06/10/2023 mondialisation.ca  3min #234913

 Le conflit au Karabakh modifiera la perception qu'ont les principaux acteurs les uns des autres

Quel chemin choisira l'Arménie après la défaite au Karabakh

Par  Elsa Boilly

Le « groupe des cinq » s'est réduit à quatre: Ilham Aliyev a refusé de se rendre à Grenade, où devait avoir lieu sa rencontre avec les dirigeants de l'Arménie, de la France, de l'Allemagne et de l'UE. Le président de l'Azerbaïdjan n'est pas satisfait par la position de l'Europe, qui a refusé d'inviter le dirigeant turc Recep Tayyip Erdogan aux pourparlers. Le Premier ministre arménien Nikol Pachinian, quant à lui, a déclaré qu'il était prêt à signer un accord de paix avec Bakou.

Une réunion était prévue à Grenade dans un format à cinq, Azerbaïdjan-Arménie-France-Allemagne-Union européenne. Cependant, le président du premier pays participant, Ilham Aliyev, a refusé. La raison officielle est que la Turquie n'a pas été invitée aux pourparlers.

Nikol Pachinian a entre-temps déclaré que la délégation arménienne sous sa direction assisterait quand même à l'évènement, et c'est dommage que l'Azerbaïdjan ait agi de la sorte. Le Premier ministre a également fait plusieurs déclarations importantes: premièrement, il est prêt à signer un accord de paix avec Aliyev; deuxièmement, il est prêt à démissionner immédiatement si cela améliore la situation.

Cependant, il en a finalement conclu qu'une telle démarche n'aurait en réalité aucun effet et ne ferait qu'engendrer le chaos, c'est pourquoi il reste à son poste et se rend en Espagne.

Il est clair pourquoi Ilham Aliyev a refusé de venir. Sans le soutien de son principal allié, Recep Tayyip Erdogan, il lui serait très difficile, car il serait seul face à Nikol Pachinian et aux dirigeants occidentaux qui sont davantage du côté de l'Arménie. Et, après tout, il est le vainqueur, il dicte les conditions, mais il pourrait sembler que ce soit le contraire.

Au final, un sommet Arménie-Union européenne aura lieu à Grenade. Cela signifie que les dirigeants occidentaux proposeront probablement au Premier ministre arménien de rejoindre leur camp, de faire un choix. Ils sont même prêts à fournir des armes.

L'Occident exige de plus en plus l'introduction de sanctions contre l'Azerbaïdjan. Ilham Aliyev, pour sa part, se positionne comme un dirigeant respectable. Son pays se développe activement et est prêt à un partenariat mutuellement bénéfique avec le reste du monde.

L'Azerbaïdjan a rétabli son intégrité territoriale et prétend manifestement à un rôle de centre de puissance et de développement dans le Caucase.

Cependant, l'Europe et surtout les États-Unis agissent de manière non constructive. Ils n'apprécient pas l'issue pour les Arméniens du Karabakh. Ce n'est pas une manière de faire au XXIe siècle. Ils ne sont donc pas prêts à reconnaître leur propre intérêt et à aborder la question d'un point de vue pragmatique.

L'Occident est-il prêt à passer des paroles aux actes? À aider l'Arménie, à lui offrir son soutien et à intégrer le pays dans sa communauté? Si l'on regarde l'Ukraine, ils sont prêts, même si ce n'est pas la manière dont cette dernière le souhaiterait.

Il est également important de considérer la position de Recep Tayyip Erdogan. Il critique bien sûr l'Occident, parfois durement, mais il ne franchit pas les lignes rouges. Car ils dépendent les uns des autres. Et peut-être même qu'il ne voulait pas aller à Grenade pour cette raison, pour ne pas se retrouver mal à l'aise.

Et voilà que nous voyons un nouveau cycle de l'affrontement au Karabakh sous le nom « Les mêmes et l'Occident ». Où l'Arménie finira-t-elle par aller? C'est une question très sérieuse.

Elsa Boilly

La source originale de cet article est  Observateur continental

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