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La justice américaine a reconnu BNP Paribas coupable d'avoir facilité le génocide au Soudan en transférant des milliards de dollars au profit du régime d'Omar el-Béchir entre 2002 et 2008. Ainsi, trois victimes soudanaises recevront 20,45 millions de dollars de la part de la banque.
Un jury fédéral américain a reconnu la banque française BNP Paribas coupable d'avoir facilité le génocide au Soudan. Le verdict rendu à Manhattan estime que ses activités financières ont renforcé le régime de Khartoum, alors engagé dans une guerre contre une partie de sa population, causant la mort de centaines de milliers de personnes et le déplacement de millions d'autres.
Cette décision, issue d'une procédure engagée en 2016 par des réfugiés soudanais installés aux États-Unis, met fin à plusieurs années de litiges autour des transactions effectuées par l'institution en violation des sanctions américaines. Les plaignants ont démontré que, de 2002 à 2008, BNP Paribas avait transféré plusieurs milliards de dollars pour le compte d'entités publiques soudanaises, permettant ainsi au gouvernement de l'époque, dirigé par Omar el-Béchir, de maintenir ses revenus pétroliers et d'importer du matériel essentiel à son armée.
Le cœur de l'affaire concerne la région du Darfour, théâtre d'un conflit qui a débuté en 2003. Les forces gouvernementales, épaulées par les milices Janjawids, y ont mené une campagne de violences systématiques contre les populations non arabes. Selon les estimations des Nations unies, plus de 300 000 personnes ont été tuées et environ 2,5 millions ont dû fuir leurs foyers.
Le tribunal a ordonné à BNP Paribas de verser 20,45 millions de dollars de dommages et intérêts à trois plaignants originaires du Soudan. Pour les avocats des plaignants, le verdict marque une victoire morale pour les victimes du Darfour. Ils estiment que leurs clients ont tout perdu à cause d'une campagne de destruction alimentée par des fonds en dollars américains, un flux financier que BNP Paribas a contribué à maintenir alors qu'il aurait dû être interrompu.
De son côté, BNP Paribas a rejeté le verdict, estimant que les faits avaient été mal interprétés et que le Soudan disposait d'autres sources de financement. La banque, deuxième plus grande institution financière d'Europe, a annoncé son intention de faire appel, évoquant une mauvaise application du droit suisse et l'exclusion de preuves clés.
Ce n'est pas la première fois que la banque est sanctionnée pour des violations de sanctions internationales : en 2014, elle avait déjà plaidé coupable aux États-Unis pour des opérations similaires avec le Soudan, l'Iran et Cuba, et versé près de 8,97 milliards de dollars d'amendes.