07/04/2022 lecridespeuples.fr  13 min #205714

Les fausses nouvelles à Kiev annoncent un avril cruel

Commentaire de Sergueï Lavrov, Ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, aux médias sur la situation autour de l'Ukraine, Moscou, 5 avril 2022.

Source :  Ministère des Affaires étrangères de la Fédération de Russie

Ces derniers jours, la machine de propagande de l'Occident et de l'Ukraine vise uniquement à attiser l'hystérie autour de la séquence vidéo, qui, comme nous le comprenons, a été tournée par l'armée et les services de sécurité ukrainiens à Boucha dans la région de Kiev.

La fabrication flagrante et le caractère mensonger des affirmations concernant « certains crimes de guerre » commis par les forces militaires russes dans le cadre de l'opération spéciale militaire ont été prouvés plusieurs fois: au cours des briefings détaillés du ministère de la Défense de la Russie, au niveau de notre ministère et de la mission permanente auprès des Nations unies, où une conférence de presse spéciale a été tenue hier. Aujourd'hui notre représentant permanent Vassili Nebenzia a exposé en détail notre position, à présenté des preuves et a lu les déclarations des témoins oculaires lors de la réunion du Conseil de sécurité des Nations unies.

Une question se pose: quelle est la raison de cette provocation manifestement fausse, dont la véracité est impossible à justifier? Nous sommes enclins à croire qu'il s'agit d'un désir de trouver un motif pour faire échouer les négociations en cours et de le faire exactement au moment où une « lueur d'espoir » est apparue. Lors des négociations à Istanbul le 29 mars, pour la première fois pendant toute la période de contacts entre nos délégations, la partie ukrainienne a proposé sa vision écrite de l'accord concernant les parties relatives au statut de l'Ukraine et aux garanties de sécurité.

Pour la première fois, la partie ukrainienne a mis sur le papier sa disposition à proclamer son État neutre, non aligné est dénucléarisé. Elle s'est déclarée prête à refuser l'installation d'armes étrangères sur son territoire et d'organiser des exercices militaires impliquant des soldats étrangers sur son territoire sauf avec le consentement des garants du futur accord, y compris la Fédération de Russie. Les garanties de sécurité prévues par l'accord contribuent à la prise de conscience de la nécessité de négocier de sorte que l'élargissement de l'Otan à l'est, surtout vers l'Ukraine, soit totalement exclu et que la sécurité indivisible sur le continent européen soit assurée.

La partie ukrainienne a inscrit elle-même dans ce projet de dispositions fondamentales du traité que les garanties de sécurité, qui seront octroyées à l'Ukraine en cas d'entente, ne s'appliqueraient pas à la Crimée et au Donbass. Ici l'on voit aussi des progrès significatifs du point de vue d'une prise de conscience réaliste par Kiev du statut de ces territoires.

Conformément aux accords d'Istanbul, la partie russe a décidé de désamorcer la situation sur le terrain à titre de geste de bonne volonté. Tout d'abord dans les régions de Kiev et de Tchernigov. C'est à ce moment-là, trois jours après le retrait de nos militaires de la ville de Boucha, que la provocation dont nous parlons aujourd'hui a été organisée. Nous avons toutes les raisons de croire que cela a été fait pour détourner l'attention du processus de négociation et du fait que la partie ukrainienne avait déjà essayé de poser de nouvelles conditions et a commencé à faire « marche arrière » juste après la rencontre d'Istanbul.

Nous partons du principe que la communauté internationale est obligée de connaître la vérité sur la volonté de la partie russe de travailler de manière honnête et cohérente à la table des négociations. Si la délégation ukrainienne continue de déclarer la nécessité de certaines démarches supplémentaires de la part de la Fédération de Russie, de refuser catégoriquement (comme elle le fait actuellement) de discuter des objectifs de dénazification et de démilitarisation, de rétablissement des droits de la langue russe, de déclarer qu'il n'y a aucun problème avec la langue russe, les droits de la population russophone et la nazification de tous les domaines de la vie du pays, je ne crois pas que cela contribuera à la poursuite du processus de négociation.

Nous voudrions une fois de plus appeler ceux qui dirigent les actions de Kiev (nous savons qui ils sont) à assumer leur responsabilité pour la sécurité en Europe, l'avenir de l'ordre mondial et à assurer le respect des principes de la Charte des Nations unies. La Russie est prête pour cette conversation.

