On a beau être habitué, désormais depuis des décennies, à la conduite honteuse et scandaleuse de ce que nous nommons la presseSystème par rapport aux activités inhumaines et illégales de leurs autorités officielles, et du Système par conséquent, le rôle de cette presseSystème dans le sort qui est imposé à Julian Assange s'impose comme un cas d'école dans l'exercice de l'infamie et l'inversion totale des valeurs qu'elle prétend défendre. Désormais, comme les journalistes à la plume facile observent avec gravité pour d'autres occasions, on ne pourra plus dire qu'"on ne savait pas".
Le travail accompli par le juriste suisse Nils Melzer, sans doute le meilleur spécialiste de la recherche et de la dénonciation de la torture, et rapporteur de l'Onu sur les pratiques de torture, est à cet égard une occasion exceptionnelle de mettre en lumière, non seulement le détail des pratiques et des tortures exercées contre Assange depuis des années, mais également "l'infamie et l'inversion totale des valeurs que prétend défendre" la presseSystème dans son travail d'information à cet égard... Si bien qu'après tout, oui, on pourra dire qu'"on ne savait pas", - pour ceux qui assurent leur propre information de citoyen des démocraties vertueuses en s'en remettant complètement à cette presseSystème, sans le moindre esprit critique ni le plus petit usage de leur libre-arbitre. A cet égard, les "lecteurs sérieux" de la presseSystème, les citoyens informés de nos démocraties, nos élites en général, etc., entretiennent et développent leur "culture intellectuelle" sur le modèle fameux de La Boétie, dit de La servitude volontaire.
Melzer a écrit un texte, un article d'opinion, en plus de son rapport officiel, pour donner son appréciation personnelle, en tant que citoyen autant que de juriste attaché aux valeurs que prétend défendre la presseSystème. Il a voulu donner son appréciation personnelle, comme sa fonction, son statut et sa mission lui en donnaient le droit sinon lui en faisaient devoir. Les grands journaux de référence, qui publient tant d'infamies et de niaiseries issues des cerveaux reptiliens des zombieSystème qui nous gouvernent, auraient dû accueillir avec reconnaissance ce travail d'un si éminent spécialiste chargé des meilleures références du monde. Faire cette hypothèse dans les années de plomb que nous vivons, c'est se croire en Utopie... Ils ont donc tous refusé la tribune de Melzer sous des motifs héroïques du type "ce n'est pas d'actualité", "ce n'est pas notre priorité", quelle heure est-il s'il vous plaît", et ainsi de suite ; la façon dont Melzer a été reçue unanimement, telle qu'il la rapporte, laisse effectivement sans voix et dépasse la réserve générale de qualificatifs dont on dispose pour mesurer cette sorte d'incident.
Melzer s'est donc replié sur un site, Medium, pour publier son article njmelzer/demasking-the-torture-of-julian-assange-b252ffdcb768_0_158617');"> njmelzer/demasking-the-torture-of-julian-assange-b252ffdcb768">le 26 juin, et il a fallu une interview de RT.com le 29 juin pour lui assurer une certaine diffusion dans le domaine de la communication de grand public. Certains diront alors, pourquoi pas après tout, que Melzer est, comme Assange, un "agent de Moscou". L'interview de RT.com est en effet intéressante en ce sens qu'elle nous donne quelques détails sur le processus de refus de publier de toutes les feuilles "de référence" auxquelles s'est adressé Melzer ; cela relève effectivement de la pure agression contre le Système et doit contribuer à rendre encore plus suspect le juriste Melzer... D'autant que ces divers éléments se trouvent relayés dans un texte de WSWS.org repris ci-dessous (et par dedefensa.org, qui plus est).
