20/03/2020 3 articles cadtm.org  8 min #170627

Série (1/4) : Comment fonctionne le virus

Visuel insipré de « La gauche anticapitaliste »

Ce texte fait partie d'une série de quatre articles. Ceux-ci seront mis à jour suivant l'évolution de la situation. N'hésitez pas à nous envoyer vos éventuelles idées ou remarques à info(at)cadtm.org.

Les autres articles de la série :
 Renforcer les solidarités en cours (2/4)
Quelques mesures à prendre et qui y faire contribuer (3/4) - à venir
> Régler nos comptes et tirer des leçons (4/4) - à venir

Les effets de la Covid-19 [1] illustrent à quel point le système économique actuel nous rend fragiles. Face aux basculements écologiques en cours, cette pandémie n'est qu'un avertissement. Un avertissement dont il faut nous saisir.

En parallèle de cette pandémie (partie 1), une crise financière a démarré [2]. Les détenteurs de capitaux sont en train de négocier avec les gouvernements et les « corps intermédiaires » (dont les syndicats) pour maintenir au maximum les bénéfices qu'ils avaient prévus pour 2020. Les contradictions inhérentes au capitalisme sont en train de nous exploser à la figure et la manière dont nous allons réagir à ce « premier » exercice grandeur nature va être déterminante pour nos avenirs.

Nous aurions dû stopper la production non essentielle depuis la semaine dernière et mettre en place une allocation de quarantaine, sous la forme d'un impôt de crise

Cet avenir et le présent que nous sommes en train de traverser ne sont pas vécus de la même manière par tout le monde. Les plus précaires travaillent, malgré le manque criant de moyens, pour permettre le confinement (voire la fuite temporaire) des autres. Nous aurions dû stopper la production non essentielle depuis la semaine dernière et mettre en place une allocation de quarantaine, sous la forme d'un impôt de crise (partie 2). Les oublié·e·s sont encore plus soumis à l'injonction de disparaître qu'en temps « normal ».

Heureusement, les solidarités et luttes en cours font toute la différence (partie 3), et elles vont déterminer à quoi ressemblera « l'après Coronavirus ». Cette expérience sera utilisée par le pouvoir en place comme «  stratégie du choc » (à l'image de ce qu'on observe en France), mais elle sera aussi l'occasion d'un bouleversement de nos rapports aux autres et au reste du vivant (partie 4).

Comment fonctionne la COVID-19 ?

Ce 11 mars, l'OMS a déclaré que la Covid-19 passait du stade d'épidémie à celui de pandémie. En Belgique, nous n'avons plus vécu cette situation depuis une centaine d'années (la grippe H1N1 de 2009 était différente dans le sens où elle était moins contagieuse et où notre système immunitaire y était moins étranger), il est donc normal qu'une partie d'entre nous ait assimilé trop lentement l'enjeu.

Nous connaissons encore mal le virus à ce jour, c'est pourquoi une partie des informations ci-dessous restent conjuguées au conditionnel et seront modifiées au fur et à mesure. Il ne s'agit pas non plus de livrer les dix commandements à suivre, mais bien de s'approprier le sujet et d'en produire nos analyses en tant que mouvements sociaux.

Le but est de limiter la vitesse de la pandémie

Il ne s'agit pas de se faire croire que les bonnes réactions auront pour résultat que peu de personnes seront atteintes, mais bien d'atténuer au mieux le rythme de la contagion.

D'une part, le réel afflux de personnes à hospitaliser commencera la semaine prochaine, si elles sont trop nombreuses trop vite les soins intensifs, postes de réanimation, assistances respiratoires seront saturés et cela empêchera de prendre en charge d'autres personnes (comme on l'a vu dans d'autres pays). D'autre part, si trop de personnes tombent malades, cela peut paralyser involontairement de nombreuses activités, certaines qui ne sont pas essentielles mais aussi d'autres dont nous dépendons directement.


Philippe Devos (président du Syndicat belge des Médecins ABSYM et membre du personnel hospitalier du CHC Liège)
 

La Covid-19 a actuellement un taux de létalité moyen de plus ou moins 3%

Mais ce taux est très variable (de moins de 1% à 8%) en fonction des mesures prises et du caractère solide ou détricoté des services publics. En  Europe, il est pour l'instant de 4,50 % en moyenne.

À ce jour (19 mars), les chiffres disponibles indiquent 8 250 personnes qui en sont mortes (pour plus de 200 000 personnes atteintes). Pour l'instant, en Belgique, sur 1 800 cas confirmés 21 personnes sont mortes. Ces chiffres de cas confirmés sont en-deça de la réalité puisque toutes les personnes atteintes ne sont pas diagnostiquées.

Les personnes âgées et/ou fragilisées sont les publics les plus à risque

Hypertension, diabète, maladies cardio-vasculaires, pulmonaires, asthme, tabac intensif, immunité faible,... Nous ne parlons pas en termes de contamination où tout le monde est concerné (les 40-50 ans sont les plus nombreux dans les cas pour l'instant) mais en termes de non résistance à la maladie (les plus de 65 ans en meurent le plus pour l'instant).