Pour parvenir à un réel progrès plutôt qu'à son apparence, nous insistons à ce qu'un signal sans ambiguïté soit envoyé à Kiev pour qu'il ne se mette pas au sabotage. Sinon nous risquons de répéter le destin des Accords de Minsk. Nous ne le ferons jamais.

Nous sommes préoccupés par le fait que la partie ukrainienne a décidé d'exiger la cessation de toutes les hostilités sous quelques jours au cas où un accord était conclu et que les forces militaires de la Russie quittent l'Ukraine.

Après cela il y aura prétendument un référendum, une ratification au parlement. Il est fort probable que si les résultats étaient négatifs, le processus de négociation devrait recommencer à zéro. Nous ne voulons pas jouer au « chat et à la souris ».

Nous ne voulons plus que le sort des Accords de Minsk se répète. Nous ne pouvons pas le permettre.

***

Allocution et réponses à la presse de Sergueï Lavrov, Ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, lors d'une conférence de presse conjointe avec Ahmed Aboul Gheit, Secrétaire général de la Ligue arabe, et Sameh Choukri, Ministre des Affaires étrangères de l'Égypte, Moscou, 4 avril 2022.

Source :  Ministère des Affaires étrangères de la Fédération de Russie 

Mesdames et messieurs,

Je voudrais remercier nos hôtes, les représentants du Groupe de contact de la Ligue arabe, qui a été convoqué en rapport avec la situation en Ukraine.

Notre conversation a été utile. Nous avons parlé en détail de l'émergence de la situation actuelle. Elle murissait pendant des années dans le cadre de la ligne de nos voisins occidentaux visant à créer en Ukraine une véritable « anti-Russie », comme l'a expliqué en détail le Président russe Vladimir Poutine.

Nous avons reproduit aujourd'hui l'historique et la chronologie de ces événements. Une nouvelle fois nous avons expliqué en détail les objectifs de l'opération militaire menée en Ukraine sur décision du Président Vladimir Poutine. Nous avons répondu à de nombreuses questions de nos amis, notamment concernant les perspectives du règlement de la situation actuelle: quelles sont les exigences pour cela et comment elle impacte les relations bilatérale, l'interaction avec le monde arabe, avec les pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord.

Ces relations ne sont pas influencées par la situation en soi, et par les sanctions complètement illégitimes, illégales et sans précédent de l'Occident contre la Russie. Elles portent sérieusement atteinte à l'économie mondiale, notamment aux pays consommateurs de produits agricoles, d'engrais et de bien d'autres, ce qui est directement lié aux liens commerciaux et d'investissement avec la participation de la Fédération de Russie.

Nous avons remercié la Ligue arabe pour ses décisions prises en rapport et pendant la crise ukrainienne, notamment pendant la réunion plénière de tous les membres de la Ligue arabe pendant la première moitié du mois de mars 2022. Nous nous sommes dits prêts à interagir et à continuer d'informer nos collègues de l'évolution de la situation, sur les perspectives pour atteindre les objectifs fixés.

Nous avons examiné la situation au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Nous avons accordé une attention particulière au problème palestinien qui n'est pas réglé depuis des années. Notre position est unanime. Nous prônons le règlement de toutes les questions relatives au statut définitif, y compris Jérusalem, uniquement par le biais des négociations directes entre les Palestiniens et les Israéliens.

Nous apprécions les efforts entrepris par l'Égypte et plusieurs autres membres de la Ligue arabe pour la réunification des Palestiniens et l'unité palestinienne. Nous trouvons que c'est un objectif primordial qui dépend des Arabes eux-mêmes.

Nous avons également parlé de la situation en Libye, au Yémen, en Syrie. Nous espérons que la question relative au retour de la Syrie dans la Ligue arabe sera réglée très prochainement. Cela consolidera la position de nos amis arabes dans toute la région.

Je voudrais remercier les représentants de la Ligue arabe, le Secrétaire général de la Ligue arabe Ahmed Aboul Gheit, le Ministre des Affaires étrangères de l'Égypte Sameh Choukri, pour leur participation à cet événement opportun.