Une chose doit arrêter l'attention dans cet événement : l'extraordinaire unanimité de refus autant que l'absence totale bien entendu de justification plausible de ce refus. WSWS.org écrit ceci à ce propos : « La déclaration faite à Melzer qu'Assange ne fait plus partie des "priorités" dans "la programmation des nouvelles" pourrait témoigner d'un veto d'autocensure officiel visant à faciliter les plans américains pour le faire taire à jamais en érigeant un mur de silence sur son sort. Ou peut-être que John Pilger avait raison quand il s'est adressé à un rassemblement de juin 2018 réclamant la liberté d'Assange appelé par le Parti de l'égalité socialiste: "L'ironie est que personne n'a dit à ces journalistes ce qu'ils devaient faire. Je les appelle les journalistes de Vichy, - d'après le gouvernement de Vichy qui a servi et assuré l'occupation allemande de la France". »
WSWS.org fait précéder cette appréciation de détails concernant la mise sur pied d'un comité de journalistes sous les auspices bienveillantes du ministère britannique de la défense, pour déterminer les nouvelles qui doivent faire l'objet de censure (D-Notices),de la part de la presseSystème. Cet exemple pourrait alimenter la version selon laquelle il y a une instruction de censure contre tout ce qui concerne Assange désormais. Pourtant l'explication de Pilger sur les journalistes-collabos est plus intéressante, quoique l'analogie soit un peu forcée en raison de la différence de circonstances, notamment de l'état de guerre ouverte, y compris en France même avec l'existence de la résistance, et donc l'instauration de facto d'un état de siège permanent qui faisaient des journalistes militants-collaborateurs de véritables combattants au côté des nazis.
Il nous paraît évident que nombre sinon la plupart des journalistes qui professent dans la presseSystème ne se perçoivent pas eux-mêmes comme des "collabos" en état de guerre ouverte, ni comme de véritables "militants" qui impliquent un parti-pris, mais comme des journalistes attachés à la poursuite de la description de la réalité selon leurs valeurs morales qu'ils jugent entièrement rencontrées. Nous avons déjà tenté de définir cette attitude qui relève d'une pathologie de la psychologie, sous l'expression de " déterminisme-narrativiste", prenant son essor dans son développement le plus complet à partir de la crise ukrainienne où a été effectuée au niveau de la communication la mise en place complète de simulacres décrivant des narrative sans plus aucun rapport avec la réalité. Le développement de cette pathologie de la psychologie conduit à une crise catastrophique de l'esprit qui affecte tous les pays (bloc-BAO) promoteurs de l'actuelle contre-civilisation en place.
Le sort d'Assange, pourtant célébré en 2010-2012 par ces mêmes journaux qui l'ignorent aujourd'hui, s'inscrit pour nous dans ce courant de simulacre d'une puissance inouïe. Il est évident que la seule façon de "protéger" cette réalité de simulacre, c'est de ne plus éditer ni dans la mesure du possible laisser éditer quoi que ce soit qui puisse aider un individu qui est passé "de l'autre côté du miroir" dans la perception des zombieSystème, et qui est désormais un ennemi diabolique de la réalité-simulacre.
Nous faisons l'hypothèse que cette même attitude psychologique se retrouve du côté des autorités et des élites qui pourraient être prises par les organisatrices de cette attitude unanime de la presseSystème. Nous croyons voir là une manifestation de ces puissants courants de communication qui représentent pour nous la pression de la surpuissance du Système et de sa propre influence échappant au contrôle humain, donc hors de toute nécessité de direction et d'organisation humaines. Effectivement, dans sa crudité et sa brutalité le terme zombieSystème a toute sa raison d'être, et il vaut aussi bien pour les autorités les plus puissantes et les forces les plus influentes.
Ci-dessous, le texte de Chris Marsden, de WSWS.orgdu 2 juillet 2019. Le titre complet du texte, qui est la version française du texte original en anglais du 1erjuillet 2019, est « Le rapporteur de l'ONU sur la torture, Nils Melzer, démasque la propagande et la censure dans les reportages sur Assange ».
dedefensa.org
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Melzer dénonce la censure du calvaire d'Assange
Lorsque le rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, Nils Melzer, a publié le 31 mai une déclaration exigeant la fin immédiate de la « persécution collective » de Julian Assange, elle a fait les gros titres dans le monde entier.
