par Françoise Germain-Robin
Ex-colonie italienne, le pays devenu indépendant s'est engagé en 1969 avec le régime dans une phase anti-impérialiste avant de « normaliser » ses relations économiques et politiques.
Avant d'accéder à l'indépendance, en 1951, la Libye a fait partie de plusieurs empires. Elle est composée de plusieurs provinces, dont la Tripolitaine à l'ouest et la Cyrénaïque à l'est, où le soulèvement a commencé. Celle-ci tire son nom de la ville de Cyrène, qui fut au VIIe siècle avant Jésus-Christ la capitale d'une colonie grecque prospère avant d'être annexée par l'Égypte. La Tripolitaine fut d'abord carthaginoise, avant d'être intégrée, avec la Cyrénaïque, dans l'empire romain. L'un des empereurs romains du IIIe siècle, Septime Sévère, était un Libyen. La Libye jouait à l'égard de l'empire romain le rôle qu'elle a retrouvé à l'égard de l'Union européenne ces dernières années : servir de rempart contre l'immigration venue d'Afrique.
Conquise par les Arabes qui l'islamisent au VIIe siècle, puis en 1551 par Soliman le Magnifique, elle fera partie de l'empire ottoman jusqu'en 1911, année qui voit l'Italie entreprendre sa conquête. Colonie italienne jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, la Libye est le théâtre d'une bataille acharnée entre les puissances de l'Axe - Italie et Allemagne nazie - et les Alliés. Elle est partagée en 1945 par les vainqueurs : à la Grande-Bretagne la Tripolitaine et la Cyrénaïque, à la France le Fezzan, au sud.
En 1949, l'ONU se prononce pour son indépendance. Le règne de la famille royale des Sennoussi commence en 1951. C'est le colonel Kadhafi qui y met fin en 1969 par un coup d'État. Il instaure en 1977 un nouveau régime, la Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste. Basé sur des Comités révolutionnaires, ce régime est supposé établir « le gouvernement direct par les masses ». Il n'y a pas d'élections, donc pas de Parlement ni de président élu, Muammar Kadhafi se proclamant Guide d'une révolution permanente dont les principes sont consignés dans le Livre vert qu'il a rédigé et que l'on trouve en vente en Libye dans toutes les langues.
L'une des ambitions de Kadhafi est de réussir une Union de la nation arabe et il fait plusieurs tentatives en ce sens - avec l'Égypte et la Syrie, puis avec le Maroc. Anti-impérialiste, membre actif du Front du refus (contre toute négociation avec Israël sur la question palestinienne), un des animateurs de l'Opep, il tente au même moment de conquérir le nord du Tchad et devient la bête noire des États-Unis, qui tenteront à plusieurs reprises de l'éliminer, allant jusqu'à bombarder Tripoli en 1986.
Après l'attentat de Lockerbie contre un Boeing de la Pan Am en 1988, la Libye est soumise à un embargo total qui ne prendra fin qu'en 2004. Commence alors une phase active de réconciliation avec les États-Unis mais aussi l'Union européenne. La Libye renonce à son programme nucléaire, s'engage à combattre le terrorisme et passe avec l'Europe des accords qui font d'elle le garde-chiourme de l'Union européenne contre les migrants venus d'Afrique. C'est ce rôle que le colonel Kadhafi a menacé de ne plus jouer si Bruxelles continuait à critiquer la répression qu'il exerce contre les soulèvements actuels. Quatrième producteur africain de pétrole, la Libye a engagé une libéralisation de son économie, ouverte aux investissements étrangers, notamment italiens, et un rapprochement spectaculaire avec Silvio Berlusconi et... Nicolas Sarkozy.