27/03/2020 les-crises.fr  9 min #171120

Le Professeur Didier Raoult : Rebelle Anti-Système ou Mégalomane sans éthique ?

[Science] 3 études montrent que la Chloroquine aggraverait le Sida, le Chikungunya et la Grippe

Au vu des débats actuels sur la Chloroquine (en fait l'hydroxy-chloroquine, une version mieux tolérée), il nous a semblé important de vous communiquer les résultats de 3 études montrant une action aggravante de la chloroquine sur 3 maladies virales.

Bien entendu, cela ne signifie nullement qu'elle aggraverait le Covid-19. Mais cela montre que ce n'est pas une molécule « magique », qui lutterait contre tous les virus - puisque, au contraire, elle en aide certains.

Et force est de constater que, même si nous connaissons cette molécule depuis longtemps, nous n'avons aucune idée de la façon dont elle interagit avec le Covid-19 (tout comme le doliprane ou les anti-inflammatoires semblent interagir avec - il ne faut pas en prendre). De larges essais cliniques sont donc nécessaires.

I. [Royaume-Uni, 07/2012] Chloroquine et Sida

Source  ncbi.nlm.nih.gov: vous pouvez télécharger l'étude complète ici

Les effets de l'hydroxy-chloroquine sur l'activation du système immunitaire et la progression de la maladie chez les patients infectés par le VIH ne recevant pas de traitement antirétroviral : un essai contrôlé et aléatoire.

Nicholas I. Paton, MD, FRCP, Ruth L. Goodall, PhD, David T. Dunn, PhD, Samuel Franzen, BSc, Yolanda Collaco-Moraes, PhD, Brian G. Gazzard, MD FRCP, Ian G. Williams, MA FRCP, Martin J. Fisher, FRCP, Alan Winston, MD, MRCP, Julie Fox, MD, MRCP, Chloe Orkin, MRCP, Elbushra A. Herieka, MRCOG, Jonathan G. Ainsworth, FRCP, Frank A. Post, PhD, FCP(SA), Mark Wansbrough-Jones, FRCP, and Peter Kelleher, PhD, MRCPath, for the Hydroxychloroquine Trial Team

OB : petite explication sur le VIH pour mieux comprendre la suite - même si elle n'est pas indispensable pour notre sujet chloroquine. Le VIH s'attaque à des cellules du système immunitaire appelées lymphocytes T CD4 dont le rôle est de coordonner le système immunitaire. En utilisant ces cellules, le VIH diminue le nombre de CD4 et cause donc un affaiblissement du système immunitaire. Il existe aussi des lymphocytes T CD8 qui expriment un autre marqueur, CD38, dont la surexpression est un aspect saillant de l'infection à VIH. [NB : nous publierons cette étude entièrement traduite plus tard]

Résumé

Contexte
Les thérapies visant à réduire l'activation immunitaire pourraient être utiles au ralentissement de la progression du virus du SIDA.

Objectifs

Déterminer si l'hydroxy-chloroquine diminue l'activation immunitaire et ralentit la chute des cellules CD4.

Concept, cadre et patients

Un essai clinique aléatoire, en double aveugle, contrôlé par placebo, a été réalisé dans 10 cliniques externes du Royaume-Uni entre juin 2008 et février 2011. Les 83 patients participants étaient atteints d'une infection asymptomatique au VIH, ne suivaient pas de thérapie antirétrovirale et présentaient un taux de CD4 supérieur à 400 cellules/μL.

Traitement

Hydroxy-chloroquine, 400 mg, ou un placebo analogue une fois par jour pendant 48 semaines.

Principales mesures du résultat

La principale mesure de résultat était le changement de la proportion de cellules CD8 activées (mesuré par l'expression des marqueurs de surface CD38 et HLA-DR), avec comme résultats secondaires la numération des cellules CD4 et la charge virale du VIH. L'analyse a été réalisée en utilisant des modèles linéaires mixtes.

OB : inutile de rentrer dans le détail ; cela dit qu'on saura si le médicament est efficace si la proportion de cellules CD8 activées change.

