20/01/2025 elcorreo.eu.org  5min #266579

 La guerre de l'Arctique

Le Groenland possède-t-il réellement des « ressources naturelles immenses » ?

par  Ugo Bardi

Le Groenland a un gros problème d'image : sur les cartes, il semble être aussi grand que l'ensemble de l'Afrique, mais ce n'est pas le cas. Il s'agit d'une distorsion de la méthode utilisée pour la représenter, la « projection Mercator ». En réalité, la superficie du Groenland représente moins de 10 % de celle de l'Afrique. De plus, le nom même de « Groenland » (« Terre verte ») est un peu une arnaque. Il avait été inventé par le premier Européen arrivé là-bas, le Viking Erik le Rouge, qui avait choisi ce nom probablement pour attirer les colonisateurs venus de Norvège.

Mais le Groenland n'est pas vert : c'est une croûte de glace géante avec un peu d'herbe sur les bords. Les Norvégiens qui allèrent y vivre au Moyen Âge et qui, les pauvres, moururent de faim et de froid, s'en aperçurent. Mais la légende persistante demeure aujourd'hui selon laquelle il était véritablement « vert » à cette époque, ce qui prouverait que le réchauffement climatique moderne n'a rien d'inquiétant. Dommage que si le Groenland avait été véritablement libre de glace au Moyen Âge, le niveau de la mer aurait été au moins sept mètres plus haut qu'aujourd'hui. Et imaginez quel genre de crues les Vénitiens de cette époque auraient vu !

Alors pourquoi diable Donald Trump se serait-il mis en tête d'annexer le Groenland aux États-Unis ? A-t-il commis la même erreur qu'Erik le Rouge ? Ou a-t-il été trompé par les cartes qu'il a vues ? En fait, il ne semble pas que quiconque aux États-Unis ait vraiment envie de s'installer au Groenland pour mourir de froid, aussi vert ou grand soit-il. Plus que toute autre chose, on parle des « immenses ressources minérales », notamment pétrolières, que recèle le Groenland.

Mais ces ressources existent-elles vraiment ? Le pétrole du Groenland fait parler de lui depuis au moins 20 ans, lorsque Jean Laherrere, l'un des plus grands experts pétroliers au monde, critiquait certaines estimations trop optimistes de l'USGS ( United States Geological Survey) en disant, plus ou moins, « regardez le Groenland, il n'en sortira rien, au moins dans les vingt prochaines années » Et il avait absolument raison : depuis lors, personne n'a extrait ne serait-ce qu'un litre de pétrole au Groenland. Il se peut qu'il y en ait une partie sous la couche de glace, mais qui pourrait faire l'effort de l'extraire avec tous les coûts et les incertitudes que cela implique, compte tenu également des conditions météorologiques prohibitives ? Et en considérant également que dans quelques décennies, le pétrole comme source de carburant sera tout aussi obsolète que le charbon pour les locomotives à vapeur.
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 Ce ne serait pas la première fois que des hommes politiques se lancent dans des entreprises absurdes fondées sur des évaluations imaginatives. Vous souvenez-vous de l'histoire des « immenses ressources pétrolières » qui existaient dans la région Caspienne ? On disait qu'ils étaient si grands qu'on pourrait les appeler une « Nouvelle Arabie Saoudite ». Il est possible que les 20 années d'occupation militaire de l'Afghanistan, avec tous les désastres qui en ont résulté, soient le résultat de l'idée qu'il était nécessaire de faire passer un pipeline depuis l'Afghanistan pour accéder au pétrole de la Caspienne. Mais la nouvelle Arabie Saoudite s'est avérée plutôt être un nouveau Phénix arabe. Non pas qu'il n'y ait pas de pétrole dans cette région, mais rien de comparable aux projections imaginatives des années 1990.

Il en va de même pour les discours encore plus imaginatifs sur les « immenses ressources minérales » de l'Ukraine. Nous parlons d'une valeur de 15 mille milliards de dollars (voire 26 mille). Mais ces ressources existent-elles vraiment ? Et combien coûterait leur extraction ? Qui sait ?

Essentiellement, ces histoires d'« immenses ressources minérales » sont plutôt un prétexte pour rapporter de l'argent à l'industrie militaire et du prestige aux hommes politiques. Trump le comprend probablement très bien. Surtout, le Groenland est une cible facile avec seulement 56 000 habitants (oui, vous avez bien lu, plus ou moins la même population que Vercelli) et donnerait à Trump le prestige d'avoir ajouté un nouvel État, le 51e, aux USA. Une logique un peu brutale, mais c'est ainsi que les choses se passent dans le monde d'aujourd'hui.

Ugo Bardi* pour son blog  The Seneca Effect

Original : «  Grabbing Greenland's Oil. But does it Exist ? When Politicians misunderstand the concept of 'mineral resources' »

Leggere in italiano al sito  Il fatto cotidiano  Davvero la Groenlandia ha ‘immense risorse naturali' ?

Traduit de l'italien de et pour El Correo de la Diaspora de : Estelle et Carlos Debiasi.

 El Correo de la Diaspora. Paris, le 20 janvier 2025.

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newsnet 2025-01-20 #14517
Essentiellement, ces histoires d'« immenses ressources minérales » sont plutôt un prétexte

... pour s'accaparer une zone destinée à être colonisée par la race d'Orion, dont l'arrivée à grands bruits a été marquée par des drones pour faire diversion