Je ne sais pas si après cette formidable déferlante que nous avons vécue partout, vous avez tous ressenti la même chose devant l'émission de télévision consacrée à la réforme des retraite?
Recentrage sur l'essentiel : quand on ne comprend pas c'est qu'il y a un loup...
D'abord l'impression que les membres du gouvernement obscurcissaient le problème alors que quand ceux qui avaient manifesté avec à leur tête Philippe Martinez prenaient la parole cela devenait lumineux...
Si Philippe Martinez étai très bon, toujours sur l'essentiel, il n'y avait pas que lui, le représentant des avocats passait son temps à rectifier le tir dans un langage clair et une jeune femme de l'éducation nationale qui a dénoncé les vrais privilégiés, les patrons du Cac 49, apportaient des faits, refusaient les a peu-près et vrais mensonges des représentants du gouvernement qui pourtant mouillaient la chemise...
Tout cela fleurait le bon sens au point de parfois contaminer les journalistes présents, c'est dire, et l'on songeait en bon français épris de « clarté gauloise : ce qui se comprend bien s'énonce clairement et les mots pour le dire nous viennent aisément ».
Quand il en est différemment c'est qu'il y a un loup, même si on tente de nous faire passer l'obscurité pour de l'ouverture.
En fait on parle de quoi? Vous ne dites pas ce que vous comptez faire, finit par protester une journaliste pourtant en renfort gouvernemental, bien sûr, dit la porte-parole dont le culot est bien connu: c'est parce que nous ouvrons le dialogue.
Quel dialogue répond Martinez quand on convoque les syndicats pour leur dire ce qu'ils doivent accepter et faire accepter à leur base.
Là-dessus tentative de plongée dans les circonvolutions des régimes spéciaux, de ceux qui vont subir la réforme et les autres, pas clair... En revanche un point d'accord, le régime français est le meilleur ; le doute s'insinue : pour une fois que l'on a quelque chose qui marche pourquoi le changer? Est-ce par souci de justice sociale comme s'obstinent à le défendre les deux représentants du gouvernement ou parce que le coût est trop élevé insiste la journaliste.
Bonne question à laquelle il est évité de répondre parce que la jeune enseignante a désigné les vrais privilégiés et là nouvelle usine à gaz...
Et quand l'esprit vient aux masses, il est difficile de récupérer la situation... L'animatrice se retourne vers celui qui a fait passer les sondages pour l'émission et cherche à lui faire dire qu'une majorité de Français sont pour la suppression des régimes spéciaux, une intolérable injustice selon le pouvoir que l'on sait si chatouilleux sur la défense de l'égalité. Le spécialiste se lance dans une explication qui vire au désastre pour les journalistes et les représentants du pouvoir. Résumé: la question des régimes spéciaux n'est vraiment pas le problème des Français, le vrai problème est qu'ils n'ont aucune confiance dans le gouvernement et son président. D'ailleurs 70% de ceux qui sont allés à la manif y sont allés pour dire cette suspicion face à la politique du gouvernement. Je confirme, entre cet enseignant de Luynes qui me disait que ses copains se moquaient de lui tant il avait peu de propension à la grève, mais il passait sa main au-dessus de la tête en riant « mais trop c'est trop » ou ce charmant jeune homme qui portait un chapeau de bolchevique, vendait l'hebdomadaire marxiste Révolution couvert de badge du PCF en m'éxpliquant qu'il donnait un coup de main et cet autre qui avait fait grève pour la première fois dans le privé d'une start up et qu'il comptait bien continuer, les régimes spéciaux n'étaient vraiment pas nécessairement leur préoccupation première...
Le spectateur innocent peut se demander pourquoi effectivement on s'obstine sur les régimes spéciaux et pourquoi on tient absolument à changer le meilleur régime qui soit...
Et quand le représentant de la CGT SNCF a dénoncé le fait qu'en les présentant comme des privilégiés ça permettait d'attaquer tout le monde au profit des vrais privilégiés, il reflétait ce qu'un certain nombre des manifestants avaient compris: « C'est la digue et il faut qu'ils tiennent! »
Un plateau de prolétaires épris de justice sociale?
D'ailleurs, un dernier signe du rapport des forces que la manifestation avait créé, je ne sais pas si vous l'avez remarqué sur le plateau il n'y avait plus que des « prolétaires », la patronne du MEDEF était quasiment un auto-entrepreneur en état d'auto-exploitation, le représentant du gouvernement était venu flanqué de sa mère femme de ménage et Sibeth Ndiaye l'invraisemblable porte-parole de la présidence que le monde entier nous envie pour son langage châtié et son élégance naturelle n'a cessé de déplorer que les petits boulots auxquels elle avait été contrainte de recourir pour ses études ne soient pas comptabilisés pour sa retraite, mais fort heureusement ça allait changer grâce à ce bienfaiteur bien connu du peuple qu'était Macron...
A la fin de l'émission, 63% des téléspectateurs n'étaient toujours pas convaincus par les deux ministres. Le nombre de ceux qui avaient renoncé à comprendre n'était pas négligeable?Comme il y avait à l'origine 58% des Français qui approuvaient la grève, faut-il en déduire que la journée plus l'émission se sont traduit par un gain de 5% ?
Je suis sûre que vous en avez tiré les leçons qui s'imposent: quand tout le monde se prend pour la CGT, quand un plateau entier reconnait que nous avons le meilleur régime de retraite du monde et qu'on le doit aux ministres communistes à la Libération c'est que la journée a été bonne... Il faut continuer.
Danielle Bleitrach