Résultats

Il n'y avait pas de différence significative au niveau de l'activation des cellules CD8 entre les 2 groupes (-4,8% et -4,2% dans les groupes hydroxy-chloroquine et placebo, respectivement, à la semaine 48 ; différence, -0,6% ; IC 95%, -4,8% à 3,6% ; P=0,80).

OB : donc la chloroquine n'améliore pas le nombre de CD8, ce médicament ne marche pas pour cette maladie

La baisse du nombre de cellules CD4 était plus significative dans le groupe hydroxy-chloroquine que dans le groupe placebo (-85 cellules/μL vs -23 cellules/μL à la semaine 48 ; différence, -62 cellules/μL ; IC à 95%, -115 à -8 ; P=0,03).

OB : donc la chloroquine dégrade l'état de santé du patient en diminuant les CD4 par rapport au placebo

La charge virale a augmenté dans le groupe hydroxy-chloroquine par rapport a celle du groupe placebo (0,61 log10 copies/mL contre 0,23 log10 copies/mL à la semaine 48 ; différence, 0,38 log10 copies/mL ; IC à 95 %, 0,13 à 0,63 ; P=0,003).

OB : là c'est très problématique aussi : la chloroquine a augmenté le nombre de virus par rapport au placebo

Une thérapie antirétrovirale a été lancée chez 9 patients du groupe hydroxy-chloroquine et 1 du groupe placebo. Le traitement expérimental a été bien toléré, cependant, un grand nombre de patients ont signalé des symptômes grippaux dans le groupe hydroxy-chloroquine par rapport a ceux du groupe placebo (29 % contre 10 % ; P=0,03).

OB : en plus, la chloroquine a triplé la proportion de patients qui ont eu des effets secondaires grippaux.

OB : en conclusion, la chloroquine a aidé le virus du sida à se développer 

II. [France, 05/2018] Chloroquine et Chikungunya

Source  ncbi.nlm.nih.gov: vous pouvez télécharger l'étude complète ici.

Un effet paradoxal du traitement à la chloroquine augmente l'infection au virus du chikungunya

Résumé

Depuis 2005, le virus du chikungunya (CHIKV) est réapparu et a causé de nombreuses épidémies dans le monde, avant de finalement arriver sur le continent américain en 2013. L'absence de thérapies spécifiques au CHIKV a amené à l'utilisation de médicaments non spécifiques.

La chloroquine, qui est communément utilisée pour traiter les maladies à fièvre dans les tropiques, s'est révélée avoir un effet inhibiteur sur la réplication du CHIKV in vitro.

OB : dans une éprouvette, la chloroquine s'attaque à ce virus

Pour évaluer l'effet de la chloroquine in vivo, deux études complémentaires ont été réalisées : (i) une étude prophylactique chez un primate non humain (PNH) ; et (ii) une étude curative, « CuraChik », qui a été réalisée sur un groupe d'humains pendant l'épidémie de 2006 dans les îles de la Réunion. Les données cliniques, biologiques et immunologiques ont été comparées entre groupe traité et groupe placebo.

L'infection aiguë de CHIKV était exacerbée chez les PNHs traités par administration prophylactique de chloroquine. Ces PNHs ont montré une virémie plus élevée et une élimination du virus plus lente (p

OB : la chloroquine exacerbe le virus chez les singes

Chez les humains, les traitements à la chloroquine n'ont pas affecté la virémie ou les paramètres cliniques durant le stage aigu de la maladie (J1 à J14), mais ont affecté les niveaux de protéine C-réactive (CRP), de IFNα, IL-6, et de MCP1 dans le temps (J1 à J16). Surtout, aucun effet positif n'a pu être détecté sur la prévalence de l'arthralgie au Jour 300. Bien qu'inhibiteur in vitro, la chloroquine comme traitement prophylactique chez les PNHs augmente la réplication du CHIKV et retarde la réponse cellulaire et humorale.

