Ce qu'il y a de frappant dans la crise que traverse le rouble, c'est le contraste entre la gravité de l'évènement, avec tout ce que cela sous-entend, et « l'inquiétude tranquille » des autorités de Moscou, qui passerait presque pour de la passivité.
N'importe quel pays qui verrait sa monnaie dégringoler ne serait-ce que de quelques points serait sur pied de guerre, mobilisant tout l'arsenal dont il dispose pour arrêter les dégâts. La Russie, elle, avec une chute de plus de la moitié de la valeur de sa monnaie, se contente d'observer, faisant semblant de râler un peu, mais sans plus. La Banque Centrale Russe fait bien quelques gestes, mais rien de radical, juste ce qu'il faut pour maîtriser la situation.
Dans le contexte actuel de guerre larvée contre la Russie avec ses sanctions et contre-sanctions, la chute brutale du rouble et la baisse constante du prix du pétrole sont perçues comme autant de coups portés à l'économie russe. Or, en y regardant de près, il semble difficile de croire que ces deux phénomènes soient le fait de quelqu'un qui chercherait à porter un coup à l'économie russe. C'est comme si quelqu'un envoyait un missile à son ennemi tout en lui offrant un bouclier anti-missile pour s'en protéger. Si les Etats-Unis ou leurs alliés du golfe avaient planifié la baisse du prix du pétrole, leur intérêt serait d'empêcher la Russie de compenser ses pertes par la dépréciation du rouble.
Il semble donc que la chute du rouble ne soit pas causée par une attaque extérieure. En tout cas, elle n'arrange en rien les affaires des ennemis de la Russie. Le gouvernement russe pourrait-il en être l'origine ?
Récemment, en plein milieu des turbulences que traverse le rouble, on a assisté à un phénomène curieux. L'homme le plus riche de Russie, Alicher Ousmanov, vient de rapatrier tous ses actifs, sous couvert de respect des nouvelles mesures de lutte contre la fuite des capitaux. On se serait attendu à un autre comportement de la part de quelqu'un de cette envergure voyant s'effondrer la monnaie qui sera désormais la base de son business.
Vladimir Poutine et Alicher Ousmanov
D'autre part, durant les derniers mois, Vladimir Poutine a effectué des voyages un peu partout dans le monde et a rencontré quasiment tous ses partenaires, avec lesquels des dizaines de contrats ont été signés. Un des accords récurrents à chacune des rencontres est la possibilité d'effectuer les paiements en roubles ou en monnaie locale.
Nous pourrions, dès lors imaginer le scénario suivant. La Russie laisse chuter sa monnaie le plus bas possible. Au moment voulu, avec ses partenaires, ils rachètent tous les roubles en circulation. Le rouble étant adossé sur l'or, les partenaires pourront le réutiliser à sa vraie valeur dans leurs transactions avec la Russie. Pour l'instant, le prix bas du pétrole semble être un obstacle à la réalisation d'un tel projet, si jamais il existe. Mais, projet ou pas, le calme des russes ne veut dire qu'une chose ; ils maîtrisent la situation.
Avic - Réseau International