’exemple à suivre, mais plutôt comme l’exemple à éviter.

Source :  Cuando Bolsonaro y Netanyahu son “hermanos”: Por qué Brasil debería rehuir el modelo israelí

traduit par Pascal, revu par Martha pour  Réseau International

 reseauinternational.net

 Commenter