Par Katherine Hearst
L'Embargo énergétique mondial pour la Palestine appelle les syndicats et les organisations de défense de l'environnement et des droits de l'homme à empêcher les exportations de carburant vers Israël
Une coalition d'organisations palestiniennes a appelé à un « 𝕏 embargo énergétique total » contre Israël jusqu'à ce qu'il mette fin à sa guerre à Gaza.
Lancé lundi, l' Embargo énergétique mondial pour la Palestine appelle les organisations, les travailleurs et les défenseurs de l'environnement à bloquer toutes les exportations d'énergie vers Israël jusqu'à ce que ce dernier mette fin « au génocide et à son régime d'apartheid et d'épuration ethnique à l'encontre du peuple palestinien ».
La campagne collabore avec une équipe de chercheurs pour analyser les flux énergétiques à destination d'Israël et identifier les goulets d'étranglement dans sa chaîne d'approvisionnement.
La coalition exige non seulement l'arrêt des importations de carburant, mais aussi l'arrêt des exportations de gaz israélien vers l'Europe.
Soulignant « l'impunité persistante » d'Israël après la décision de la Cour internationale de justice (CIJ) de donner suite à la plainte de l'Afrique du Sud accusant Israël de génocide, un porte-parole de la coalition déclare à Middle East Eye : « Nous sommes actuellement à un stade où il faut plus qu'une simple décision de la CIJ pour mettre en œuvre le type de mesures dont nous avons besoin ».
La campagne repose sur les appels précédents de la Fédération générale des syndicats palestiniens (PGFTU) à cesser l'armement d'Israël.
Un embargo énergétique « par le bas »
Israël, dont la production nationale de pétrole brut est quasiment inexistante, a importé l'année dernière environ 300 000 barils de brut par jour.
La principale source de pétrole d'Israël est l' Azerbaïdjan, avec l'équivalent de 300 millions de dollars importés en janvier. Les exportations de brut sont expédiées depuis le port méditerranéen turc de Ceyhan.
« Au niveau des États, on s'inquiète de l'infaisabilité d'un embargo énergétique en raison du soutien que les États-Unis apporteraient à l'approvisionnement dans d'autres domaines », explique à MEE Charlotte Rose, chercheuse au sein du groupe de campagne Disrupt Power, membre de la coalition.
« Mais ce que nous essayons de montrer à travers la recherche et la collaboration avec différents mouvements... c'est ce à quoi [un embargo] par le bas peut ressembler. »
La coalition collabore avec un réseau mondial de plus en plus large de travailleurs et de groupes de campagne pour cibler les exportations de combustibles vers Israël, y compris les travailleurs des mines en Colombie, le plus grand exportateur de charbon vers Israël.
Dans un communiqué, les travailleurs ont souligné le lien entre l'exportation de métaux, de minéraux et de combustibles vers Israël et le rôle de ce dernier dans la fourniture de formation et d'équipement aux paramilitaires responsables de l'assassinat de syndicalistes.
Aux États-Unis, la coalition est en contact avec le groupe de campagne Chevron out of Palestine, qui a organisé un rassemblement de 500 personnes devant la raffinerie de l'entreprise.
Selon le mouvement Boycott, Désinvestissement et Sanctions ( BDS), le géant des énergies fossiles est le « principal acteur international de l'extraction du gaz fossile revendiqué par Israël en Méditerranée orientale ».
Complicité de l'Union européenne
La coalition travaille également avec des journalistes et des groupes engagés pour le climat en Europe afin de sensibiliser aux exportations de gaz israélien vers l'Union européenne (UE), qui est devenue un important importateur de gaz israélien pour pallier les pénuries consécutives à l'invasion de l' Ukraine par la Russie.
En raison du retard de la construction du gazoduc de la Méditerranée orientale, censé relier le réseau gazier de l'Union européenne aux réserves de la Méditerranée orientale, dont certaines se trouvent au large d'Israël, l'UE s'est tournée vers l'expédition de gaz israélien à partir de terminaux égyptiens.
« L'UE reç[oit] du gaz tout au long du génocide »- Charlotte Rose, chercheuse, Disrupt Power
Les importations se poursuivent depuis le début de l'assaut israélien contre Gaza. Le média spécialisé dans l'économie Bloomberg a rapporté que deux navires de gaz naturel liquéfié (GNL) avaient quitté l' Égypte et avaient accosté en Belgique et en Italie en octobre.
« L'UE reç[oit] du gaz tout au long du génocide », indique Charlotte Rose à MEE.
« Cela se fait par le biais d'une série d'infrastructures de pipelines qui ont été mises en place ces dix dernières années entre l'Égypte et Israël puis [le gaz est] acheminé vers [les terminaux européens] ».
En juin 2022, l'UE, l'Égypte et Israël ont signé un protocole d'accord visant à autoriser des exportations « significatives » de gaz israélien vers l'Europe et à encourager les entreprises de l'UE à investir dans les gisements de gaz israéliens.
En 2023, Israël a accordé des licences d'exploration gazière à Eni (Italie), British Petroleum et Dana Petroleum (Royaume-Uni) pour l'exploitation du gaz naturel au large de la côte méditerranéenne du pays.
« Sans ce type de soutien et sans l'idée qu'Israël devienne une forme de diversification face au problème gazier de l'UE, il n'aurait pas vraiment le pouvoir politique et financier dont il dispose », explique Charlotte Rose à MEE.
« Les mouvements européens sont vraiment en retard là-dessus, que ce soit le mouvement pour le climat ou d'autres mouvements sociaux.
« C'est pourquoi nous avons commencé à faire cet exercice de cadrage et à nous mobiliser pour inciter les groupes à s'exprimer davantage sur cette question. »
Traduit de l'anglais ( original).
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