27/06/2019 reseauinternational.net  6min #158368

 Golfe d'Oman : deux navires pétroliers auraient été attaqués, la marine américaine a reçu des Sos

Le jeu des mini-blocs peut-il éviter le pire ou au contraire l'accélerer?

Une brève réflexion sur la tension actuelle dans le Golfe et au Moyen-Orient

L'exacerbation des tensions entre les États-Unis d'Amérique et la République Islamique d'Iran est aggravée par une nouvelle forme de surenchère non-verbale et relevant plus de la symbolique de la puissance figurée que d'une rivalité géostratégique.

C'est l'échec patent de la guerre au Levant, marquant la faillite des révolutions colorées 2.0 et l'inadéquation des guerres hybrides 3.0 qui a exacerbé à son paroxysme la tension actuelle entre Washington, dont la politique étrangère est otage des intérêts stratégiques israéliens et saoudiens, et Téhéran et ses alliés dont ceux acquis durant la longue guerre en Syrie.

Un conflit militaire direct entre les États-Unis d'Amérique et l'Iran comporte beaucoup trop d'impondérables et aura des conséquences totalement imprévisibles en raison de la reconfiguration des alliances régionales dans le sillage des polarisations intervenues lors de la longue guerre syrienne.

Le bloc A comporte les acteurs suivant :

  1. Arabie Saoudite ;|
  2. Bahreïn ;|
  3. Émirats Arabes Unis|
  4. États-Unis d'Amérique|
  5. France|
  6. Jordanie ;|
  7. Israël ;|
  8. Maroc ;|
  9. Royaume de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord|
  10. Les autres pays membres de l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN)|

Le bloc B n'est pas totalement antagoniste du Bloc A mais comporte des pays désignés comme hostiles à l'Empire (il y a une décennie, la tactique de l'État paria ne pouvait s'appliquer que sur des pays faibles et dans l'incapacité de se défendre, ce qui n'est plus le cas en 2019) :

  1. République Populaire de Chine ;|
  2. République Démocratique et Populaire de Corée ou Corée du Nord ;|
  3. Cuba ;|
  4. République Islamique d'Iran ;|
  5. République Arabe de Syrie ;|
  6. Tous les pays réellement non-alignés|

Ce schéma dichotomique très sommaire ne reflète ni la réalité ni la complexité des rapports de force et encore moins les véritables interactions ou implication de pays pivots jouant un rôle assez important dans la dynamique inhérente au phénomène conflictuel dans un ensemble régional plus ou moins défini. L'analyse des positions ou des postures réelles ou simulées de pays comme l'Irak dans le conflit syrien et le bras de fer entre Téhéran et Washington relève de l'impossible tant sont grandes les divergences de fond, les clivages et la multiplicité des allégeances au sein de l'appareil d'État irakien en général et des différentes composantes de la société de ce pays en particulier. Le même constat pourrait s'appliquer à l'Égypte malgré son appartenance au bloc A, ou encore au Liban dont les spécificités, les influences exogènes et les contradictions internes propres à ce pays le rapprochent à la fois du camp A tout en étant un membre actif du bloc B par l'entremise du mouvement politico-militaire du Hezbollah, l'une des meilleures forces combattantes aux côtés de l'Armée syrienne dans le conflit du Levant.

Cependant, aussi complexes que soient les postures des pays entraînés dans un jeu non déclaré d'alliances et de contre-alliances, aucune n'est aussi complexe que celle de la Turquie.

De par son statut de pays membre à part entière de l'OTAN, la Turquie est nominalement et théoriquement dans le bloc A. De par son rôle dans la mise en œuvre des stratégies militaires de l'Empire au Levant également. Ankara a joué en effet un rôle primordial dans la guerre en Syrie en collaboration active avec tous ses alliés de l'Alliance: Destruction de l'intégrité territoriale de la Syrie, acheminement de combattants étrangers et d'armes vers la Syrie avec la complicité des autres pays de l'OTAN et non-OTAN, exploitation, régulation et militarisation du flux de réfugiés fuyant la guerre en Syrie vers l'Europe occidentale en passant par l'Europe orientale et méridionale en échange d'Accords privilégiant Ankara, et, point de loin le plus important, latitude à exploiter les incohérences et les limites de la politique "impériale" au Moyen-Orient pour élaborer son propre agenda régional en se basant sur le très riche passé de l'Empire Ottoman. La Turquie est donc à la fois un acteur du bloc A mais également un acteur semi-autonome poursuivant sa propre stratégie dans une région qu'elle considère comme sa profondeur stratégique.

Loin des considérations purement spéculatives, l'élite politique US semble figée et incapable de se renouveler lorsqu'il s'agit de politique étrangère. Les sanctions économiques ont très durement frappé l'Iran et ont failli désintégrer sa société et son économie. C'est la focalisation sur l'Iran et son ciblage qui ont paradoxalement réconcilié une population iranienne meurtrie par la crise avec ses dirigeants, même s'ils n'ont jamais fait l'unanimité aussi bien au sein du régime que parmi les principales composantes de la population. Cet aspect continue à échapper aux observateurs US qui ne prennent en considération les sanctions que sous un angle relatif à la stratégie de changement de régime suivant le cycle crise-désapprobation-perte du consensus-légitimité amoindrie ou disparue-révolte ou révolution permettant d'intervenir.

Les sanctions imposées à l'Iran ont produit l'effet inverse. Un moment ébranlé par des cyberattaques inédites et une crise socio-économique très grave, l'Iran n'a pas On oublie souvent que les images choc de l'invasion de l'Irak par les États-Unis et notamment trois ou quatre photographies du supplice des détenus de la sinistre prison d'Abou Gharib près de Bagdad ont été largement diffusées en Iran, y compris le long des autoroutes et que cela a convaincu le dernier pro-libéral que Washington n'intervient pas dans d'autres pays pour de nobles objectifs.

Mais revenons toutefois à la dynamique des mini-blocs et des grands blocs. L'effet d'entraînement des alliances comme celui ayant amené la première guerre mondiale semble a priori exclu au première abord. Ces jeux de blocs vont-ils contribuer à éviter ou au contraire, à accélérer l'éclatement d'un grand conflit aux conséquences très graves sur la paix et la sécurité mondiales?

Ce jeu n'est-il pas un peu plus subtil avec sa somme de calculs nationaux et d'intérêts bien précis?

C'est à voir. Sinon on se dirige tout droit vers un scénario analogue à celui d'OK Corral...

source: strategika51.org

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