30/06/2019 elcorreo.eu.org  8 min #158520

Trump aurait ordonné des frappes sur l'Iran avant de se raviser in extremis

Union Européenne : y a-t-il quelqu'un ?

Tandis que les États-Unis flirtent avec une nouvelle guerre dans le Golf, l'Union Européenne n'est ni là, ni attendue.

Nous ne savons pas si la  guerre de Bolton contre l'Iran verra le jour, mais ce que nous savons c'est que l'UE « ne sait pas, ne répond pas ». Chaque crise internationale nous rappelle l'inefficacité du club européen : l'UE elle n'y est pas, ni on l'attend, et quand elle y est, c'est presque pire parce que, active ou passive, elle se met du côté de ceux qui lancent les bombes et qui sont engagés à incendier notre planète surchauffée dans un chapelet de pétards final.

La semaine dernière, et selon sa propre version, Donald Trump a ordonné une attaque pour punir les iraniens d' avoir abattu l'un de leurs drones, mais ensuite et à la dernière minute il a fait marche arrière. Nous avons été, et nous sommes, en train de flirter avec une nouvelle guerre, mais l'UE ne se considère pas concernée. Encore heureux que vendredi se soit tenu un sommet durant lequel il a été de mettre la « politique extérieure » parmi les plats principaux de son « agenda stratégique »...

La Chancelière Merkel a dit que pendant le sommet de vendredi, les « conseillers de politique extérieure » ont attentivement suivi le sujet de l'Iran, mais eux, les chefs d'état et de gouvernement, ont à peine été au-delà de balbutier quelques mots sur la nécessité d'une « solution politique ». Quand ils ont demandé au Président du Conseil Européen, Donald Tusk, s'il y aurait une déclaration à ce sujet, il a répondu en disant qu'il n'y avait pas de raison d'émettre un communiqué... Qui se souvient que l'UE et l'Iran sont encore unis par un accord signé en 2015 sur ce que tout le monde,y compris Theresa May, disait qu'il était si bien et que les iraniens tenaient scrupuleusement ce qu'avait été signé.

Comme ils se rappelleront, la crise a commencé quand des gens comme John Bolton qui aux États-Unis entraine une génération en essayant d'agresser militairement l'Iran, ont obtenu le retrait unilatéral des États-Unis de cet accord excellent. Mais les États-Unis non seulement se sont retirés, mais ont augmenté leurs sanctions contre l'Iran - qui est avec de l'eau jusqu'au cou et qui exporte actuellement quatre fois moins de pétrole qu'en 2017 - et a établi l'extraterritorialité de sa législation en menaçant toutes les entreprises qui osaient faire des affaires avec ce pays. L'UE, ou plutôt ses trois puissances principales (la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne), ont pris leur temps mais enfin sont convenus de la création d'un « Instrument in Support of Trade Exchanges » (INSTEX) en vue d'éviter les sanctions US à travers le contrôle de Washington du système financier et bancaire international. Telle fut la manière de défendre le «  commerce légitime européen avec l'Iran », mais les entreprises européennes n'ont pas fait trop de crédit à un geste si gaillard, elles l'ont identifié tout de suite comme un tigre de papier et sont sorties en débandade du marché juteux iranien.

En mai le Président iranien Hassan Ruhani a établi un délai de 60 jours pour que des autres signataires de l'accord abandonné des États-Unis (les Européens, la Chine et la Russie) établissent des mesures effectives pour combattre le chantage de l'extraterritorialité du « dur « de Washington en matière d'exportation de pétrole et d'activités bancaires. Ce délai expire la semaine prochaine.

Du côté de l'INSTEX le sujet ne semble pas aller très sérieusement : bien qu'il soit entré en vigueur, il continue sans fonctionner et il semble qu'il s'appliquera seulement au commerce des aliments et des médicaments, mais s'il c'était plus et affecterait ce que importe vraiment, l'UE se situerait dans un conflit ouvert avec les États-Unis, quelque chose d'impensable.

Non seulement cela ne va pas arriver, mais, par exemple la Grande-Bretagne va envoyer un groupe militaire au Golfe Persique pour renforcer sa petite armée, subalterne à l'Impériale, détachée là-bas. Le ministère britannique de l'extérieur a été le premier à suivre la version étasunienne selon la quelle ce sont les iraniens qui ont attaqué le 13 juin un pétrolier dans des eaux du Golfe. « Nous faisons un appel d'urgence à l'Iran pour cesser toute activité déstabilisatrice », a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Jeremy Hunt. Quand le leader travailliste Jeremy Corbyn a osé mettre en doute le sujet et a accusé les étasuniens de commencer l'escalade de tensions, les médias se sont jeté à sa gorge.

Les choses ne sont pas meilleures à Berlin, où lors de la dernière conférence de presse du gouvernement il semblait être admis que les iraniens sont les responsables de la tension créée dans la région. Pendant ce temps, c'est depuis l'Allemagne, depuis la base de Ramstein, que sont dirigées les attaques de drones des États-Unis qui tuent des gens partout dans le monde. Pour cette raison, samedi il y aura une manifestation de protestation à Ramstein.

Les motifs de guerre de Washington continuent de paraître grossièrement obscurs, tant dans ce qui est relatif aux attaques des pétroliers qu'au sujet du drone abattu. L'armateur japonais de l'un des pétroliers insiste sur le fait que son bateau fût attaqué par un « objet volant », peut-être un drone, et non par la pose de mines dans la coque comme l'affirme la version US. Au sujet de l'appareil abattu, l'Iran dit qu'il l'a été sur son territoire, tandis que l'administration US affirme qu'il a été détruit en dehors de l'espace aérien iranien. La question change peu, car la pratique internationale établit que tout appareil qui s'approche de l'espace aérien d'un pays doit s'identifier et s'il ne le fait pas peut être abattu. Aux États-Unis cette « zone d'identification » est de 200 milles (322 kilomètres), dans tous les cas il ne semble pas que les iraniens aient fait quelque chose d'extraordinaire.

Quoi qu'il en soit, au sein des États-Unis la guerre n'est pas particulièrement populaire. Un sondage récemment divulgué par Hill-HarrisX du dernier week-end montre 58 % de partisans pour éviter un choc militaire, dont 48 % qui demandent « une action diplomatique ». Seulement 5 % des étasuniens se déclarent en faveur de la guerre, avec un autre 19 % de partisans pour « des attaques restreintes ». Ce ne sera pas l'UE qui va compliquer cette nouvelle folie, si elle parvient à se faire jour.

Rafael Poch de Feliu* pour son blog personnel  Rafael Poch de Feliu

* Rafael Poch-de-Feliu (Barcelone, 1956) a été durant plus de vingt ans correspondant de « La Vanguardia » à Moscou à Pékin et à Paris. Avant il a étudié l'Histoire contemporaine à Barcelone et à Berlin-Ouest, il a été correspondant en Espagne du « Die Tageszeitung », rédacteur de l'agence allemande de presse « DPA » à Hambourg et correspondant itinérant en Europe de l'Est (1983 à 1987).  Blog personnel. Auteur de : « La Gran Transición. Rusia 1985-2002 » ; «  La quinta Alemania. Un modelo hacia el fracaso europeo » y de «  Entender la Rusia de Putin. De la humiliación al restablecimiento ».

Traduit de l'espagnol pour  El Correo de la Diaspora par : Estelle et Carlos Debiasi

 El Correo de la Diaspora. Paris, le 30 juin 2019

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