par Manlio Dinucci
newsnet_51023_gates-nato-libya.jpgLe secrétaire à la Défense de l'administration Obama, Robert Gates
Le scénario est celui que nous avions déjà vécu quand, le 24 mars 1999, les avions qui avaient décollé du territoire italien, mis à disposition des forces USA/OTAN par le gouvernement D'Alema (centre-gauche), lancèrent les premières bombes sur la Serbie, en commençant la « guerre humanitaire » à laquelle participèrent aussi peu de temps après les chasseurs-bombardiers italiens. A présent l'objectif de la nouvelle « guerre humanitaire » est la Libye. Pour se faire pardonner à Washington le traité d'amitié italo-libyen qui engageait les deux parties à « ne pas recourir à la menace ou à l'usage de la force », le gouvernement Berlusconi (centre-droit) a mis à disposition pour l'attaque non seulement toutes les bases mais aussi les forces aériennes et navales. Comme l'a expliqué l'ex-chef d'Etat-major de l'aéronautique Leonardo Tricario, pour imposer la zone d'exclusion aérienne sur la Libye il faut neutraliser les défenses anti-aériennes ennemies. « Nous, nous avons cette capacité et elle est constituée par les chasseurs Tornado Ecr : nous l'avons fait au Kosovo et trois jours après plus aucun avion serbe ne volait ».
A cet effet les Tornado Ecr ont été redéployés de Piacenza à Trapani. C'est là qu'ont aussi été déplacés les Tornado Eds de Ghedi (Brescia) et les Eurofighter de Grossetto (Toscane) : des chasseurs bombardiers de combat aux énormes capacités destructives. Prêts à l'attaque aussi les chasseurs Amx d'Amendola (Foggia, région des Pouilles) et les Eurofighter de Gioia del Colle (Bari). S'y ajoutent les avions de chasse du porte-avions Garibaldi, déplacé lui aussi de Taranto à Augusta (Syracuse) et ceux du porte-avions Cavour arrivé dans la base sicilienne depuis La Spezia. Les deux porte-avions sont flanqués des torpilleurs lance-missiles Andrea Doria et Mimbelli, de la frégate Euro, du patrouilleur Libra, des navires de combat amphibies San Marco et San Giorgio et d'autres navires de guerre.
Ce déploiement déjà considérable ne constitue qu'une petite partie de la force totale utilisée dans cette guerre contre la Libye. La guerre aérienne est composée des chasseurs français Rafale, les premiers qui ont attaqué en partant de la base de Saint Dizier, des Tornado britanniques déplacés dans le sud à faible distance de la Libye, des F-16 étasuniens d'Aviano (Vénétie-Julie-Frioul) où arrivent d'autres bombardiers, des F-16 belges et norvégiens déployés eux aussi au sud, à quoi s'ajoutent le Cf-18 canadiens. La force navale est tout aussi imposante. Elle comprend, parmi les nombreux navires de guerre qui mouillent devant la Libye, le navire étasunien d'assaut amphibie Kearsarge, le plus grand du monde, avec à bord avions et hélicoptères de combat, chars d'assaut lourds et véhicules de débarquement, en capacité de transporter 4 mille marines et chars d'assaut. A ses côtés le porte-hélicoptères français Mistral, unité d'assaut amphibie avec des hélicoptères de combat, des chars d'assaut lourds et 500 commandos. Le fait que le président Obama ait déclaré que les Etats-Unis n'enverront pas de troupes terrestres en Libye est facilement explicable : comme il advint pour la guerre contre la Yougoslavie, le débarquement de troupes fut précédé de gros bombardements aériens et navals. La totalité de l'opération aéronavale est dirigée par le Commandement des forces navales étasuniennes en Europe, à Naples, où se trouvent aussi le quartier-général des forces navales du Commandement Africa et celui de la Force conjointe alliée. Les trois commandements sont dans les mains du même amiral étasunien, Sam J. Locklear III, c'est-à-dire du Pentagone.
Pourquoi cet imposant usage de forces, disproportionné par rapport aux capacités militaires du régime Kadhafi ?
Parce il ne s'agit évidemment pas seulement d'une opération militaire mais d'une course à l'or noir libyen, que les participants ont l'intention de se partager proportionnellement à leur engagement dans la « guerre humanitaire ».
Edition de dimanche 20 mars 2011 de il manifesto
Traduit de l'italien par Marie-Ange Patrizio
Manlio Dinucci est géographe.