Assange, a écrit Melzer, « a été délibérément exposé, pendant plusieurs années, à des formes progressivement sévères de peines ou traitements cruels, inhumains ou humiliants, dont les effets cumulatifs ne peuvent être qualifiés que de torture psychologique ».
« En vingt ans de travail auprès des victimes de guerre, de violence et de persécution politique, je n'ai jamais vu un tel exemple d'un groupe d'États démocratiques se rassemblant pour isoler, diaboliser et maltraiter délibérément un seul individu au cours d'une si longue période de temps et avec si peu de respect pour la dignité humaine et la primauté du droit », a-t-il ajouté.
Dans la perspective de la Journée internationale pour le soutien aux victimes de la torture, mercredi dernier, Melzer a écrit une tribune libre intitulée « Démasquer la torture de Julian Assange ». Il a présenté cet article percutant à des publications de premier plan, notamment The Guardian, The Times,The Financial Times, The Sydney Morning Herald, The Australian, The Canberra Times, The Telegraph, The New York Times, The Washington Post, la Fondation Thomson Reuters et Newsweek.
Tous ont refusé de la publier, laissant Melzer, l'un des plus éminents experts juridiques en matière de torture, la seule option de publier son article sur la plate-forme de blogging en ligne Medium.
Melzer a déclaré à RT que les rédacteurs de journaux lui avaient proposé diverses raisons pour le refus de publier sa tribune libre. «Certains d'entre eux ont dit que cela ne figurait pas parmi leurs priorités concernant les actualités, d'autres ont déclaré que cela ne faisait pas partie de leurs centres d'intérêts», a-t-il déclaré.
Rejetant avec mépris leurs excuses, Melzer a noté que les mêmes responsables de médias avaient publié avec plaisir des articles sur Assange « quand il était question de son chat et de son skateboard et... d'allégations selon lesquelles il aurait maculé des murs d'excréments... Mais quand vous avez un article sérieux qui tente réellement de démasquer la fausseté de ce récit public et de révéler les faits dissimulés, alors cela ne les intéresse plus. »
La "pertinence" du billet de Melzer, - écrit pour la défense du plus célèbre prisonnier politique de la planète, - ne fait aucun doute. Les avis de fin de non-recevoir ne font que confirmer l'opposition unie continue des médias grand public privés et d'États contre un éditeur qui a dévoilé ce qu'eux ne voulaient pas voir publié : des preuves de crimes de guerre commis par les États-Unis en Irak et en Afghanistan.
La tribune de Melzer était d'une importance exceptionnelle pour révéler l'impact de la calomnie proférée contre Assange par les médias.
« Comme la plupart des gens », a-t-il écrit, « j'avais été inconsciemment orienté [contre Assange] par la campagne de diffamation incessante, diffusée au fil des ans ».
Mais « une fois que j'ai examiné les faits de cette affaire, ce que j'ai trouvé m'a rempli de répulsion et d'incrédulité. Assange n'est ni un "violeur", ni un "pirate informatique", ni un "espion russe". Ni même le "narcissique égoïste" tel que l'a défini le magistrat en chef Emma Arbuthnot alors qu'elle le condamnait pour violation de la liberté provisoire. »
« Au bout du compte, j'ai finalement compris que j'avais été aveuglé par la propagande et qu'Assange avait été systématiquement calomnié pour détourner l'attention des crimes qu'il avait dénoncés. Une fois déshumanisé par isolement, ridicule et honte, tout comme les sorcières que nous brûlions sur le bûcher, il était facile de le priver de ses droits les plus fondamentaux sans provoquer l'indignation publique dans le monde entier. Et ainsi, un précédent juridique est en train d'être créé, à travers la porte dérobée de notre propre complaisance, qui à l'avenir pourra et sera également appliquée aux divulgations du Guardian, du New York Times et d'ABC News. »
Melzer conclut qu'« il ne s'agit pas seulement de protéger Assange, mais également d'éviter un précédent susceptible de sceller le sort de la démocratie occidentale. » Il poursuit: « Dès que la révélation de la vérité est devenu un crime, tandis que les puissants jouissent de l'impunité, ce sera trop tard pour corriger le cap. Nous aurons abandonné notre voix à la censure et notre destin à une tyrannie débridée. »
A quoi le personnel éditorial de certains des plus grands journaux du monde, y compris ceux proclamant leur "libéralisme", a réagi en haussant les épaules tout en claquant la porte au visage de Melzer.