Les enfants sont peu à risque mais contagieux. Les animaux ne sont en principe pas vecteurs. Le virus ne se communiquerait pas entre les femmes enceintes et leurs fœtus (mais ses conséquences peuvent bien sûr avoir un impact sur la grossesse). Une personne sur dix atteintes pourrait garder des séquelles respiratoires.

Il serait un peu plus contagieux que la grippe saisonnière

La contagiosité d'une personne atteinte durerait 20 jours en médiane (c'est-à-dire que certains cas vont jusqu'à 40 jours).

Il se transmet par contact physique, postillons et, indirectement,  par le touché d'objets infectés (qui le resteraient, comme pour les autres coronavirus, entre plusieurs heures et trois jours en fonction du type de surface, de la température, de l'humidité ambiante, etc.). Il y aurait peu de cas de contagion par aérosols, mais le virus resterait jusqu'à trois heures dans l'air.

L'idéal - nous ne prétendons pas que c'est possible pour tout le monde, mais bien l'idéal - est donc de ne pas se retrouver dans des endroits fermés avec d'autres personnes au-delà des proches avec qui on vit au jour le jour (et avec qui il est important de pouvoir s'accorder sur des comportements compatibles) ; à l'extérieur, et dans les lieux inévitables (commerces alimentaires, hôpitaux,...) de garder une distance d'un mètre et demi voire deux ; de se dire bonjour sans se toucher (à la rigueur avec les jambes tendues) ; de s'échanger les objets en les déposant, avec des gants, dans un sac à distance (comme dans les films) ; d'ouvrir les portes, de tenir les caddies, les chaises, d'appuyer sur les boutons d'ascenseurs, etc., avec des gants et en tout cas de nettoyer souvent ces surfaces communes (ainsi que les lunettes de wc) ; de se désinfecter ou laver les mains (pour du vrai, pas à moitié) très régulièrement ; d'éviter de se toucher le visage avec les mains ; de ne pas tousser ou éternuer en direction d'autres personnes (voire d'objets) mais dans son coude ; si on se sent malade, d'appeler un·e médecin et de rester chez soi.

Il ne faut pas prendre d'antibiotiques (qui n'agissent pas contre les virus) ou d'anti-inflammatoires (qui affaiblissent l'organisme) sans avis d'un·e médecin. Les antidouleurs (ex : paracétamol) ne poseraient pas de problème. Éviter le sucre. On peut bien sûr renforcer son immunité (propolis, echinacea, acerola, extraits de pépin de pamplemousse, huiles essentielles de tea tree, ravintsara ou thym en petites quantités, vitamines C et D, soleil, fruits, aération,...). Il faut éviter de s'affaiblir, soi et les autres, avec d'autres microbes, même si ces derniers n'auraient rien à voir avec la covid-19. Enfin, rire et vivre ensemble est une des meilleures manières de garder un bon système immunitaire, nous ne sommes pas des machines.

Il faudrait entre 1 et 15 jours (5 en moyenne) pour que les symptômes se déclarent

C'est ce qu'on appelle la période d'incubation. La contagiosité commence en principe avant cette déclaration de symptômes. Les symptômes les plus observés sur les personnes traitées sont fièvre, toux, fatigue, difficultés respiratoires, maux. Une proportion importante (il s'agirait de la majorité) des personnes malades sont asymptomatiques, c'est-à-dire qu'elles ne présentent pas de symptômes, et beaucoup d'autres présentent des symptômes légers. De plus, il ne faut pas oublier qu'on peut porter le virus sur nous sans l'avoir contracté pour autant. En somme, nous sommes dans ce contexte des véhicules du virus et/ou d'affaiblissements divers pour les autres.

Nous n'avons pour l'instant ni immunité, ni vaccin, ni médicament

D'où le fort caractère pandémique du virus. Il peut muter. Nous devrons probablement apprendre à vivre avec lui (et certainement d'autres dans le futur), d'où l'extrême nécessité de tirer des leçons de cette situation lors de l'accalmie à venir (en Chine, les nouveaux cas locaux par jour viendraient de tomber à zéro) plutôt que de se boucher le nez et d'accepter un illusoire « retour à la normal » dans une société profondément fragilisée par le capitalisme.

Sources :
 lasanteenlutte.org
 info-coronavirus.be
 who.int

Notes

[1] Covi = corona virus, d = disease et 19 = 2019

[2] Voir : Fares A.,  Le plan de sauvetage bancaire massif qui se cache derrière les mesures contre le Coronavirus ; Toussaint E.,  La pandémie du capitalisme, le Coronavirus et la crise économique ; Partager c'est sympa, Le Krach a eu lieu, ce qui va suivre sera pire sauf si...

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