L'Ukraine n'a pas renouvelé son contrat gazier avec la Russie. Celui-ci a donc expiré le 1er janvier. Kiev servait de passage pour le gaz russe vers la Moldavie, la Roumanie, la Pologne, la Hongrie et la Slovaquie, puis l'Autriche et l'Italie. Cependant le président non élu Volodymyr Zelensky ne souhaitait pas reconduire cet accord tant que le conflit avec la Russie ne serait pas réglé.
Gazprom, qui évalue ses impayés à 709 millions de dollars, avait annoncé couper ses livraisons de gaz à la Moldavie. Celle-ci, qui conteste la facture, estime, quant à elle, sa dette à seulement 8,6 millions de dollars et rejette ses responsabilités sur la société transnistrienne Tiraspoltransgaz. Au contraire la Transnistrie fait valoir que jamais Tiraspoltransgaz n'a traité directement avec Gazprom.
Dans la pratique, la décision ukrainienne affecte principalement deux États de l'UE alliés de la Russie : la Slovaquie et la Hongrie. Tandis que la décision moldave touche durement la Moldavie et surtout la Transnistrie.
☞ La Russie exporte également du gaz vers l'Europe par voie maritime, sous forme de gaz naturel liquéfié (GNL), ainsi que par le gazoduc TurkStream. L'itinéraire relie la Russie à la Turquie via la mer Noire, puis se poursuit jusqu'à la frontière avec la Grèce, membre de l'UE. Il dispose de deux lignes, l'une pour le marché intérieur turc et l'autre pour approvisionner les clients d'Europe centrale, dont la Hongrie et la Serbie.
☞ Après l'escalade du conflit ukrainien en février 2022, l'UE a fait de la réduction de sa dépendance à l'énergie russe une priorité absolue. Elle a augmenté ses importations de gaz en provenance de Norvège et a trouvé des sources alternatives de GNL en provenance du Qatar et des États-Unis. Cependant, les importations de GNL sont beaucoup plus coûteuses que le gaz russe. En outre, les approvisionnements en GNL de l'UE sont actuellement menacés en raison des inquiétudes suscitées par la récente menace de Donald Trump d'imposer des droits de douane sur les exportations et par la menace du Qatar de suspendre les livraisons en raison de la nouvelle législation de l'UE sur les émissions de carbone.
☞ Robert Fico, Premier ministre slovaque, a averti que, même si les livraisons de gaz via l'Ukraine ne représentent que 3,5 % de la consommation de l'UE, tout arrêt perturbera l'ensemble du marché. Il a noté que cela pourrait augmenter les prix du gaz dans l'ensemble du bloc d'environ 30 %, ce qui se traduirait par un coût annuel supplémentaire de 40 à 50 milliards d'euros. Il s'est rendu à Moscou, le 22 décembre, et a rencontré le président russe, Vladimir Poutine, en violation de la position de l'Union européenne (comme l'avait fait Viktor Orbán). Enfin, il a demandé à l'avance à la Commission européenne une compensation de 500 millions d'euros pour les dommages subis en cas de coupure ukrainienne des livraisons de gaz russe.
☞ L'UE étudie la possibilité de confier à un opérateur privé l'achat du gaz russe et son transfert, à son nom, vers l'UE via l'Ukraine.
☞ L'enjeu gazier de la guerre en Ukraine explique l'implication de nombreux acteurs aux côtés des straussiens.
• Le gazoduc Yamal-Europe, qui traverse la Biélorussie et la Pologne, a été fermé quelques mois après le début de l'opération spéciale. La Pologne a exproprié les 48 % des actions détenues par Gazprom, qui étaient gelées par les sanctions.
• Nord Stream 1 a été progressivement retiré de l'exploitation en raison des exigences d'entretien aggravées par le retard pris par le Canada lors du retour des turbines à gaz réparées à la Russie.
• Ce gazoduc et l'inactif Nord Stream 2 ont ensuite explosé lors d'un attentat terroriste (26 septembre 2022). Un seul a été gravement endommagé, mais aucun des deux n'a été réactivé pour des raisons politiques.
Cet article est extrait du numéro 114-115 de "Voltaire, actualité internationale". Le monde change vite. Abonnez-vous à notre lettre confidentielle hebdomadaire ; une source exceptionnelle d'information sur la transition vers un monde multipolaire.