13/02/2020 3 articles reporterre.net  7 min #168975

Le groupe financier Blackrock a été envahi par des activistes écologistes

Les jeunes activistes du climat assument l'occupation de Blackrock

Mercredi 12 février, à midi, une quarantaine de personnes se sont rassemblées au compte-goutte devant le commissariat du 13e arrondissement de Paris. « Qu'est-ce que vous faites là ? » demandait une policière. « Nous sommes là pour soutenir les activistes gardés à vue à la suite de l' occupation de BlackRock », a répondu un activiste de  Youth for Climate.

Lundi, une centaine de militants  avaient occupé le siège parisien du gestionnaire d'actifs BlackRock. Ils répondaient à l'appel du mouvement Youth for Climate, épaulé par diverses organisations écolos et de Gilets jaunes. [1]

Lors du rassemblement de soutien.

« Cette action était une manière de montrer notre soutien aux grévistes et de lutter contre les activités  écocides de BlackRock, a expliqué à Reporterre Émilie, 20 ans, et membre de Youth for Climate. La réforme des retraites va largement profiter à BlackRock, qui a intérêt à ce que l'on passe à un système de capitalisation, et en plus les investissements de BlackRock sont dirigés vers des entreprises polluantes comme Vinci ou Total. »

Les activistes ont pénétré dans Le Centorial, le bâtiment abritant les bureaux de BlackRock, aux alentours de 10 h, lundi. Au centre du bâtiment, une banderole « Respect existence or expect resistance » (En français : « Respectez l'existence ou attendez-vous à la résistance ») a été déployée. Afin de se prémunir d'une intervention policière, les issues avaient été barricadées et les employés de BlackRock ont pu quitter les lieux par les issues de secours. « On a souhaité mettre BlackRock hors d'état de nuire pendant plusieurs jours, avec un consensus d'action plus radical qu'à l'accoutumée », précise Émilie. Les activistes sont restés plus de deux heures, qu'ils ont occupées à taguer des messages sur les murs, au sol et sur le mobilier.

Au sortir de leur action, peu avant 13 h, les militants ont été nassés par les forces de l'ordre. Dixsept personnes, dont quatre mineurs, ont été interpellées pour participation à une manifestation non déclarée et dégradation. Treize activistes ont été placées en garde à vue, dont deux mineurs. Ils ont tous été libérés entre mardi 11 février au soir et mercredi 12 février au soir. Dix ont écopé de rappels à la loi, avec un stage de citoyenneté pour les deux mineurs. Un autre devra s'acquitter d'une amende de 300 euros, et les deux autres gardés à vue sont sortis sous contrôle judiciaire en vue d'une audience. Maître Hugo Partouche, avocat d'une partie des activistes et membre du cabinet Vigo, a déclaré à Reporterre que les dossiers étaient « très légers ». « Ce n'est pas un hasard qu'il y ait essentiellement des rappels à la loi », a-t-il poursuivi.

« Cette répression me semble disproportionnée par rapport à ce qu'on a fait »

Devant le commissariat du XIIIe, mercredi midi, les soutiens trouvaient le temps long. « 48 heures de garde à vue, c'est traumatisant, ça ne s'efface pas comme ça, a dit Émilie, qui a elle-même passé 30 heures en garde à vue, de lundi à mardi soir. À Youth for Climate, on n'avait jamais eu de garde à vue. Cette répression me semble disproportionnée par rapport à ce qu'on a fait. On a pris soin de discuter avec les employés de BlackRock, de ne pas les brusquer. On n'a pas attaqué les personnes. Mais on commence à les embêter. »

À ses côtés, Carmen, 14 ans, brandissait un drapeau rouge estampillé Youth for Climate. Lundi, elle a participé au blocage de BlackRock :« Quand on s'engage dans ce genre d'action, on sait à quoi s'attendre. J'étais prête à aller en garde à vue, à écoper d'une amende, voire d'une peine de prison, parce que pour l'instant, nous n'avons pas d'avenir. Quand j'aurai 25 ans, dans quelle état sera la planète si nous la leur laissons ? Dans ces conditions, je m'en fous d'aller en garde à vue. »

L'action de ces jeunes activistes a suscité un déferlement de commentaires dans les médias, dans les heures et les jours qui ont suivi. D'emblée, des sites internet ont parlé de  « saccage » et de  « dévastation » des bureaux de BlackRock.