Chez les patients, le traitement curatif à la chloroquine durant la phase aiguë diminue les niveaux de cytokines clés, et pourrait ainsi retarder les réponses immunitaires adaptatives, comme observé chez les PNHs, sans le moindre effet suppressif sur la charge virale périphérique.

OB : la chloroquine n'a pas le moindre effet suppressif sur le virus chez les humaines, et elle pourrait même retarder la réponse immunitaire

III. [Singapour, 09/2011] Chloroquine et prévention de la Grippe

Source  ncbi.nlm.nih.gov: vous pouvez télécharger l'étude complète ici.

La chloroquine pour la prévention de la grippe : un essai randomisé, en double aveugle et contrôlé par placebo

Résumé

CONTEXTE : La chloroquine a une activité in vitro contre la grippe et pourrait être un candidat idéal pour la prévention mondiale de la grippe dans la période entre le début d'une pandémie avec une souche de grippe virulente, et le développement et la diffusion à grande échelle d'un vaccin efficace. Notre objectif était d'évaluer l'efficacité d'une telle intervention.

OB : dans une éprouvette, la chloroquine s'attaque à ce virus

MÉTHODOLOGIE : Dans cet essai randomisé, en double aveugle et contrôlé par placebo, réalisé dans un seul centre à Singapour, nous avons assigné au hasard (1:1) des adultes en bonne santé à recevoir du phosphate de chloroquine (500 mg/jour pendant 1 semaine, puis une fois par semaine jusqu'à 12 semaines) ou un placebo correspondant en utilisant une liste de randomisation générée par ordinateur. Les participants ont rempli un journal en ligne des symptômes chaque semaine, complété par des journaux quotidiens et des prélèvements nasaux auto-administrés en cas de malaise. Les tests d'inhibition de l'hémagglutination pour la grippe A (H1N1, H3N2) et B ont été effectués sur des échantillons de sang prélevés au départ et après 12 semaines. Le principal résultat a été une grippe clinique confirmée en laboratoire, définie par des symptômes spécifiques, s'accompagnant soit d'ARN de la grippe sur des écouvillons nasaux, soit de la multiplication par quatre des titres d'inhibition de l'hémagglutination sur la période d'étude de 12 semaines. L'analyse a été faite en vue de la mise au point d'un traitement. Cet essai a été enregistré auprès de ClinicalTrials.gov, sous le numéro NCT01078779.

CONSTATATIONS : De novembre 2009 à février 2010, nous avons recruté 1 516 participants éligibles. 1 496 (96%) sont parvenus à la semaine 12 et ont été inclus dans l'analyse d'efficacité. Le taux d'adhésion à l'objet de l'étude était de 97 % et 94 % des journaux hebdomadaires prévus ont été remplis.

Huit (1 %) des 738 participants présentaient une grippe clinique confirmée en laboratoire dans le groupe placebo et 12 (2 %) des 724 participants dans le groupe chloroquine (risque relatif 1-53, 95 % 0,63-3,72 ; p=0-376). 29 (4 %) des 738 personnes présentaient une infection grippale (symptomatique ou asymptomatique) confirmée en laboratoire dans le groupe placebo et 38 (5 %) des 724 personnes dans le groupe chloroquine (1-34, 0,83-2,14 ; p=0-261). 249 (33 %) des 759 participants ont signalé des effets indésirables (pour la plupart bénins) dans le groupe placebo et 341 (45 %) des 757 dans le groupe chloroquine (p

Les céphalées, les étourdissements, les nausées, la diarrhée et la vision trouble étaient plus fréquents dans le groupe chloroquine, mais ont rarement entraîné l'arrêt du traitement. Un événement indésirable grave (hépatite) était peut-être lié à la chloroquine.

INTERPRÉTATION : Bien que généralement bien tolérée par une population communautaire saine, la chloroquine n'empêche pas l'infection par la grippe. Des médicaments de substitution sont nécessaires pour la prévention de la grippe à grande échelle.

OB : là encore, il n'y a pas assez de robustesse statistique pour conclure. Les essais cliniques en cours trancheront.

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