Le témoignage de Sophia, participante à la Mission "Bienvenue Palestine", à la Une du quotidien Le Progrès.
Loire.
La fin du cauchemar pour Sophia, arrêtée et incarcérée à Tel Aviv
« Je suis ni activiste, ni militante ». Pourtant, Sophia (en médaillon) a été arrêtée à l'aéroport de Ben Gourion (photo) et incarcérée à la prison de Ramlé / Yves Salvat
Saint-Etienne. Sophia Safsaf, une Stéphanoise de 20 ans, a été incarcérée quatre jours à la prison de Ramlé à Tel Aviv alors qu'elle se rendait à Bethléem dans le cadre de la mission « Bienvenue en Palestine ». Elle témoigne
Le 8 juillet dernier, un groupe de voyageurs européens, partis dans le cadre de la mission « Bienvenue en Palestine », atterrit à l'aéroport Ben Gourion à Tel Aviv.
Le groupe devait ensuite se rendre en car à Bethléem, sur le territoire palestinien, pour un séjour d'échanges culturels.Mais leur voyage a été brusquement interrompu.
À peine descendus d'avion et foulé le sol israélien, plusieurs dizaines de ressortissants français, britanniques et belges ont été arrêtés par les autorités israéliennes. Sophia Safsaf se trouvait parmi eux.
À 20 ans, la jeune Stéphanoise, d'origine Kabyle, exerce le métier de mannequin. Elle était à Paris lorsqu'elle a répondu à l'appel de la mission du 8 juillet. « C'était dans une démarche purement pacifiste. L'unique but de ce voyage était de visiter la Cisjordanie et d'aller à la rencontre de la population palestinienne, explique-t-elle. Je savais que je m'exposais à de lourds contrôles et même à un interrogatoire, mais je ne pensais pas que ça prendrait de telles proportions ».
Les autorités israéliennes détenaient une liste avec le nom de tous les passagers qui effectuaient ce séjour. « J'ai commencé à m'inquiéter. Mon nom se trouvait sur leur liste et j'étais considérée comme une terroriste potentielle ».
Une fois le groupe intercepté, vers 16 heures, Sophia s'attendait à subir un long interrogatoire avant de poursuivre son périple. « On leur a présenté les documents officiels fournis par les associations organisatrices. Notre seul mot d'ordre était d'être honnête sur le but de ce voyage et sur nos motivations ». Selon elle, tout devait se passer dans la plus grande transparence, c'était la volonté des organisateurs. « Et là, on nous a demandé d'attendre. Une demi-heure plus tard, on nous a conduits dans une petite salle à l'abri des regards. L'armée a usé de la violence sur quelques membres du groupe, peut-être pour nous impressionner. Mais personne ne nous a questionnés sur les raisons de ce voyage et aucune explication ne nous a été donnée ». À ce moment-là, Sophia ne se doutait pas que ce n'était que le début du cauchemar, un cauchemar qui allait durer quatre jours.
« Ils ont voulu nous faire signer un papier rédigé en Hébreux. Dans un premier temps, on a refusé et on a réclamé qu'il soit traduit en anglais. Mais ils ne voulaient rien entendre. Après quoi, ils ont embarqué une partie du groupe dans un bus dans lequel il y avait des cages. Comme il n'y avait plus de place, ils m'ont fait monter dans un fourgon complètement fermé et sans ventilation ». La jeune femme s'était préparée à faire face à des mesures sécuritaires drastiques, mais ces conditions de transport ont suscité chez elle un sentiment d'incertitude. « Un sentiment qui ne m'a plus lâché et qui a rythmé chaque instant de cette détention ».
À 2 heures, le convoi arrive à la prison de Ramlé. Argent et téléphone portable sont alors confisqués. Sophia est emprisonnée dans une cellule avec trois autres femmes, des mères de famille et même grands-mères. « On a appris qu'une juge israélienne avait autorisé notre groupe à aller à Bethléem mais la décision n'a pas été respectée ».
Après une journée en prison, le consul de France intervient auprès des ressortissants français pour les rassurer. « Malgré les multiples demandes, ils ne voulaient pas nous laisser appeler nos familles pour les avertir. J'ai alors commencé une grève de la faim, qui a pris fin le troisième jour. J'ai ensuite été autorisée à contacter ma mère mais notre conversation était sur écoute ». Le quatrième jour, une gardienne demande à Sophia si elle veut sortir de prison. « Bien sûr, je réponds oui et là, on m'escorte jusqu'à l'aéroport, j'embarque à bord d'un avion Air France. Destination : Paris. Mon passeport me sera remis qu'une fois sur le sol français ». En l'ouvrant, elle découvre qu'elle est désormais interdite de séjour sur le territoire israélien.
« Je me suis toujours intéressée au conflit israélo-palestinien. Et c'est la curiosité qui m'a poussé à saisir cette opportunité et effectuer ce voyage. Je voulais me forger ma propre opinion en me confrontant à la réalité. Je n'adhère à aucune association pro-palestinienne, je ne suis ni activiste, ni militante. Je n'avais pas l'intention de manifester là-bas. J'étais seulement motivée par un idéal de paix, comme la plupart des membres du groupe ».
Marion Negro
Source : leprogres.fr