Est-ce une surprise ?
Les États retournent contre leurs populations l'arsenal règlementaire et législatif présenté initialement comme moyen de lutter contre le terrorisme et le blanchiment d'argent. Au passage, les banques officialisent leur rôle d'auxiliaires de la dictature technologique qui se met en place sous nos yeux dans les États dits démocratiques.
Si la réalité d'un «bank run» - retraits massifs par les clients des banques - au Canada reste à démontrer, le mot d'ordre a parcouru les réseaux sociaux pendant plusieurs jours.
Pour ajouter à la confusion, les services en ligne de cinq grandes banques canadiennes ont connu des problèmes techniques les 16 et 17 février. Des clients se sont trouvés dans l'incapacité d'effectuer des opérations courantes en ligne, telles que virements et transferts.
« Nos experts travaillent pour régler le problème aussi vite que possible, mais nous n'avons pas de visibilité », a expliqué le 16 février à ses clients la Banque royale du Canada (RBC). Sans pour autant accréditer un bank run. Bien sûr.
Criminalisation de l'opposition politique
Quelle que soit son ampleur, le bank run canadien est révélateur : une partie de la population réalise qu'elle est prise au piège et tente de réagir « à l'ancienn e» en tentant de protéger des avoirs, en retirant du liquide, dans un monde dématérialisé et numérique.
Tout a basculé le 14 février, quand le vice-premier ministre canadien Chrystia Freeland a annoncé une « extension des règles financières » aux plateformes de financement en ligne, afin d'attaquer le mouvement du Freedom Convoy au porte-monnaie.
Le gouvernement canadien s'appuie sur une « Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes » datant de 2000. Fait notable, la loi a été modifiée en juin 2021.
Aux termes de cet élargissement de la loi, les banques sont tenues de geler les comptes en lien avec le mouvement des routiers.
Mais comment appliquer une loi visant le « crime » et le terrorisme à des manifestants ? Tout simplement en criminalisant les Freedom Convoys.
Pour réaliser ce tour de passe-passe, il n'aura fallu qu'une seule déclaration du Premier ministre Justin Trudeau. « Les occupations et barrages illégaux ne sont pas des manifestations pacifiques, et ils ne peuvent se poursuivre », a-t-il jugé. Tout en déclarant aussi, en même temps : « On va toujours défendre la liberté d'expression et le droit des Canadiens de manifester pacifiquement. »
Voilà donc, dans une démocratie, comment un mouvement de protestation peut, d'un coup d'un seul, être rejeté dans la criminalité. Et fournir le cadre rhétorique pour l'instauration d'un régime de surveillance.
Agenda de contrôle bancaire des populations
Partout en Occident, les États retournent contre leurs peuples des outils destinés initialement à les défendre contre une menace extérieure. La militarisation des forces de police en Occident en témoigne.
La Loi sur les mesures d'urgence invoquée par Trudeau est l'avatar de Loi sur les mesures de « guerre ». Mais pas une « guerre » contre une puissance étrangère. Le dispositif a été, au contraire, mis en œuvre par le père de Justin, Pierre Elliott Trudeau, contre la province du Québec en 1967. Une « guerre » de l'Etat fédéral canadien contre un de ses sujets fédérés.
Et, il en va de même de l'instrumentalisation de la lutte contre le terrorisme - menace extérieure a priori - et le blanchiment d'argent, qui concerne finalement plus les simples clients que les terroristes.
Depuis une décennie, la législation bancaire s'alourdit. Au prétexte de la crise financière de 2008, puis du « terrorisme », l'Union européenne comme l'Amérique du Nord se sont lancées dans un travail frénétique de réglementation du secteur... dont les clients font finalement les frais.
La règle du « know your customer » donne ainsi la prérogative aux banques d'enquêter sur leurs clients, avec l'obligation de signaler anormalité aux autorités de régulation financière ou au fisc.
Les États travaillent depuis plusieurs années à interconnecter les banques et leurs services fiscaux, et, de façon plus générale, à tracer toutes les transactions : prélèvement de l'impôt à la source, plafonnement des paiements en liquide, encouragement aux transactions numériques...
À cet égard, les événements d'Ottawa fournissent une occasion de faire avancer cet agenda. « Avec la Loi sur les mesures d'urgence, les banques canadiennes subissent un test de pression de leurs pratiques de conformité [compliance] », titre ainsi le Business Insider.
Haro sur les cryptomonnaies
Sans compte bancaire, c'est la mort sociale et économique. Après s'être rendues incontournables pour mener une vie normale, les banques jettent donc le masque. Elles sont désormais un rouage majeur de la dérive autoritaire de l'Occident.
La loi d'urgence permet un contrôle total des transactions, le gel des comptes bancaires, sans qu'aucune ordonnance d'un juge ne soit nécessaire. Et cette loi de guerre ouvre la voie à une totale surveillance des transactions en cryptomonnaies.
Faisant d'une pierre, deux coups, le gouvernement fédéral canadien a saisi l'occasion pour s'attaquer aussi aux actifs numériques cryptés. Les cryptos son tdepuis longtemps un casse-tête pour les États, dont le projet à moyen terme est d'imposer leurs propres monnaies banque centrale à technologie block chain.
Or, le principal obstacle à ce projet est narratif. Comment dans un Occident qui a porté en étendard la liberté économique et la «démocratie de marché», justifier un contrôle à la chinoise ?
Là encore, même si les régimes occidentaux s'embarrassent de moins en moins des oripeaux démocratiques, les dirigeants invoquent encore, comme Trudeau, la défense et la « sécurité » des citoyens, ou encore la « protection des emplois ».
À bout d'arguments, le pouvoir oligarchique joue la division. Comme dans les bonnes vieilles dictatures du XXe siècle, les gouvernements occidentaux brandissent des ennemis de l'intérieur : Gilets jaunes, « truckers », « complotistes », antivax, prorusses, survivalistes, autonomistes...
En une semaine, le Canada, décidément en pointe de l'agenda mondialiste avec un autre front en Ukraine, a déployé un système qui préfigure une surveillance totale et totalitaire.
Ce qui se joue à Ottawa est décisif. Si les mondialistes parviennent à imposer le contrôle bancaire, ils parviendront à imposer l'agenda de contrôle social et économique davossien.
Nul doute que l'Union européenne, Ursula von der Leyen, que Trudeau appelle la «présidente», et ses Etats vassaux observent avec intérêt la contre-offensive oligarchique contre les «truckers».