Les journaux arabes consacraient leurs une dimanche aux frappes occidentales en Libye, mais étaient divisés sur leur opportunité...
Certains titres y voyant une opération « impérialiste » occidentale, d'autres jugeant essentiel d'arrêter Mouammar Kadhafi.
Pour la presse tunisienne : « une menace pour la région »
En Tunisie, théâtre d'une révolution en décembre-janvier, la presse prononce un verdict dur contre les bombardements aériens lancés samedi et approuvés par l'ONU jeudi, estimant que ceux-ci pouvaient plonger le Maghreb et le Moyen-Orient dans l'instabilité.
Cette action représente « une menace pour la région », risquant d'en faire une « zone de tension et une base avancée pour les forces impérialistes », estime le journal privé Achourouk.
Le quotidien juge même que l'arrivée des Occidentaux « va souiller la bataille du peuple libyen contre la junte corrompue » de Kadhafi.
Pour le journal Essabah, cette intervention militaire est alimentée par le pétrole libyen qui aiguise les appétits occidentaux. Une analyse que partage le principal quotidien algérien El Khabar dans un éditorial intitulé « Quand le pétrole se mélange au sang libyen ». « La vraie guerre est celle du pétrole. Le peuple libyen n'a rien a y faire », martèle-t-il.
L'Algérie parle « d'une guerre pour le pétrole »
El Watan moque de son côté les Occidentaux qui donnent la leçon à Kadhafi mais oublient « monarques, princes, roitelets et présidents à vie (ou à mort) qui humilient leurs peuples », en allusion à la répression de la contestation au Bahreïn et au Yémen, où l'Europe et les Etats-Unis se gardent d'intervenir.
Toujours en Algérie, Le Soir prend à contre-pied ces positions dans une « Lettre aux vierges qui crient au nouvel impérialisme et au néo-colonialisme », soulignant que Kadhafi réprime dans le sang depuis plus d'un mois une insurrection populaire.
« Fallait-il pour être un bon Arabe, un bon musulman, attendre en silence que le dernier habitant de Benghazi (le fief des rebelles libyens, ndlr) soit exposé aux (missiles) Katioucha ou au gaz sous prétexte que les Occidentaux veulent recomposer la région ? », feint de s'interroger le journal.
Aux Emirats arabes unis, la presse est partagée
Aux Emirats arabes unis, le Gulf news milite de son côté avec ferveur pour les bombardements en Libye, titrant « Le monde a commencé à agir contre Kadhafi ».
Dans un éditorial publié sur son site internet quelques heures avant le début des frappes, celles-ci étant intervenues après le bouclage des éditions des journaux du Golfe, le quotidien insistait déjà sur la nécessité d'arrêter les forces de Tripoli « aujourd'hui, pas demain ».
« Tout retard serait inacceptable », martèle l'auteur, « le dirigeant libyen et toute personne continuant de se battre pour lui doit voir que la communauté internationale se mobilise pour répondre à ses crimes contre l'humanité ».
En Israël, les bombardements étrangers ne font pas non plus l'unanimité. Le quotidien populaire Yediot Aharonot se félicite que « le monde ait arrêté de se taire » et souligne que le président américain Barack Obama a annoncé que la communauté internationale ne garderait plus le silence lorsque « un tyran massacre ses compatriotes ».
Mais Maariv relève qu'il est désormais difficile de prévoir l'issu des violences en Libye : « les frappes aériennes risquent de prolonger le conflit et d'entraîner en fin de compte une intervention militaire plus grave ».
(Dimanche, 20 mars 2011 - Avec les agences de presse)