Dans de telles circonstances, une interdiction officielle de publication ne peut être exclue. Au Royaume-Uni, le World Socialist Web Site a attiré l'attention de la révélation du journaliste indépendant Matt Kennard sur le rôle joué par le rédacteur en chef du Guardian, Paul Johnson, qui siégeait au comité consultatif des rédacteurs en chef, géré par le ministère de la défense, chargé de l'application des D-Notices, un acte d'autocensure par les médias. Les D-Notices sont utilisés pour empêcher la publication d'informations préjudiciables aux intérêts de la sécurité nationale de l'impérialisme britannique.
La participation du Guardian à cette opération de censure immonde est loin d'être unique. Le comité actuel est présidé par Dominic Wilson, directeur général de la politique de sécurité au ministère de la Défense, et comprend les vice-présidents John Battle, responsable de la conformité au journal télévisé d'Independent Television News et Ian Murray, directeur exécutif de la Society of Editors (Association des rédacteurs en chef).
Les membres du comité comprennent la plupart des grands groupes de télévision et de journaux. Y figurent David Jordan, directeur de la politique et des normes éditoriales de la BBC; Sarah Whitehead, responsable adjointe de la retransmission des informations de Sky News; Michael Jermey, directeur des actualités et du sport chez ITV; Peter Clifton, rédacteur en chef de la Press Association; Craig Tregurtha, rédacteur en chef du Times et du Sunday Times; Robert Winnett, rédacteur en chef adjoint du Daily Telegraph; Jess Brammer, responsable de l'information pour le Huffington Post; Charles Garside, rédacteur en chef adjoint du Daily Mail; et David Higgerson de Trinity Mirror.
Sans doute, des réunions similaires entre les responsables des médias et les services de sécurité, formels ou informels, ont lieu aux États-Unis, en Europe, en Australie et dans le monde entier.
Quiconque suit l'actualité ou effectue simplement une recherche sur Google aura remarqué le net déclin des reportages sur Assange. Depuis le 14 juin, lorsque la juge Arbuthnot a annoncé qu'il ferait l'objet d'une audience d'extradition aux États-Unis de cinq jours en février, les principaux organes de presse se sont verrouillés. Ils sont déterminés à empêcher une large connaissance publique et une discussion des accusations portées contre Assange en vertu de la Loi sur l'espionnage, accusations passibles d'une peine de 175 ans d'emprisonnement pouvant aller jusqu'à la peine de mort et qui criminalisent le journalisme et le droit à la liberté d'expression.
La déclaration faite à Melzer qu'Assange ne fait plus partie des « priorités » dans « la programmation des nouvelles » pourrait témoigner d'un veto d'autocensure officiel visant à faciliter les plans américains pour le faire taire à jamais en érigeant un mur de silence sur son sort. Ou peut-être que John Pilger avait raison quand il s'est adressé à un rassemblement de juin 2018 réclamant la liberté d'Assange appelé par le Parti de l'égalité socialiste: « L'ironie est que personne n'a dit à ces journalistes ce qu'ils devaient faire. Je les appelle les journalistes de Vichy, - d'après le gouvernement de Vichy qui a servi et assuré l'occupation allemande de la France. »
Cette conspiration des médias d'Etat doit être brisée. Le 20 juin, le comité de rédaction international du WSWS a lancé un appel intitulé « Pour une campagne mondiale contre l'extradition de Julian Assange aux États-Unis ! Pour la formation d'un comité de défense mondial pour assurer sa liberté ! » Le Parti de l'égalité socialiste (Royaume-Uni) tient une réunion publique à Londres ce mercredi 3 juillet. Nous invitons vivement tous ceux qui souhaitent prendre part à cette lutte à y assister.
Chris Marsden, WSWS.org