Dans l' « édito éco » de mardi, sur France Inter, le chroniqueur Dominique Seux a estimé que « l'opération de ces anarchistes qui haïssent le capitalisme mais adorent Facebook est bien sûr condamnable, mais elle illustre surtout le glissement vers une violence dangereuse ». Il a aussi défendu la prise de position de BlackRock contre un investissement minier de Siemens en Australie et conseillé aux militants de manifester « devant les ambassades des États-Unis et de Chine », « et en Chine même - parce que c'est là que le passif climatique est le plus lourd ».

Sur  le plateau de LCI, les commentateurs ont parlé de « vandalisme », de « radicalisation du mouvement » devant un membre de Youth for Climate qui a, lui, répliqué que le mouvement assumait cette radicalisation.

« Qui sont les véritables vandales ? BlackRock, qui participe à l'aggravation des perturbations écologique, ou nous ? »

Sur Twitter, Daniel Schneidermann, fondateur du média  Arrêt sur images a  réagi :

Fascinant tribunal d'adultes, qui juge cet adolescent coupable d'avoir graffité les murs d'un bureau ». « Dégradation des biens », répètent-ils. S'ils savaient quelles "dégradations" nous attendent tous... »
Fascinant tribunal d'adultes, qui juge cet adolescent coupable d'avoir graffité les murs d'un bureau. "Dégradation des biens" répètent-ils. S'ils savaient quelles "dégradations" nous attendent tous...

Après avoir participé à l'action violente contre Blackrock, ce militant de Youth for climate revendique la radicalisation de son mouvement, menace de nouvelles actions mais explique "ne pas s'autoriser à porter atteinte à l'intégrité des personnes"...#FascismeVert

« On se doutait que notre action ne ferait pas l'unanimité, a dit à Reporterre Vipulan, 16 ans, sur le parvis du commissariat du XIIIe arrondissement. On savait qu'on les dérangerait, mais en réalité qui sont les véritables vandales ? BlackRock, qui participe à l'aggravation des perturbations écologiques, ou nous qui dégradons des biens matériels avec des tags ? » « Ils précipitent chaque jour notre monde dans un changement climatique plus fort, et mettent en péril notre avenir, a embrayé Émilie. C'est ça la violence. » « Peut-être que ceux qui nous incriminent aujourd'hui nous comprendrons mieux dans quelques années », a poursuivi Vipulan en faisant référence aux actions autrefois controversées d'Act Up, association de lutte contre le VIH-Sida.

 Sur France Inter Julien Bayou, secrétaire national du parti Europe Écologie-Les Verts, a dit « oui à la désobéissance civile », déclarant qu'il croyait à ces occupations, mais aussi qu'elles devaient « être pacifiques et joyeuses, sans violences ».

« On a essayé d'être pacifiques, joyeux et sans violences, on a essayé de se faire entendre par d'autres modes d'action, les grèves, les manifestations, la désobéissance civile non-violente... mais ça n'a jamais marché ! s'est offusquée Carmen. Dès qu'il y a quelques tags, c'est plus médiatisé, on parle de nous... » « On sait qu'on n'a plus rien à attendre de BlackRock, qu'ils ne vont pas agir, a estimé Vipulan, pour qui l'action était proportionnelle à l'inaction du gestionnaire d'actifs. « Mais je pense aussi qu'il faut une complémentarité des tactiques. On est impliqués dans l'organisation de la grève internationale pour le climat du 13 mars prochain et on participe à des actions de sensibilisation, dans les écoles, au changement climatique et à l'extinction des espèces », a promis le lycéen, qui s'est fait remarquer par un discours sur l'écologie, le mardi 4 février, dans l'émission le Grand Oral sur France 2.

"Unissons et soyons cette goutte d'eau qui fera déborder ce vase d'indignation."
Voici mon premier discours durant #LeGrandOral mardi soir!
Bravo à tous les participants qui ont été exceptionnels, et merci à @CharlesHaroche sans qui cette aventure n'aurait pas été possible.
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