Question: L'opération spéciale russe s'accompagne dans les médias d'une grande campagne occidentale de désinformation, d'infox. Le dernier épisode étant les images de Boutcha. Quelle est la raison des obstacles causés par le Royaume-Uni à l'organisation d'une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies sur Boutcha? Comment Moscou réagira-t-il à toute tentative de l'Occident d'entreprendre des démarches unilatérales hors du cadre du droit international? Quel est le mécanisme approprié pour examiner dûment le dossier humanitaire sur l'Ukraine basé sur les faits et les arguments, et non la désinformation et la falsification?

Sergueï Lavrov: En ce qui concerne la campagne de désinformation (malheureusement, ce n'est pas la dernière, de toute évidence, mais chronologiquement - l'épisode de Boutcha), elle accompagne aujourd'hui pratiquement tous les conflits. Nous y sommes habitués. Nous savons comment travaillent en Syrie les Casques blancs. Au fur et à mesure du succès des forces gouvernementales dans la lutte contre les terroristes, leurs superviseurs occidentaux ont été contraints d'évacuer les Casques blancs. Ils ont convaincu la Jordanie d'accueillir plusieurs centaines de ces gens. Ils ont promis de les envoyer d'ici deux mois en Occident: en Allemagne, au Canada, au Royaume-Uni. Mais ils n'ont pris pratiquement personne, car ils ont compris que ces individus étaient de véritables extrémistes travaillant main dans la main avec l'État islamique (Daech) et d'autres groupes terroristes.

Il y a eu plusieurs exemples d'infox flagrantes pendant l'opération militaire en Ukraine. Elles servaient immédiatement à la campagne de propagande, aux condamnations indignées. Quelques jours plus tard, quand la vérité faisait surface, plus personne en Occident ne voulait en parler. Nous dénoncerons de telles infox. Nous avons percé à jour, début mars, la situation qu'on cherchait à faire passer pour une tragédie dans une maternité de Marioupol.

Le 30 mars déjà, les forces militaires russes dans le cadre de la reconfiguration de leur présence ont quitté la zone de la ville de Boutcha. Dans les trois jours qui ont suivi, le maire de la ville disait à la télévision que la ville revenait à la vie normale. Les forces armées ukrainiennes y sont venues, elles montraient les rues où il n'y avait aucun corps. Et trois jours plus tard ils ont visiblement décidé d'organiser une telle mise en scène.

Je rappelle qu'encore hier nous avons exigé de convoquer une réunion du Conseil de sécurité des Nations unies. Nos collègues britanniques qui président actuellement le Conseil de sécurité ont refusé de le faire. Notre tentative d'aujourd'hui a également échoué. Ils prétendent que demain ils prévoyaient eux-mêmes d'examiner la situation en Ukraine sous tous ses aspects. En connaissant la diplomatie britannique, j'imagine que l'objectif consiste à dissoudre cette infox concrète dans la ville de Boutcha dans des réflexions démagogiques sur la nature de la crise ukrainienne. Mais nous organiserons tout de même aujourd'hui une conférence de presse à New York au niveau de notre Représentation permanente. Nous y présenterons les informations détaillées révélant la véritable nature des événements dans la ville de Boutcha que nos collègues occidentaux cherchent à présenter aujourd'hui comme une preuve des crimes de guerre de la Fédération de Russie.

Nous insisterons pour que les crimes commis par l'armée ukrainienne menée par les bataillons nationalistes néonazis ne restent pas impunis.

Nous travaillons avec nos amis et collègues pour appliquer les normes appropriées du droit international humanitaire et pour que ces accusations soient fondées sur des preuves concrètes irréfutables. C'est précisément ce que nous ferons, contrairement à ceux qui fabriquent ces faits.

Question: Récemment vous avez parlé des progrès émergents dans les négociations russo-ukrainiennes concernant la neutralité de l'Ukraine. Au vu des nouvelles circonstances, quelles sont les chances de résoudre le conflit de manière pacifique et de parvenir à des accords qui par la suite seront consignés lors du sommet des deux présidents?

Sergueï Lavrov: À l'issue du cycle des négociations à Istanbul le 29 mars, on a aperçu une manifestation de réalisme dans la position de la délégation ukrainienne en ce qui concerne les moyens d'assurer la sécurité de l'Ukraine. Les représentants de Kiev ont réalisé qu'il était impossible de s'assurer des garanties de sécurité au sein de l'Otan et que l'adhésion à l'Alliance devait être oubliée. Il y a plus de réalisme quant à la nécessité d'assurer le statut de neutralité de l'Ukraine, ainsi que son statut dénucléarisé dans le traité étant donné le « flirt » avec ce sujet que l'on a pu entendre de la part des dirigeants de l'Ukraine au cours des derniers mois.

