27/07/2011 mondialisation.ca  3min #55683

 Manifestation de milliers d'Egyptiens sur la place Tahrir

Au Caire transition pilotée

Rubrique L'art de la guerre

par Manlio Dinucci

Dans une touchante cérémonie à la Maison Blanche, le président Obama a commémoré un jeune businessman égyptien tué par la police de Moubarak (armée et entraînée par les Usa), décoré par le « Prix Démocratie 2011 » de la National Endowment for Democracy (Ned). Les Etats-Unis, a rappelé le président, soutiennent fortement la transition vers la démocratie en Egypte, en valorisant le leadership des voix émergeantes, surtout jeunes, dans la société civile. S'occupent de leur formation la Ned et d'autres organisations « non-gouvernementales », en réalité des émanations du Département d'Etat et de la Cia, qui financent en Egypte des dizaines de projets. D'autres programmes sont gérés directement par le gouvernement étasunien. Le Global Entrepreneurship Program, institué par l'administration Obama pour « promouvoir la culture entrepreneuriale dans les pays en voie de développement », organise des cours, tenus par des entrepreneurs étasuniens, auxquels participent de jeunes égyptiens des classes moyenne et moyenne-haute. Les meilleurs sont envoyés aux Usa pour des cours de perfectionnement. On soigne surtout la formation de jeunes gestionnaires de sites Internet, en anglais et en arabe, lesquels reçoivent des financements et know how même de sociétés privées étasuniennes. On élève ainsi une nouvelle classe dirigeante égyptienne, que le New York Times définit comme « les entrepreneurs de la révolution ». Une « révolution » pilotée par Washington, dont l'objectif est de donner un visage « démocratique » à un pays où le pouvoir continue à s'appuyer sur les sommets des forces armées. Cette classe militaire financée, armée et entraînée par les Etats-Unis, qui durant le régime de Moubarak a été la véritable détentrice du pouvoir. Cette même caste qui s'est présentée comme garante de « la transition pacifique et ordonnée », requise par le président Obama quand le dictateur Moubarak, après trente années d'honorable service rendu aux Etats-Unis, a été renversé par le soulèvement populaire. Avec les milliards de dollars reçus de Washington et un bilan tenu secret au parlement, cette caste a créé sa propre base économique, comprenant des chaînes d'hôtels, magasins de produits électroniques, industries automobiles et nombreuses autres activités. C'est sur cette caste militaro-économique que mise Washington pour « la transition pacifique et ordonnée » qui laisse intacts les piliers de la domination étasunienne sur le pays. Washington continue donc à la financer et à l'armer, même si, au Congrès, on a des doutes sur sa fiabilité. Tout, de fait, ne va pas comme on le voudrait à la Maison Blanche. Les manifestants sont revenus à Place Tahir, voyant déçues leurs attentes de réels changements démocratiques, dans un pays où 40% de la population vit dans la pauvreté. Les sommets militaires, tout en réprimant les manifestations, ont dû faire des concessions, comme le remaniement du gouvernement et la mise en préretraite de 600 policiers, auteurs de la répression sanglante de Place Tahir. Ils n'ont cependant pas révélé les noms des policiers et personne n'a été puni. Et les sommets militaires sont toujours les garants de la nouvelle constitution, dont la rédaction est confiée à une commission nommée par ces mêmes militaires. Comme suprême garantie on trouve l'engagement des Etats-Unis, réaffirmé par le président, de soutenir les droits universels non seulement en Egypte mais dans tous les pays de la région.

Edition de mardi 26 juillet de il manifesto

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Traduit de l'italien par Marie-Ange Patrizio

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