À présent il y a beaucoup plus de compréhension dans la position de la délégation ukrainienne sur la situation concernant le statut de la Crimée, des républiques populaires de Donetsk et de Louhansk. Il reste à savoir comment ces « notes » vont être interprétées sur le « papier » du traité. Les contacts se poursuivent par vidéoconférence. Les délégations travaillent de façon assez intensive. Au moins de notre côté un tel travail est en cours.

En ce qui concerne les chances. Il y a toujours une chance. J'en ai déjà parlé plusieurs fois. Nous sommes disposés à réaliser toutes ces chances. Les objectifs de notre opération ont été déclarés par le Président Vladimir Poutine. Nous faisons tout notre possible pour qu'ils soient consignés dans le traité qui est actuellement en cours de discussion et de préparation. J'espère qu'il sera finalement mis au point et finalisé dans toutes ses dispositions.

M. Poutine a déclaré à plusieurs reprises qu'un sommet des présidents de l'Ukraine et de la Russie pourrait avoir lieu lorsqu'on aura vu le résultat à consolider.

Question: Comment les négociations russo-ukrainiennes influencent-elles le déroulement de l'opération spéciale en Ukraine?

Sergueï Lavrov: Ce ne sont pas les négociations qui influencent le cours de l'opération mais les « acteurs » extérieurs qui essayent d'empêcher ces négociations et de maintenir les combats sur le terrain le plus longtemps possible. Nous savons qui donne de tels « conseils » à nos voisins ukrainiens. Cela est fait à des fins inappropriées qui n'ont rien à voir avec les intérêts du peuple ukrainien et la sécurité de l'Ukraine et de l'espace OSCE, de notre région européenne.

J'espère que ceux qui dirigent la délégation de Kiev au cours des pourparlers mentionnés commencerons à s'inspirer de leurs propres intérêts nationaux et de ceux de leur peuple et qu'ils n'écouteront pas des « conseillers » venus de loin qui ne cherchent parfois qu'à observer comment la situation de crise va s'aggraver.

Question: Le Président des États-Unis Joe Biden a traité le Président da la Russie Vladimir Poutine de « criminel de guerre » et a appelé à demander qu'il soit jugé pour des crimes de guerre. Qu'est-ce que cela signifie dans le cadre de la réputation internationale de la Russie?

Sergueï Lavrov: Tout d'abord, cela veut dire que de nombreux hommes politiques américains, qui ont été à l'origine de la guerre en Irak sous les prétextes bien connus, qui ont dévasté la Libye avec leurs partenaires de l'Otan, qui ont envahi la Syrie, ont des problèmes de conscience. Je pense que vous avez entendu l'administration de Joe Biden commenter ces déclarations plus tard, expliquant que « ce n'était pas ce qu'il voulait dire ».

Nous souhaitons connaître le point de vue du peuple russe sur cette situation (et toute autre). Dans quelle mesure il comprend les missions que les forces militaires remplissent. Le plus important c'est qu'il se rend compte qu'il ne s'agit pas du tout de l'Ukraine mais du fait que l'Occident collectif, qui s'est définitivement et incontestablement rassemblé sous le « toit » de Washington, est le modèle même du monde unipolaire qu'il voudrait préserver coûte que coûte (plutôt par des moyens mensongers).

Il s'agit du fait que ce « souverain » du monde unipolaire peut tout se permettre. Les autres n'ont même pas le droit de penser à assurer leur propre sécurité. Ce « souverain » a créé des situations autour de nos frontières et celles de ses concurrents, que nous sommes obligés de régler maintenant, y compris par des méthodes assez dures.

Les appels et les conjurations de longue date à respecter les accords sur l'indivisibilité de sécurité se sont heurtés à la manifestation d'une absence totale de la volonté de l'Occident de discuter de quoi que ce soit. Cette arrogance qui a déferlé à tous les niveaux possibles ne finira pas bien. Ce n'est dans l'intérêt d'aucun peuple dans le monde, y compris les pays occidentaux eux-mêmes.

Nous sommes prêts à une conversation honnête. Je dis bien, honnête. Nous sommes habitués à un jeu déloyal de la part de nos partenaires. Ce n'est plus sérieux. C'est un jeu habituel qui consiste à designer les coupables et à affirmer sa propre grandeur.

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